La pandémie a certainement joué un rôle primordial dans le désarroi qui a saisi les habitants de la planète, conscients comme ils ne l’avaient pas été depuis longtemps de la fragilité de l’humanité. C’est un faisceau de douleurs diverses, maladie, mortalité, vies durablement abîmées, assorties d’un effondrement mondial de l’économie, une asphyxie des pays pauvres, un endettement accablant des pays riches. Le fléau a été assez commenté pour qu’on laisse les chroniqueurs poursuivre leurs analyses.
Mais il n’y a pas que le virus : la démagogie, le populisme, le néo-fascisme ont accompli des progrès alarmants : la Russie étend son emprise sur l’Asie, notamment en ignorant les droits les plus élémentaires ; la Chine s’est transformée en État policier qui surveille près d’un milliard et demi d’individus par tous les moyens qu’offrent les technologies nouvelles, place le Tibet sous son joug et mène contre les Ouïghours une campagne qui ressemble à un génocide ; la Turquie intervient militairement en Libye, en Syrie, dans le Haut-Karabach où, avec le concours de Poutine, elle a vaincu l’Arménie, dans les eaux territoriales grecques au mépris des engagements qu’elle a avec l’Otan. Mais ce n’est pas tout : pendant que les régimes autoritaires, au Brésil par exemple, ravagent leurs territoires, des peuples crient leur besoin insatiable de liberté, Biélorusses, Hongkongais, et autres.
Le terrorisme n’a pas vraiment reculé. Il poursuit contre des civils innocents, contre femmes et enfants, sa guerilla théologique, aggravant sans cesse son bilan sinistre. Dans le camp occidental, les quatre années du mandat de Donald Trump ont été un spectacle de Grand Guignol, et, au Royaume-Uni, Boris Johnson a fait du Brexit l’acte politique le plus absurde de ce siècle en renonçant pratiquement à tout ce qui fait la grandeur de son pays au nom d’une souveraineté que personne ne menaçait.
Nous ne sortirons pas indemnes de 2020 : il faudra des années pour réparer patiemment les dégâts infligés au mode de vie, à la prospérité, au respect du droit, à la paix du monde. Mais il n’est pas sûr du tout que, de la démagogie à la recherche permanente de la vérité, ce soit la seconde qui triomphe. Les peuples ont la mémoire courte. Ils ont oublié ce que le mot guerre veut dire.
Le vaccin est une chance
Pourtant, le pire n’est pas sûr. Le vaccin offre un espoir au monde entier. L’important, pour un regain d’optimisme, c’est que le pendule va inexorablement de droite à gauche et vice versa. ll y a un temps pour la dictature et un temps pour la démocratie, un temps pour la prison et un temps pour la liberté. Observez : le plan de Boris Johnson était appuyé sur une alliance exceptionnelle avec Trump. Il n’y a plus de Trump. Vers qui va-t-il se rabattre, vers Xi Jiping ? Les États de droit sont plus durables que les régimes autoritaires et la démagogie n’agite que du vent.
2021 ne sera pas non plus une partie de plaisir. Cependant, le vaccin permettra aux sociétés occidentales de repartir d’un bon pied, les économies progresseront, les dettes peuvent être cantonnées ou remboursées, la hausse des impôts peut être limitée aux nantis. Un jour, il y aura le temps du plein emploi. Un jour, nos concitoyens cesseront peut-être de rêver aux jours meilleurs qu’ils croient obtenir par la violence.