Il Y A QUELQUES ANNÉES seulement, lorsqu’un pharmacien souhaitait obtenir un financement bancaire pour l’acquisition de son officine, il devait certes en négocier les conditions, mais il était très souvent assuré d’une réponse positive. Cette époque est révolue : les établissements de crédit et les banques sont devenus aujourd’hui très prudents lorsqu’elles sont sollicitées pour un financement. Le critère principal de leur décision : le prix. Pour que le financement soit accepté, l’officine doit être achetée à un prix raisonnable, qui corresponde à sa rentabilité. Le plan de financement présenté par le pharmacien et son expert-comptable est donc examiné à la loupe, et il n’est pas rare que ce plan doive être revu avant que la banque ne se décide. Par exemple, le banquier peut demander au pharmacien de faire baisser le prix demandé par le vendeur, ou d’augmenter le montant de son apport. De même, le plan prévisionnel de chiffre d’affaires et de bénéfice doit être sérieux et rigoureux. Les banques savent que les perspectives de croissance d’activité des officines sont faibles – en général, les plans sont faits avec une hypothèse de croissance de 1 % par an -, et en tirent argument pour être d’autant plus exigeantes dans l’examen du dossier.
Les banques sont devenues aujourd’hui si strictes sur le prix d’acquisition qu’elles jouent sans doute, désormais, un rôle non négligeable dans la fixation de la valeur des fonds et la baisse des prix de cession observée depuis l’année 2008. Au minimum, les banques constituent un frein à la valorisation excessive de certains fonds. Car finalement, aujourd’hui, celui qui décide du prix d’achat et du prix de vente d’une officine, c’est bien le banquier… Dans ces conditions, pour obtenir son financement, un pharmacien acquéreur doit en revenir aux fondamentaux, en s’attachant aux seuls critères financiers de l’opération : un prix d’achat raisonnable, un apport personnel suffisant, le choix d’une officine rentable et bien gérée. Après, seulement, le pharmacien doit s’intéresser aux offres du marché en termes de taux et de conditions de prêt et d’assurance.
Ne pas acheter trop cher.
C’est le leitmotiv de toutes les banques et de tous les experts-comptables : pour obtenir le financement nécessaire à l’acquisition d’une pharmacie, celle-ci ne doit pas être achetée à un prix trop élevé. « La banque vérifie avant tout que le prix d’achat correspond à la valeur économique de la pharmacie. Et si ce prix est supérieur, en moyenne, à 85 % de son chiffre d’affaires, la banque refuse d’accorder le financement ou demande un apport personnel très important », affirme Michel Watrelos, expert-comptable à Lille.
Cette position de principe des banques est nouvelle. Il y a quelques années seulement, le principal critère était celui de l’apport personnel : avec un apport important, un pharmacien pouvait acquérir n’importe quelle officine ou presque. Aujourd’hui le montant de l’apport dépend au contraire du prix d’achat et de la rentabilité de l’officine par rapport à ce prix. Le principe antérieur qui consistait pour les banques, il y a peu de temps encore, à privilégier le financement de grosses officines au détriment des petites, n’a donc plus cours. Désormais, pour convaincre la banque, le critère déterminant est celui du prix payé par rapport à la rentabilité prévisionnelle.
Disposer d’un bon apport.
Traditionnellement, l’apport personnel nécessaire pour acquérir une officine se situait, ces dernières années, autour de 20 % du prix d’acquisition. Actuellement, le montant de l’apport exigé par les banques peut varier dans une fourchette moyenne allant de 15 % à 25 % du prix, selon la rentabilité de l’officine qui va être achetée. « Si la cession de la pharmacie est mal préparée, avec notamment un effectif salarié trop important et, donc, une mauvaise rentabilité, le banquier exigera un apport plus élevé que pour une autre officine, parfois jusqu’à 30 % et davantage. Inversement, si la rentabilité actuelle ou les perspectives de rentabilités sont bonnes, le banquier pourra se contenter d’un apport plus faible », prévient Philippe Becker, directeur du département pharmacie de Fiducial. En termes financiers, pour que le pharmacien obtienne son crédit, la rentabilité de l’officine doit être suffisante pour permettre à ce pharmacien de rembourser son emprunt, de renouveler les équipements et pour s’assurer un train de vie correct.
En outre, l’apport personnel du pharmacien doit pouvoir financer tous les coûts annexes à l’acquisition du fonds : le stock, les droits d’enregistrement (environ 7 % du prix), la commission du cabinet de transaction le cas échéant (5 % du prix), les frais d’acte, le besoin en fonds de roulement, les travaux éventuels… Les banques, en effet, ne prêtent que dans la limite de la valeur du fonds, à l’exclusion, donc, des autres frais d’acquisition dont le montant, pourtant, est souvent élevé.
Préparer la cession.
Pour qu’un pharmacien puisse acheter une officine dans de bonnes conditions, il faut que celle-ci soit vendable. Un titulaire qui envisage de céder son fonds a donc intérêt à préparer cette cession s’il veut pouvoir trouver un repreneur et que celui-ci obtienne son prêt. Or, malheureusement, de nombreux pharmaciens demandent un prix élevé pour leur officine alors même que cette dernière présente de graves défauts pour un banquier. En vue de la vente du fonds, il faut donc gérer au plus près le personnel, par exemple en ne remplaçant pas les départs à la retraite, et en évitant de conclure de nouveaux contrats à durée déterminée. La pharmacie, expliquent les experts-comptables, doit être « productive », avec le bon personnel au bon endroit. Attention aussi si les salariés sont âgés : c’est parfois un obstacle à la vente si ces salariés ne restent pas dans l’officine où si le repreneur, au contraire, doit s’en séparer. Généralement, il faut également faire un audit des frais informatiques en vérifiant s’ils ne sont pas trop élevés, faire un audit aussi des contrats de leasing (certains pharmaciens en ont parfois sept ou huit…) et pointer les frais généraux dans leur ensemble.
En revanche, il n’est pas utile d’effectuer des travaux dans l’officine en espérant vendre plus cher : sauf le cas d’une pharmacie qui tomberait en ruine, il est préférable de laisser au futur titulaire le soin de faire les travaux de réfection. Généralement, les travaux ne majorent pas le prix de vente, mais impactent au contraire la trésorerie du vendeur. De nombreux acquéreurs pensent même, paradoxalement, qu’il est fiscalement intéressant pour eux d’effectuer les travaux…
Comparer les offres des banques.
Les principaux dispensateurs de crédit aux officines, aujourd’hui, sont INTERFIMO (filiale du Crédit Lyonnais), BNP Paribas et sa filiale CMV Médiforce, et le Crédit Mutuel. Ces trois établissements distribuent à eux seuls plus de la moitié des crédits d’installation aux pharmaciens. Sur le plan des taux, leurs offres sont très comparables. Actuellement, la moyenne du marché varie entre 3,4 % et 3,8 % hors assurances, avec une médiane autour de 3,6 %. Ponctuellement, on peut trouver des taux un peu plus bas – entre 3,05 et 3,25 % chez BNP Paribas - mais également plus élevés – de 3,60 % à 3,80 % à la Banque Populaire ou chez HSBC. Mais, bien évidemment, si le pharmacien est déjà client de la banque – après une première installation par exemple -, tout dépend aussi des rapports qu’il entretient avec elle. Dans tous les cas, les financements se font à taux fixe, sur une durée de principe de douze ans. « On ne voit plus de crédits à taux révisable ou in fine pour les pharmacies. Les banques sont revenues à des financements traditionnels à taux fixe et à échéances constantes. Il n’y a pas non plus d’innovations en la matière, les banques de détail, comme aussi certaines banques spécialisées, ne cherchant plus à s’attirer à tout prix la clientèle des pharmaciens », constate Philippe Becker.
À moins de 4 % le plus souvent, les taux bancaires actuels sont donc plutôt favorables. Mais, bien entendu, le taux accordé ou négocié dépend en grande partie de la qualité du dossier présenté par le pharmacien : plus la pharmacie visée est rentable ou offre de bonnes perspectives de rentabilité, et plus la négociation sur le taux est aisée.
Payer moins d’assurance.
Dernier point à prendre en compte : l’assurance du crédit. Pour comparer les taux de crédits du marché, il faut en effet prendre en compte non seulement le taux lui-même, mais également les frais de dossier et d’assurance (invalidité décès), ainsi que les pénalités prévues le cas échéant en cas de remboursement anticipé du prêt. Or le coût de l’assurance invalidité décès ou incapacité de travail peut renchérir sensiblement le coût du financement. Il est très variable d’un établissement à un autre, et d’ailleurs généralement plus élevé dans les réseaux bancaires traditionnels. « Pour un pharmacien de moins de trente ans, l’assurance représente un coût de 0,12 % environ, alors qu’un pharmacien de plus de 50 ans paiera jusqu’à 0,50 %, explique Michel Watrelos. Les banques spécialisées ont leur propre assurance, avec des taux fixes par tranche d’âge. Si le pharmacien est un peu âgé, il peut donc avoir intérêt à souscrire l’assurance du prêt chez un assureur qui connaît les professions de santé, comme La Médicale, où les taux sont moins élevés. »
L’assurance-décès du crédit, d’ailleurs, peut être complétée par une solution de prévoyance. La Médicale, en particulier, propose à tous les souscripteurs d’une assurance liée à un crédit professionnel ou privé, souscrit dans une banque ou ailleurs, une garantie complémentaire qui couvre la perte de revenus en cas d’incapacité temporaire totale. En pratique, cette assurance garantit le versement d’indemnités journalières pendant une durée maximale de 730 jours. Il est possible également de souscrire cette assurance dans le cadre de la loi Madelin, et de bénéficier ainsi de la déduction fiscale des cotisations versées, dans la limite d’un plafond annuel.
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