Premier équipement de notre triathlon camarguais : le vélo. C’est l’outil idéal pour se glisser dans les replis d’un territoire dont on ne connaît souvent que les poncifs (Les Saintes-Maries-de-la-Mer, les centres équestres en bord de route, quelques restaurants opportunistes…). Nom de l’étape du jour : Les Saintes-Phare de la Gacholle. Soit 24 km aller-retour sur une « digue à la mer », qui permet d’apprécier, en légère élévation, l’éventail des paysages, étangs, marais, plages et sansouires qui constituent le territoire.
VTC loué, pique-nique et eau emportés, direction la sortie est des Saintes-Maries-de-la-Mer, afin de rejoindre la digue. Érigée au XIXe siècle pour empêcher l’eau de mer de pénétrer l’intérieur du delta du Rhône, cette levée de terre s’éloigne peu à peu de la civilisation pour dévoiler la richesse de la faune et de la flore. Herbacées, sternes, hérons, aigrettes, mouettes, avocettes… et bien sûr flamants roses, accompagnent l’étape jusqu’au phare. Au cœur de la Réserve naturelle nationale de Camargue, 13 000 ha sanctuarisés dans l’écrin du delta. Le phare, l’un des trois de la côte camarguaise, date de 1882. Le week-end et lors des vacances scolaires, il est occupé par des bénévoles de la Réserve et propose des panneaux d’information sur l’écosystème camarguais. Le lieu est tout indiqué pour le pique-nique. Avant le retour par le même chemin (avec arrêt plage et baignade autorisés !), il est possible de pédaler encore 10 à 15 minutes jusqu’à « l’observatoire des flamants ». Il s’ouvre sur l’étang du Fangassier, généralement fréquenté par les oiseaux roses.
On reprend sa voiture et on file à l’extrémité est de la Camargue. Tout au bout du Grand Rhône, après Salin-de-Giraud et les dunes de sel, témoins d’une exploitation toujours active, voici le Domaine de la Palissade. Cet espace de 700 ha, propriété du Conservatoire du Littoral et géré par le Parc naturel régional de Camargue, préserve les six milieux majeurs du territoire : lagunes, plages, dunes, sansouires, ripisylve et marais. Trois sentiers d’interprétation (1, 3 ou 8 km) sont aménagés pour les découvrir. Mieux vaut s’engager sur le plus long, mais ceux qui manqueraient de temps peuvent avoir grâce au premier, surtout en visite guidée (sur réservation), un bel aperçu de la variété des paysages. La sansouire est le plus étonnant. La présence de sel dans les sols limite la végétation, composée pour l’essentiel de salicornes, soudes et saladelles. Au milieu de ce maigre paysage émergent de rares pelouses. Un éleveur y fait paître ses chevaux camarguais, reconnaissables à leur robe blanche typique. Le marais, lui, est bordé par un observatoire. Il permet de voir des oiseaux nicheurs et des hivernants (cygnes, poules d’eau, canards…, parfois des ibis et même des grues cendrées). Après le marais, entouré de roselières, voici la ripisylve, troisième milieu naturel du parcours de 1 km. Nous sommes au bord du Grand Rhône (le bras principal), dans un « bois de rive ». Un mirador domine la végétation et le fleuve puissant, qui coule en direction d’une embouchure totalement sauvage. C’est le moment de s’y rendre à l’aide du troisième équipement de ce séjour sportif : le kayak.
L’embouchure du fleuve en Méditerranée marque le terme de ses 812 km. Un final puissant et pleine nature, où ne s’aventurent que des riverains habitués et de rares pagayeurs. L’embarquement s’opère au Domaine de la Palissade, avec le prestataire Vert & Bleu Découverte. Au choix, une balade de 1 h 30 autour de la dernière île du fleuve ou une petite expédition d’environ 4 heures aller-retour jusqu’à la mer, plus sportive. Dans ses derniers hectomètres, le Rhône, fiévreux, mouvant, libère tous les chevaux accumulés au fil de sa cavalcade rhônalpine. Berges folles ou argileuses, mouettes rieuses et canards, hérons, aigrettes et cormorans…, sur ces rives inhabitées, la nature reprend ses droits. Au milieu du courant, des mulets font la sarabande, bondissant hors de l’eau. L’embouchure se devine au loin, indécise, marquée par le liseré blanc du sable. Le fleuve s’est élargi. Encore quelques coups de pagaie et l’on s’échoue sur une plage, à 100 m de la Méditerranée. Seuls au monde. La relative difficulté du retour sera largement compensée par l’énergie joyeuse accumulée au long de cette descente rare et aventureuse.