Les biais de perception visuelle sont multiples et peuvent avoir des conséquences sur les décisions d’achat ou de consommation alimentaire. Néanmoins, leur impact peut être atténué ou compensé en jouant sur les packagings par l’utilisation habile de différentes stratégies et méthodes faisant appel à des principes d’optique géométrique aussi bien que de psychologie cognitive. Pierre Chandon, professeur de marketing à l'INSEAD, détaille les quatre types de biais majeurs.
Le biais de sous-ajustement
Le premier biais de perception visuelle auquel sont régulièrement confrontés les consommateurs est lié à la minimisation de la taille réelle d’une portion ou d’un emballage. De nombreuses études ont démontré que la sensibilité des estimations de volume et d’apport calorique diminue lorsque la taille de la portion augmente (voir le « Quotidien du Pharmacien » du 6 novembre 2020). Une ration de 500 calories paraît contenir 425 calories, soit une faible sous-estimation (-15 %), contre 790 calories pour un repas de 1 500 calories, ce qui correspond à une forte sous-estimation (-47 %). Il s’agit d’un biais très puissant, une sorte d’illusion d’optique qui peut être atténuée en incitant le consommateur à estimer la taille de chaque élément composant le repas avant d'évaluer ce dernier dans son ensemble.
Le biais de la dimension
Le second biais auquel sont soumis les consommateurs est lié au nombre de dimensions impactées par les modifications de la taille de la portion ou de l’emballage. Il est plus facile de repérer les changements de volume lorsqu’ils n’interviennent que sur une seule dimension. Ces modifications sont déjà moins visibles lorsqu’elles s’opèrent sur deux dimensions, elles le sont encore moins lorsqu’elles reposent sur les trois dimensions (hauteur, largeur, profondeur). Un des moyens permettant de rendre perceptible le changement de taille consiste ainsi à ne modifier qu’une dimension à la fois. Inversement, modifier les trois dimensions permet de mieux faire accepter les réductions de taille. Il a également été montré que la meilleure façon de minimiser la perception de la réduction de taille, sans que les consommateurs ne s’en rendent compte, consiste à étirer l’emballage ou la portion en augmentant une dimension tout en réduisant fortement les deux autres.
Le biais d’étiquetage
Le troisième type de biais de perception ayant un impact sur le comportement d’achat et de consommation provient des mentions et allégations présentes sur les emballages alimentaires. Mentionner sur l’emballage qu’un produit est petit, moyen ou grand peut affecter significativement la perception de sa taille et contribuer à conduire les consommateurs à manger plus, tout en pensant manger moins. Revenir à des quantités standardisées (comme c’est encore le cas pour les boissons alcoolisées), est une piste potentielle de compensation de ce biais, afin que les consommateurs sachent à quoi correspond une taille petite ou moyenne. Une autre forme de biais d’étiquetage provient des allégations liées à la nutrition ou à la santé. Une mention suggérant qu’un aliment est « bon pour la santé » entraîne la perception qu’il possède des qualités nutritionnelles et qu’il est possible d’en manger sans impact sur son poids ou sa santé. De même, la mention « allégés en matière grasse » est interprétée par de nombreux consommateurs comme indiquant que le produit contient moins de calories et qu’il est donc possible d’en consommer davantage sans sentiment de culpabilité.
Le biais affectif
La dernière forme de biais résulte de la réaction affective et de l'ambivalence que peuvent entretenir certaines personnes avec la nourriture. Elles sont partagées entre le désir de consommer des aliments hédoniques et la crainte pour leur santé Ce conflit émotionnel tend à améliorer les aptitudes des individus à évaluer des volumes et à estimer correctement la composition des portions.
D'après une visioconférence du Fonds français pour l'alimentation et la santé (FFAS).