À la fin de l'année 2020, Biosynex dépassait 150 millions d'euros de chiffre d'affaires et comptait 15 000 pharmacies clientes au sein du réseau officinal… Une évolution spectaculaire à laquelle l'entreprise n'aurait osé rêver quinze ans plus tôt, alors qu'elle effectuait ses tout premiers pas. Sa vocation, quant à elle, couvait déjà depuis longtemps dans le cœur de ses fondateurs.
En 1994, Dectra Pharm et All Diag, deux sociétés spécialisées dans la commercialisation de tests diagnostiques, voient le jour. Leurs dirigeants, Larry Abensur et Thomas Lamy, ne sont pas issus des mêmes filières – l'un est chimiste, l'autre agronome – mais tous deux ont reçu une formation d'ingénieur, chacune ponctuée par un MBA. Là n'est pas leur seul point commun puisque les deux hommes ont, par le passé, travaillé ensemble à développer des tests de détection du VIH. Pendant sept ans, les deux entreprises évoluent parallèlement, fournissant leurs dispositifs aux laboratoires d'analyse et aux pharmacies.
En 2001, afin de renforcer son implantation dans le circuit officinal, Dectrapharm se rapproche de la société Quies dont les produits sont largement référencés en pharmacie. Le spécialiste des outils diagnostiques possède, il faut dire, une marque d'appareils d'automesure dont la place légitime est à l'officine. Connue sous le nom d'Exacto, la gamme propose tout un choix de thermomètres et de tensiomètres à destination du grand public. Particulièrement innovante, elle a présenté les premiers tests de grossesse sous forme de stylos, d'une grande simplicité d'utilisation et d'interprétation, et ne cesse d'investir les nombreux domaines de l'autosurveillance.
Une autre gamme, dans un domaine très différent, figure au portefeuille de Dectrapharm. Les dentifrices SuperWhite, en matière d'hygiène bucco-dentaire, ont misé sur la blancheur de l'émail, une revendication qui pourrait s'épanouir à la faveur d'un plus large référencement à l'officine. Très demandées par un public soucieux d'afficher un sourire éclatant, les pâtes au bicarbonate laisseront, en 2019, la première place à la formule au charbon actif pour laquelle SuperWhite obtiendra le prix de « produit de l'année ».
Seconde naissance
La formulation des dentifrices n'est cependant pas la vocation première à laquelle Larry Abensur et Thomas Lamy aspirent. Les deux ingénieurs veulent approfondir le champ du diagnostic rapide, pousser plus loin la recherche, développer de nouveaux dispositifs. À la démarche, est associé un pharmacien, biologiste, autre détenteur d'un MBA, Thierry Paper. En 2005, le trio décide de donner une structure et un nom à ses ambitions. Biosynex fait dès lors ses premiers pas sous la forme d'une start-up dédiée à concevoir et commercialiser des tests de diagnostic rapide (TDR). La jeune entreprise entame la longue liste de ses dispositifs brevetés par l'élaboration d'un test de rupture de la membrane amniotique commercialisé dans les maternités et les hôpitaux. La même année, Dectrapharm, qui continue d'exister tout comme le fait All Diag, remporte l'appel d’offres pour fournir les médecins généralistes en tests de détection de l'angine grâce à Streptatest.
En 2012, Biosynex entre en Bourse avec 1,6 million d'euros de chiffre d'affaires et un réseau distributeur de 1 200 pharmacies. Cette introduction sur les marchés financiers décidera, quatre ans plus tard, les trois entreprises indépendantes à fusionner sous le seul nom de Biosynex. Une décision des plus logiques si l'on considère ce qui unit les trois dirigeants : mêmes formations, visions de l'avenir, volonté entrepreneuriale. Le temps du partage et de la mutualisation a donc sonné pour la nouvelle Biosynex qui commence par racheter le département Analyse du Laboratoire Fumouze. Une façon pour l'entreprise de s'affirmer un peu plus dans le champ du test diagnostique. En témoigne la gamme Exacto qui va être à l'origine de lancements déterminants pour tout l'univers du diagnostic rapide.
En 2017, la marque présente un TDR capable de dépister l'infection par le VIH en seulement dix minutes. Destiné aux laboratoires, il sera mis à disposition du grand public sous forme d'autotest l'année suivante. Constitué d'antigènes sensibles aux anticorps dirigés contre le virus, le dispositif fournit un résultat à partir d'une goutte de sang et revendique une fiabilité à 99,9 % comparée à un test en laboratoire. Il viendra compléter les nombreux dispositifs de dépistage - test de gluten, test de tétanos, test de cannabis - que signe la marque Exacto. Mais la gamme a investi quantité d'autres segments du diagnostic et propose également des autotests d'infection (urinaire, vaginale), de conception (Grossesse Simply, Grossesse Précoce, Ovulation) ainsi que des tests destinés aux professionnels (test grippe, test angine Streptatest, test urinaire Uritop). Autre domaine de prédilection de Biosynex, l'automesure se traduit par deux types d'offre, tensiomètres – brassard, poignet – et thermomètres.
En 2019, l'entreprise fait l'acquisition d'un concurrent, Visiomed, qui lui permet de référencer le Thermoflash, premier appareil à prise de température par infrarouge. En élargissant ainsi sa gamme de thermomètres, Biosynex ne se doute pas qu'il va devoir répondre, dès les débuts 2020, à une demande brutale et massive dans ce domaine…
L'effet Covid-19
Quand l'épidémie du Covid-19 prend l'ampleur d'une crise sanitaire, les besoins en thermomètres explosent. Un des signes majeurs de l'infection étant la présence de fièvre chez l'individu, les contrôles de la température corporelle se multiplient. Biosynex, qui vend en France près de 80 000 thermomètres par an, doit brusquement fournir plus d'un million de dispositifs sur le territoire, Thermoflash en tête, dont la prise de mesure sans contact s'avère salutaire dans un contexte de menace infectieuse. Assurée par deux usines en Chine, la production de thermomètres Biosynex peut répondre à la demande.
L'urgence est la même pour les tests - sérologiques, PCR et par la suite antigéniques - liés au Covid-19 dont les commandes massives ne peuvent être honorées qu'en se tournant vers des sous-traitants asiatiques. Afin de disposer d'une plus grande autonomie, Biosynex décide alors de relocaliser en France - à Strasbourg, berceau de l'entreprise - une partie de sa sous-traitance. Dès la fin de l'année 2020, le site s'agrandit pour produire 2 millions de tests par mois et dispose d'une capacité supplémentaire pour les autres tests rapides. Un véritable défi qui consiste à fournir de gros volumes sans que la qualité de fabrication n'en pâtisse. Bientôt, les unités chargées de concevoir les tests, nécessitant de revalider chaque étape de la conception, rejoindront le site. Pour Biosynex, l'objectif est d'atteindre une totale autonomie de production en quantité et en qualité pour chacune de ses gammes. Une volonté légitime pour l'entreprise qui a fait du diagnostic rapide et de l'autosurveillance ses deux pôles d'investissement principaux depuis dix ans. L'entreprise a en effet mis à profit la dernière décennie pour atteindre les plus hautes places sur ses marchés de prédilection que représentent les thermomètres, les tensiomètres, les tests de grossesse, les chambres d'inhalation et les TROD. Un dernier domaine d'intérêt majeur pour Biosynex qui consacre 50 % de ses dépenses en R & D aux tests de diagnostic rapide et aux tests rapides d'orientation diagnostique qui, par ailleurs, occupent 40 % du chiffre d'affaires de l'entreprise. Des dispositifs dont la compréhension et la démocratisation auront été accélérées par la pandémie.