Émilie Davesne sourit en se souvenant « quand Henri [son] instituteur de CM1, à Saint-Valery-sur-Somme (Somme), nous emmenait au tir dans sa vieille deudeuche ». Cet instituteur, Henri Béal, a marqué nombre d’enfants de la ville, conduisant les uns au tir, les autres au handball. La sécurité routière n’était pas forcément respectée, mais le souvenir reste intact, chaleureux.
Émilie avait 11 ans, en 1996, quand « Henri » lui a fait découvrir le tir à la carabine, dans le village voisin d’Estréboeuf. Elle a aujourd’hui 37 ans, est devenue Émilie Boucher, mère de deux enfants, exerce comme adjointe dans une pharmacie du Tréport (Seine-Maritime), et… elle est toujours adepte du tir à la carabine. Au cours de toutes ces années, elle a gagné plusieurs titres de championne de France.
« Ce sport était important pour les enfants de Saint-Valery, se souvient-elle. Nous étions nombreux à aller au stand de tir. » Il faut préciser que tous ces enfants, de l’âge d’Émilie et plus jeunes, avaient été précédés par une championne valericaine, Marylène Léger, très titrée, et dont la photo trônait dans la salle de tir.
L’entraînement des enfants avait lieu les mercredis et samedis : « Nono nous prenait au passage, quand ce n’était pas Henri. » Nono, Jean-Noël Briard, ouvrier chez son mareyeur de père, était aussi une crème.
Concentration et maîtrise
« Au tir, il faut être concentré, apprendre à se maîtriser, arriver à se canaliser, c’est un très bon exercice pour les enfants, explique la consœur. Il faut aussi concentrer sa respiration. » La fillette de l’époque a vite appris, elle a commencé la compétition dès 1996, à 11 ans, avec « des résultats rapides ». Plusieurs fois championne de France, représentant aussi son pays en Allemagne et en Tchécoslovaquie, elle se souvient « avoir beaucoup voyagé » quand elle était jeune.
Le tir se pratique avec des carabines à plomb, des plombs de 4,5 mm, debout, face à une cible fixe ou une cible mobile. Dans ce dernier cas, que préfère Émilie, la cible défile dans un temps donné et il faut tirer un nombre donné de plombs. « Je suis surtout titrée en tir mobile », précise-t-elle.
Père et fils
« Ce sport me vide la tête, dit-elle, je n’ai pas besoin d’autre entraînement. »
Le stand de tir d’Estréboeuf compte cinquante licenciés, dont beaucoup d’enfants ; le village compte moins de trois cents habitants, les pratiquants du stand viennent des autres villages et petites villes voisines.
Émilie a fait venir au club son père, qui en est aujourd’hui le président, elle-même étant vice-présidente. Tous deux sont également membres du comité départemental, où Émilie s’occupe en particulier du site Internet. Le président du comité, Mathieu Maggi, champion titré lui aussi, habitait enfant la maison voisine des Davesne à Saint-Valery, et avait été amené au tir par Émilie.
Outre l’aspect sportif, un club demande aussi une organisation et des moyens. Le stand d’Estréboeuf prête le matériel – son armurerie abonde en carabines et pistolets -, donne les cartons et les plombs. Pour répondre à ces demandes, le club organise une galette de vœux, un repas champêtre, et bénéficie du local prêté par la commune.
Le fils d’Émilie, Simon, a commencé le tir à « à peine six ans ». Prochainement Émilie va délaisser la carabine pour le pistolet, pour accompagner son Simon, et l’entraîner.