L'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO) appelle à son tour les officinaux à se mobiliser. Aggravation des difficultés économiques, problèmes de recrutement, pénuries qui perdurent… Le syndicat estime que le ministère de la Santé et l'assurance-maladie refusent de prendre conscience des difficultés que connaît la profession. Si rien ne bouge, un risque se profile : « La destruction progressive du maillage officinal », alerte l'USPO.
Un vent de fronde souffle sur la profession. La semaine dernière, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), par la voix de son président, Philippe Besset, avait annoncé son intention de sensibiliser les pharmaciens à l'importance de se mobiliser pour faire entendre leurs difficultés. Une volonté que partage l'USPO. Pour le syndicat, il est temps que les pharmaciens se mobilisent alors que les négociations conventionnelles portant sur le volet économique doivent commencer d'ici à quelques semaines. Ces dernières, prévues à l'automne, puis début novembre, pourraient d'ailleurs… être repoussées. Le directeur général de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) aurait en effet laissé entendre que les discussions ne pourraient finalement démarrer « qu'à la fin du mois de novembre », selon Pierre-Olivier Variot, président de l'USPO, pas franchement ravi par ce nouveau changement de calendrier qui se dessine.
Un motif d'agacement supplémentaire qui vient s'ajouter à de nombreux autres. « Le manque de personnel, 1 400 étudiants manquants en deuxième année de pharmacie sur les deux dernières années, la réforme du 3e cycle qui n'avance pas, une augmentation des charges sans précédent, une baisse de l’EBE de 10 % par rapport à l’année précédente, la trésorerie qui se dégrade (pour 78 % des pharmaciens), le temps et l'argent perdus à gérer les ruptures… », liste Pierre-Olivier Variot. Au sujet des pénuries, le président de l'USPO n'est d'ailleurs pas tendre avec l'exécutif. « Comme avec le dernier plan de l'ANSM, on voit toujours des mesures pour apprendre à vivre avec les ruptures, mais jamais de solutions pour les éviter. Le pharmacien perd 25 000 € par an pour gérer les ruptures d’approvisionnement, pour un temps passé de 12 heures par semaine », dénonce-t-il.
Les problèmes qui s'accumulent risquent d'être encore aggravés par les dernières mesures prévues dans le PLFSS pour 2024. « Des économies de 500 millions d’euros sur le médicament à la charge en grande partie des officines et qui ciblent une baisse des volumes, une baisse des remises génériques de 40 % à 20 %, des cadeaux faits à l’industrie sans aucune contrepartie pour arrêter les pénuries de médicaments, des mesures inadaptées comme la dispensation à l’unité des antibiotiques… » Pour Pierre-Olivier Variot, la coupe est pleine et le constant cinglant. « Le gouvernement et l’assurance-maladie ne semblent pas entendre nos difficultés (...) À force d’utiliser la pharmacie d’officine comme une variable d’ajustement des comptes publics, les fermetures risquent de s’accélérer, notamment en milieu rural. » Des fermetures qui entraîneraient inévitablement une dégradation de l'accès aux soins et aux médicaments pour les patients.
À travers la mobilisation que les syndicats souhaitent lancer, l'idée est d'ailleurs, aussi, de sensibiliser les patients. Dans les prochains jours, des réunions seront organisées avec les représentants départementaux des syndicats pour les sensibiliser sur l'importance de cette mobilisation. Des élus locaux et des parlementaires seront alertés. Des actions graduées devraient être mises en place entre octobre et janvier : pose d'affiches dans l'espace de vente pour informer les patients sur les difficultés vécues par les pharmaciens dans un premier temps puis, à partir du mois de novembre, des actions symboliques pour alerter sur les risques qui pèsent sur l'avenir du maillage pharmaceutique (habiller les pharmacies de noir, éteindre les croix vertes, porter des brassards noirs…). Selon l'avancée des négociations à venir avec la CNAM, le mouvement pourrait ensuite se durcir. Grève des gardes, voire fermetures complètes des officines ne sont pas exclues entre décembre et janvier. « Si l'on ne prend pas en compte l'état des pharmacies, nos trésoreries vont continuer à chuter, des officines devront licencier, certaines vont fermer, l'accès aux soins sera dégradé… Et pire, on pourrait se diriger vers la financiarisation de la pharmacie, des fonds de pension rôdent déjà autour de certaines officines… », prévient Pierre-Olivier Variot.
Selon lui, les solutions pour améliorer la situation des officines existent. Au côté de la FSPF, Pierre-Olivier Variot a notamment demandé à l'assurance-maladie une aide d'un milliard d'euros pour permettre la profession de faire face à l'inflation. « Thomas Fatôme a toussé en entendant ce chiffre, admet Pierre-Olivier Variot. Un milliard d'euros, c'est beaucoup mais avec la substitution par les biosimilaires on pourrait générer 5 milliards d'euros d'économies sur deux ou trois ans. Un texte en ce sens était prévu dans le dernier PLFSS, il a finalement été retiré », regrette amèrement le président de l'USPO. Pour éviter la catastrophe, et donc la naissance de véritables déserts pharmaceutiques sur le territoire, il appelle au contraire à « une réforme économique ambitieuse de l’officine ». Pour cela, « la pharmacie devra être unie et se mobiliser d’une seule voix », évoque Pierre-Olivier Variot, en rappelant que son syndicat et la FSPF avancent main dans la main dans ce combat. « Pour parvenir à une réelle revalorisation de notre métier », l'objectif affiché, les syndicats auront surtout besoin de l'appui et de la mobilisation du terrain.
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