En se prononçant en faveur d’un accès des préparateurs à une formation universitaire, le ministre de la santé, Olivier Véran, a acté le 10 mars* un processus en marche depuis plusieurs années. Face à la nécessité d’adapter le métier de préparateur aux évolutions qu’a connues la pharmacie au cours de ces dix dernières années, le Collège des employeurs (FSPF, USPO, UNPDM) et le Collège des salariés (CFDT, CGT, FO…) ont en effet entamé une révision du contenu du référentiel de la formation. Ce recueil d’activités définissant les neuf grandes fonctions du préparateur a été soumis par la Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation professionnelle de la pharmacie d’officine (CPNEFP) aux doyens des facultés de pharmacie. Parallèlement, les douze universités volontaires vont devoir déposer auprès des ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur un projet d’expérimentation uniformisé.
Grade licence
Cette nouvelle filière devrait donc être inscrite au programme de Parcoursup, ouvrant la voie à une nouvelle génération de préparateurs. Mais dès la rentrée prochaine, il sera possible à une promotion d’apprentis d’expérimenter cette nouvelle formation. « Leur contrat d’apprentissage comportera pour le libellé "diplôme préparé" l’intitulé DEUST (diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques) », indique Philippe Denry, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Il ajoute que ces apprentis détiendront un contrat de travail et seront rémunérés, « nous y sommes très attachés ».
Dans les zones d’expérimentation, les jeunes s’inscrivant auprès d’un CFA (Centre de formation des apprentis) se verront proposer cette filière universitaire, sachant que la majorité des cours de première et deuxième année continuera d’être assurée par le CFA. « En comptant les enseignements universitaires, cela portera le nombre d’heures de cours annuels à 450, contre 400 aujourd’hui, ce qui est tout à fait absorbable dans l’organisation de l’officine », expose Philippe Denry, précisant que la validation du contrôle continu en entreprise sera plus régulière. Une troisième année - potentiellement accessible aux détenteurs d’un BP classique dans le cadre de la VAE (validation des acquis de l’expérience) - sera proposée pour atteindre le grade licence avec deux options de spécialisation, hôpital ou officine. « Tout ce qui va tirer la profession vers le haut est positif et nous saluons cette troisième année », se félicite Pierre-Olivier Variot, vice-président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), insistant sur la dominante « alternance » de cette formation. « Nous tenions beaucoup à un diplôme en trois ans », se réjouit aussi Olivier Clarhaut, secrétaire fédéral de la branche officine de la Fédération nationale FO des métiers de la pharmacie, un syndicat qui a beaucoup œuvré pour cette réforme. Il n’en attire pas moins l’attention sur une modification nécessaire du Code de la santé publique, celui-ci mentionnant que les préparateurs sont détenteurs d’un brevet professionnel.
Quel sera le diplôme décerné in fine aux jeunes qui entreront dans cette nouvelle filière à la rentrée ? Une question parmi les nombreuses autres qui jalonnent la mise en place de l’expérimentation d’ici à la rentrée prochaine. Mais une certitude est partagée, tant du côté employeurs que salariés : grâce à cette voie universitaire, le métier de préparateur va gagner en attractivité auprès des jeunes. Sinon en visibilité, grâce à Parcoursup. Car jusqu’à présent, paradoxalement, les bacheliers élèves des CFA se voient remettre pour diplôme de fin d’études, un BP… de niveau bac !
Autonomie et délégation
Pour autant, cette valorisation ne doit pas se limiter au contenu des cours, ni au titre universitaire. Cette nouvelle formation doit répondre aux évolutions de la pharmacie et aux besoins en personnels qualifiés. Les officines souhaitant s’engager davantage dans les nouvelles missions ont tout à gagner à embaucher ces salariés dont le profil promettra plus d’autonomie. La réalisation des tests antigéniques par les préparateurs n’est que le premier exemple de délégations de tâches qui pourraient être envisagées. Et pourquoi pas demain, d’autres tests de dépistage et la vaccination ? « De nombreux titulaires souhaiteraient investir davantage dans les nouvelles missions, mais ils ne peuvent le faire, faute de moyens humains », constate Philippe Denry. Selon lui, ces nouvelles délégations sont une condition requise pour créer un nouveau diplôme. En effet, rappelle-t-il, le ministère ne donnera pas son aval si cette réforme ne débouche pas sur de nouvelles tâches qui justifieront une meilleure attractivité du métier.
Une fois les expérimentations « construites », restera alors la question ultime de la revalorisation salariale de ces salariés de niveau BAC + 3. Si Pierre-Olivier Variot estime incontournable, à moyen terme, une remise à plat des salaires d’apprentis et des préparateurs, le sujet n’est pas à l’ordre du jour. Ni pour les représentants des titulaires, ni même pour les syndicats de salariés. « Menons à bien cette nouvelle formation et ce nouveau diplôme. Les négociations salariales viendront après », annonce Olivier Clarhaut. Ce qui ne l’empêche pas d’insister sur une meilleure reconnaissance des préparateurs. Selon nos informations, une commission paritaire nationale de l’emploi (CPNE) devrait se tenir le 16 avril pour aborder l’ensemble des questions relatives à l’expérimentation du nouveau diplôme de préparateur en pharmacie.
* Lors d’une visioconférence organisée par l’Ordre des pharmaciens.
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