Hier, les syndicats ont reçu la lettre de cadrage tant attendue du ministre de la Santé. Et les négociations entre la profession et l’assurance-maladie sur le non moins attendu avenant économique à la convention pharmaceutique commenceront officiellement le mardi 19 décembre à 10 heures.
Enfin ! Si la partie économique de la nouvelle convention pharmaceutique avait été repoussée d’un commun accord au 2e semestre 2023 – de façon à avoir un recul suffisant hors années Covid de la situation du réseau officinal – l’ouverture des négociations avec l’assurance-maladie n’en est pas moins tardive. Dans les starting-blocks depuis la rentrée, les syndicats ont reçu hier la lettre de cadrage du ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, adressée au patron de l’assurance-maladie, Thomas Fatôme. Datée du 12 décembre, elle donne les orientations du gouvernement pour mener à bien les négociations quant au futur avenant économique dont la signature est espérée au premier trimestre 2024. Surtout, elle donne le coup d'envoi des négociations qui débuteront mardi prochain dès 10 heures.
Que contient cette lettre de cadrage de trois pages ? En premier lieu, le souhait du ministre de la Santé d’un futur avenant conventionnel qui « traduise la confiance accordée à la profession des pharmaciens dont le champ des compétences a été régulièrement élargi en matière de prévention, de vaccination, de renouvellement des prescriptions ou de réalisation des tests de diagnostic ». Le premier objectif sera de fixer « une rémunération adaptée » à la dispensation d’antibiotiques après un test de dépistage. Aurélien Rousseau ouvre d’ailleurs la voie à un élargissement à venir en précisant qu’il s’agit actuellement des TROD angine et bandelettes urinaires. « Cette évolution du rôle du pharmacien est historique et doit par ailleurs permettre de participer à la dynamique de [sa] rémunération. »
En matière de prévention, le ministre demande la mise en place de nouveaux accompagnements, en particulier dans le sevrage tabagique. Il souhaite aussi « relancer » les accompagnements existants pour les patients chroniques et les femmes enceintes, créer un nouvel entretien pharmaceutique pour les patients sous opioïdes, ainsi que faire participer les pharmaciens à « la réduction de la polymédication, notamment auprès des personnes âgées ».
Tout un paragraphe est consacré à « la pertinence de la délivrance » et à la lutte « contre les pénuries de médicaments », revenant sur les « nouveaux leviers d’épargne » souhaités par le gouvernement. Il insiste sur la mesure pourtant rejetée par la profession de la délivrance à l’unité (DAU) de médicaments et dispositifs médicaux, et remet à l’ordre du jour la dispensation adaptée (DAD). Charge à l’assurance-maladie de définir, avec les syndicats, « les modalités d’appropriation et de mise en œuvre » de la DAU et « les leviers d’incitation à la délivrance d’un nombre limité de boîtes en une seule dispensation ». Ces pratiques « respectueuses de l’environnement » joueront aussi un rôle dans la lutte contre l’antibiorésistance, enjeu qui devra pousser l’assurance-maladie à « adapter les dispositifs » déjà en place.
Toujours dans le registre de la pertinence des dispensations, le ministre appelle à « poursuivre l’objectif de désensibilisation de la rémunération des pharmaciens aux prix des médicaments », et cela en « valorisant les honoraires de dispensation » et en renforçant « l’acte de dispensation » et le « rôle de conseil ». Une désensibilisation « d’autant plus nécessaire du fait de la dynamique des médicaments onéreux en ville », souligne Aurélien Rousseau. Le ministre souhaite d’ailleurs renforcer le contrôle des ordonnances de médicaments chers et développer des actions pour lutter contre les fausses ordonnances et les trafics de médicaments. Il appelle, en outre, à « améliorer le taux de pénétration des biosimilaires », sans plus de précision.
La lettre se termine par deux sujets essentiels. Le premier touche à des signes de fragilité du maillage territorial des officines, maillage considéré comme « un pilier de l’offre de soins sur nos territoires ». Le ministre demande à l’assurance-maladie « une analyse des dynamiques à l’œuvre », un travail qui pourra « enrichir l’Observatoire de l’économie officinale ». L’occasion pour Aurélien Rousseau de revenir sur son idée d’un « dispositif partagé entre les agences régionales de santé et les caisses primaires d’assurance-maladie visant à définir les besoins des officines identifiées en difficulté dans les territoires fragiles ». Enfin, le ministre ne cache pas son inquiétude face à une tendance à la financiarisation du secteur. Il y sera « particulièrement attentif » afin de « préserver les principes d’autonomie et d’indépendance » de la pharmacie d’officine.
A la Une
Gel des prix sur le paracétamol pendant 2 ans : pourquoi, pour qui ?
Salon des maires
Trois axes d’action pour lutter contre les violences à l’officine
Portrait
Jérémie Kneubuhl : le pharmacien aux 50 millions de clics
Médication familiale
Baisses des prescriptions : le conseil du pharmacien prend le relais