QUAND IL ARRIVE au quatrième étage du bâtiment d’enseignement, le pharmacien Jean François Houyvet, titulaire d’une officine à Notre-Dame de Bondeville dans la métropole rouennaise, change de faluche. À la faculté de médecine et de pharmacie de Rouen il est, depuis deux ans, professeur associé de pharmacie en compagnie d’un enseignant en communication et d’une pharmacienne. Pour Jean-François Houyvet, les travaux en commun entre futurs médecins et pharmaciens ne peuvent que se développer en suivant les évolutions permanentes des professions de santé.
Le nouvel équipement permet à des équipes mixtes d’étudiants en pharmacie ou en médecine de réaliser des travaux pratiques concrets. Ces études de cas réelles sont définies par des enseignants qui peuvent les suivre et les corriger éventuellement en direct sur des écrans.
Inéluctable complémentarité.
Le professeur de pharmacie considère que le rapprochement entre médecins et pharmaciens est inéluctable. La nouvelle convention établit en effet les principes de travaux en commun entre pharmaciens et médecins. Désormais ils doivent apprendre à travailler ensemble en développant des actions complémentaires sans jamais s’opposer ni se concurrencer. À Rouen, des étudiants travaillent en groupes pluridisciplinaires dans des domaines concrets à partir de l’officine créée dans la fac. Jean-François Houyvet raconte : « L’un des groupes a ainsi mis au point, réalisé et conduit un programme de relevés d’interventions pharmaceutiques pour hypoglycémiants à prendre impérativement le matin. Les médecins ont posé les diagnostiques et établi les ordonnances. Mais les pharmaciens d’officines ont remarqué une erreur du patient interprétant deux prises par jour comme une le matin et une le soir, alors que les conférences de consensus préconisent deux le matin. Ces interventions pharmaceutiques sont relevées dans une enquête. »
À partir de ces constats, des opérations de communications auprès des malades ont été définies pour les cabinets médicaux et les pharmacies. Dans le cas de maladies au long cours, les médecins établissent les diagnostics et prescrivent des traitements aux conditions de prises impératives. Dans ce cadre, les étudiants en pharmacie stagiaires ont révélé des problèmes par leurs observations statistiques. Ils ont pu ensuite mettre au point avec les « médecins » une démarche et des actions pour éviter que les difficultés ne perdurent. À Rouen médecins et pharmaciens ont l’habitude de partager le même campus et quelques enseignants, convaincus que tout le monde peut vivre ensemble. Cette cohabitation est tellement ancrée dans les mœurs universitaires normandes qu’elle offre parfois des surprises…
Une thèse sur l’accompagnement pharmaceutique.
Le 19 mai dernier, Audrey Granval-Assani a défendu à la faculté de Rouen une thèse de doctorat sur l’accompagnement pharmaceutique du patient sous antivitamine K dans le département de l’Eure.
Les antivitamines K concernent en France près d’un million de patients et sont à l’origine de 31 % des accidents d’origine iatrogènes. En haute Normandie on compte 735 hospitalisations et 120 décès par an.
La médecin thésarde a voulu observer la réalité de la mise en œuvre du dispositif d’accompagnement pharmaceutique dans le département de l’Eure en mettant en ligne deux questionnaires. L’un pour les médecins généralistes, l’autre pour les pharmaciens.
En conclusion, les trois quarts des 27 pharmaciens ayant répondu au questionnaire se sont déclarés favorables au dispositif et en on fait bénéficier 33 % de leur patientèle. En revanche seulement 1 pharmacien sur 5 a déclaré adresser au médecin traitant un compte rendu systématique des entretiens. Quarante-quatre médecins ont participé. Seulement 5 connaissaient les modalités exactes d’application d’un dispositif auquel la moitié d’entre eux s’est déclarée défavorable…
Le président du Jury et le directeur de thèse avaient impérativement demandé qu’un pharmacien d’officine soit membre du jury. François Houyvet s’y est naturellement retrouvé. Il a chaudement félicité la nouvelle docteur en médecine, exprimant sa satisfaction de voir ainsi se développer d’indispensables complémentarités naturelles entre deux filières.
© Crédit Photo : c.sokolski Jean François Houyvet dans l’officine école.
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