« La décision de l’accès universel au traitement des personnes infectées marque l’histoire de l’endémie de l’infection par le VHC en France », souligne le Pr Daniel Dhumeaux, coordinateur du rapport (voir ci-dessous) commandé par Marisol Touraine après son annonce du 25 mai. Un tel engagement de santé publique ne pouvait se concevoir sans changements majeurs, dans les modalités de traitement par les antiviraux à action directe (AAD).
Le « rapport Dhumeaux 2016 », porté cette année par l’ANRS (Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales) et le CNS (Conseil national du sida et des hépatites virales), avec le concours de l’AFEF (Association française pour l’étude du foie), propose des recommandations très pratiques, à la fois d’ordre général, dans 4 groupes à risque (usagers de drogues, détenus, migrants et étrangers, sujets co-infectés VIH-VHC) et pour la recherche.
Avec 75 000 personnes infectées identifiées, l’organisation générale des soins proposée dans le rapport prévoit un délai de prise en charge des patients par un spécialiste très bref, moins de 15 jours. Seuls les patients « jugés complexes » seront orientés vers les réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP).
Le suivi vigilant du médecin traitant
La place accordée au médecin traitant est qualifiée de « centrale ». « L’initiation du traitement relève du spécialiste, décrit le Pr Dhumeaux. Mais le médecin traitant a un rôle important non seulement dans le dépistage mais aussi dans le suivi des patients au cours du traitement et une fois guéris. On observe déjà des cas de relâchement de comportement, concernant l’alcool, le poids, le régime alimentaire. Il ne s’agit pas de remplacer l’hépatite C par une atteinte hépatique alcoolique ou liée à un syndrome métabolique ou à un diabète ».
La vigilance vis-à-vis des personnes guéries doit redoubler auprès des populations plus exposées au risque de réinfections, les usagers de drogues et les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH). « Le médecin prenant en charge le patient devra communiquer sur les méthodes de réduction des risques, détaille le Pr Dhumeaux. Chez les HSH, il existe une transmission sexuelle du VHC car les rapports sexuels sont fréquents et très traumatisants ».
Le rapport n’oublie pas les 75 000 sujets ignorant qu’ils sont infectés. Le rapport recommande « d’amplifier l’activité de dépistage orientée vers les personnes ayant des marqueurs ou des facteurs de risque » mais aussi, et c’est très nouveau, d’aller dès 2017 vers « une offre de dépistage ponctuel, mais universel, de la population adulte, au moins une fois dans la vie » au mieux pour les 3 virus VHC, VHB et VIH.
Un intérêt individuel et collectif à traiter
L’accent est mis aussi sur le dépistage dans les populations vulnérables, de façon régulière pour les usagers de drogues, mais aussi de façon systématique pour les sujets détenus lors de la consultation médicale d’entrée en milieu carcéral. Des quatre populations cibles définies, c’est sans doute la prise en charge des personnes migrantes et étrangères, qui est la plus complexe. La généralisation du traitement du VHC « creuse un peu plus l’écart entre ce groupe et l’ensemble de la population résidant en France pour ce qui est de l’état de santé et du recours aux soins », est-il mentionné.
Pour le Pr Dhumeaux, les choses sont claires : « Le traitement a un intérêt individuel. Un accès universel sous-entend qu’un traitement puisse être proposé à toute personne infectée. Mais au-delà de l’intérêt individuel, le traitement a un intérêt collectif. On a 10 ans pour stopper l’endémie en France ».
Le dernier volet concernant la recherche n’est pas la cerise sur gâteau. « C’est indispensable que tout soit évalué, insiste le Pr Dhumeaux. Qu’il s’agisse du nombre de sujets traités, des réinfections, d’éventuels effets indésirables encore non identifiés, du risque de résistance, à partir des cohortes actuelles mais aussi de nouvelles cohortes ». Parallèlement à l’évaluation suivie des AAD, le rapport rappelle l’importance de « soutenir et développer la mise au point d’un vaccin contre le VHC ».
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