La vaccination par les pharmaciens, devenue possible depuis le 6 octobre dans deux régions françaises, est davantage qu’un simple geste. Un grand pas a été franchi ce jour-là dans les officines. « Cette nouvelle situation n’est en aucun cas comparable avec la position derrière le comptoir. Nous nous retrouvons seul dans un local fermé avec nos patients qui s’épanchent alors sur leur santé, mais aussi sur leur vie personnelle », remarque Vincent Riera, titulaire à Gardonne (Dordogne).
À la mi-novembre, le pharmacien et son associé, qui ont vacciné quelque 60 patients sur les 420 venus retirer, à ce jour, leur vaccin, apprécient ce changement de paradigme. « La vaccination est l’opportunité d’ouvrir le dialogue sur leur santé, d’aborder des pathologies annexes, en clair cela nous permet à nous, pharmaciens, de nous positionner face au patient en tant que professionnel de santé, orienté vers les nouvelles missions, particulièrement dans la prévention », précise-t-il, se félicitant du retour positif de patients « très avenants ».
Le pharmacien, adhérent Alphega, peut se consacrer à cette nouvelle mission en déléguant des tâches à son équipe de manière très spontanée. « Les patients ne sont pas obligés de prendre rendez-vous ; ils se laissent parfois convaincre et se font même vacciner en couple ! », constate, amusé, le titulaire.
Preuve de la spontanéité du geste, ces actifs disposant de peu de temps qui se laissent convaincre de se faire vacciner à la pharmacie. Vincent Riera qui partage cette expérience positive avec la majorité des 193 pharmaciens Alphega pratiquant la vaccination à l’officine, a pu s’appuyer sur le réseau d'Alliance Healthcare.
Troisième pilier de la couverture vaccinale
Vincent Riera a ainsi, à l’instar de 433 autres pharmaciens, bénéficié de la formation d’Alliance Healthcare Formation, reconnue DPC, en Nouvelle-Aquitaine et en Auvergne Rhône-Alpes. Sa démarche a été également confortée par l’expérience de ses confrères des réseaux Alliance Healthcare à l’étranger, soit rien que pour les USA 25 000 pharmaciens Walgreens, et pour le Royaume-Uni 6 000 pharmaciens Boots (1). « Dans ces pays tout comme en Irlande ou encore au Portugal, partout où la vaccination à l’officine a été mise en place, l’opération a été couronnée de succès. Il n’y a aucun pays où l’on compte un échec », déclare avec enthousiasme Guillaume Nebout, directeur international du développement des services professionnels chez Walgreeens Boots Alliance. Certes, il n’est pas possible de chiffrer la contribution du pharmacien dans la couverture vaccinale de ces pays, mais pour Guillaume Nebout, il ne fait pas de doute que la puissance du réseau officinal contribue à la vaccination de 90 % des patients concernés, avant le pic épidémique.
Un chiffre qui fait encore rêver en France où, comme le rappelle le Dr Anne Mosnier, médecin généraliste et épidémiologiste (2), 49,8 % des personnes de plus de 65 ans sont vaccinées contre la grippe. « Sur les 12 millions de bons qui sont distribués, la moitié seulement est utilisée. Reste donc à couvrir les six millions restant », note-t-elle. Cet enjeu, à lui seul, devrait faire étouffer la concurrence qui oppose les infirmiers et certains médecins aux pharmaciens. Car, ironise le Dr Mosnier, « même en admettant quelques reports de patients vers les pharmaciens, on est encore loin du compte ! ».
Au contraire, le médecin en est convaincu, les pharmaciens doivent être identifiés aujourd’hui comme le troisième pilier contribuant à une meilleure couverture vaccinale. Nul doute qu'ils agissent, de par leur proximité et leur disponibilité, en complémentarité des autres professionnels de santé. Guillaume Nebout observe ainsi que dans les autres pays, « un tiers des personnes viennent se faire vacciner après 18 heures, pendant le week-end ou les vacances ». Il se veut du reste rassurant. Dans l’ensemble des pays où la vaccination par les pharmaciens a suscité une levée de boucliers des infirmiers, la contestation s’est étiolée avec le temps : « Ce service finit par être accepté en corrélation avec sa maturité. »
Pour l’heure, le pharmacien de Gardonne a adopté un statu quo. Il ne se substitue jamais au médecin traitant ni à l’infirmière à domicile. Du reste, chacune de ces professions devrait bientôt remplir son agenda. Le pharmacien attend, en ce qui le concerne, un pic d’ici au 10 décembre : « Le mouvement s’est accéléré au cours des derniers jours et il devrait aller crescendo jusqu’au 10 décembre environ. Après, à l’approche de Noël, il sera plus difficile d’aborder la question avec les patients, ils auront la tête ailleurs… »
D’après une conférence de presse d'Alliance Healthcare.
(1) À rappeler que la vaccination à l'officine est possible en Europe, au Portugal, au Danemark, en République d'Irlande, au Royaume-Uni, en Suisse dans certains cantons, et en France dans deux régions expérimentales (Nouvelle-Aquitaine et Auvergne-Rhône-Alpes). Dans le reste du monde, elle est pratiquée en Nouvelle-Zélande, en Australie, au Canada et aux États-Unis (source : Alliance Healthcare).
(2) Membre des réseaux d’observation des maladies et des épidémies (Open Rome).
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