C’est un rapport au vitriol contre l’officine que vient de commettre la Cour des comptes. Si elles étaient appliquées, les propositions des sages de la rue Cambon feraient purement et simplement voler en éclat le modèle officinal français.
Certes, ce n’est pas le premier rapport de la sorte, mais pour la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. « Après une négociation conventionnelle qui n’a pas tenu ses promesses, une approche purement bureaucratique du mésusage de la codéine, en plein rétropédalage sur le Lévothyrox, c’est désormais le rapport de la Cour des comptes qui donne le coup de grâce », estime ainsi le syndicat.
Dans ce document rendu public le 20 septembre, les auteurs proposent carrément de fermer une pharmacie sur deux, soit 10 435 officines sur les 21 400 que compte la France métropolitaine. Ils préconisent également la suppression du monopole officinal sur l’OTC, la remise en cause de l’économie du générique et l’application stricte de l’interdiction de la rétrocession de médicaments entre officines, relève la FSPF. Aussi, son président, Philippe Gaertner, demande au président de la République et à la ministre de la Santé « de prendre une position forte face à cette remise en cause aussi violente qu’injuste de la pharmacie française ».
Un programme de destruction massive
Pour lui, il s’agit ni plus ni moins qu’un programme « de destruction massive des officines » qui « signerait l’arrêt de mort des pharmaciens de proximité dont les Français apprécient la compétence et la disponibilité ». « Alors que depuis des années, sans résultat probant, l’État affiche son intention de résorber les déserts médicaux, la Cour des comptes ne propose rien de moins que de créer des déserts pharmaceutiques », s’insurge la FSPF. Le syndicat l’affirme, « ces recommandations sont totalement déconnectées des besoins de la population et s’appuient sur des partis pris "d'experts" peu au fait des spécificités territoriales françaises. »
L’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) est également vent debout contre ce rapport qu’elle juge « excessif et obsolète ». « Il fera partie des rapports médiocres publiés parfois par cette institution », estime son président, Gilles Bonnefond. Il déplore que ses auteurs évoquent le coût de la substitution générique par les pharmacies sans jamais citer les économies engendrées. Certains points lui semblent également entrer en contradiction : « Dire dans le même rapport que l’on est favorable à la rémunération à l’acte de dispensation tout en jugeant anormal d’avoir accordé 280 millions d’euros à la profession, justement pour faire cette réforme, est complètement paradoxal. » En ce qui concerne les propositions de vente de médicaments en grande surface et d’ouverture du capital, Gilles Bonnefond se demande pourquoi elles figurent dans ce texte, d’autant qu’elles sont sans effet sur les comptes de la Sécurité sociale. Enfin, le président de l’USPO rappelle que l’augmentation des quotas de la loi de répartition, critiquée par les magistrats, a été décidée pour permettre à la profession de se réorganiser en protégeant les regroupements et non pour encourager le surnombre de pharmacies.
Un rapport orienté
« Tout cela est orienté, estime Gilles Bonnefond. On instrumentalise ce rapport pour faire un coup d’ultralibéralisme dans la pharmacie. Ce n’est pas digne de la Cour des comptes. » Le président de l’USPO assure qu’il s’attendait à un rapport sévère contre l’officine à la veille de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2018, « pour justifier de mesures drastiques ». Aussi, fallait-il « sceller rapidement les moyens de la réforme de la profession avec l’assurance-maladie ». « Comme on savait que ce coup allait être monté, il me paraissait important de mettre la profession en sécurité en signant un avenant conventionnel étendu sur trois ans, plutôt que de faire croire que l’on pourrait obtenir mieux au mois de décembre », précise le président de l’USPO, qui relativise toutefois. « Ce n’est qu’un rapport qui ne correspond pas à la position du gouvernement », affirme-t-il. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, lui aurait indiqué que de telles mesures ne figuraient pas dans sa feuille de route.
Dispensation du médicament
Tramadol et codéine sur ordonnance sécurisée : mesure reportée !
Formation continue
Transmission automatique des actions de DPC : les démarches à faire avant le 30 novembre
Relocalisation industrielle
Gel des prix sur le paracétamol pendant 2 ans : pourquoi, pour qui ?
Salon des maires
Trois axes d’action pour lutter contre les violences à l’officine