Fin mars, le Lévothyrox (lévothyroxine) faisait peau neuve. À la demande de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), le Laboratoire Merck KGaA a révisé la composition de son traitement afin de le rendre plus stable. Le lactose a été remplacé par le mannitol et de l’acide citrique anhydre a été ajouté. Deux excipients classiques présents dans un grand nombre de médicaments, l’un qui améliore la stabilité de la substance active sur la durée, l’autre sa conservation. Les études menées par le laboratoire prouvent la bioéquivalence de la nouvelle composition. L’ANSM a communiqué par courrier sur ce changement de formulation, en février dernier, auprès de 100 000 professionnels de santé, et a mis en ligne un point d’information le 2 mars suivant.
Mais alors, comment expliquer la recrudescence de déclarations d’effets indésirables depuis la commercialisation du Lévothyrox nouvelle formule ? L’ANSM note une explosion des signalements à partir du 16 août, date de publication d’un article dans « Le Parisien », avec un pic atteint autour du 23 août, et une décroissance depuis le 27 août. Fin août, l’agence comptabilisait 5 000 signalements. En réponse, outre le lancement d’une enquête de pharmacovigilance dont les résultats sont attendus en octobre, elle a mis à jour un « questions-réponses » sur le sujet et un numéro vert, 0 800 97 16 53. Mais le sujet a pris de l’ampleur par le biais des médias et des réseaux sociaux, boostant par la même occasion une pétition lancée par une patiente, Sylvie, en juin dernier, qui demande au fabricant de revenir à la précédente formule du Lévothyrox ou de commercialiser les deux versions. Une requête rejetée par les autorités sanitaires puisque « l’ancienne formule était de qualité inférieure » et la « teneur en principe actif pouvait varier au cours du temps ». Elle précise qu'« un réajustement posologique est parfois nécessaire avec la nouvelle formule mais l’équilibre une fois atteint sera maintenu ». Elle ajoute que « la coexistence des deux formules sur le marché serait source de perturbation supplémentaire du bilan thyroïdien en cas de mélange de boîtes ou de stocks différents en fonction des pharmacies ».
Effets secondaires
Si la majorité des patients n’a pas noté de changement, la voix de ceux qui rapportent des effets secondaires doit être entendue. Le Lévothyrox est un médicament à marge thérapeutique étroite. Un léger déséquilibre des hormones thyroïdiennes est susceptible de provoquer une gêne importante, qui disparaît dès lors que le patient est bien équilibré. C’est pourquoi l’ANSM recommande aux patients présentant « des symptômes traduisant un déséquilibre thyroïdien » de contacter leur médecin pour contrôler leur TSH (Thyroid stimulating hormone). Et non de tenter d’obtenir un Lévothyrox ancienne formule dans un autre pays ou de demander le remplacement de leurs comprimés par une version buvable en gouttes (L-Thyroxine SERB), réservée aux enfants de moins de 8 ans et aux sujets présentant des troubles de la déglutition.
Le recours à la forme buvable est pourtant en augmentation. « Si on continue comme ça, on met en jeu la santé des enfants qui ne peuvent prendre que ce médicament en gouttes », alerte Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens (CNOP). À noter que la nouvelle formulation de Lévothyrox concernera bientôt les autres pays européens, tout aussi soucieux d’offrir une version plus stable du médicament aux patients.
Quoi qu'il en soit, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, interrogée le 31 août dernier sur CNews, se veut rassurante : la nouvelle formule est « sans danger » même si des effets secondaires « étaient attendus » chez certains patients, le médicament est « plus stable et plus fiable que le précédent, c’est donc une amélioration ».
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