Aujourd’hui, les honoraires représentent 53 % de la rémunération des pharmaciens. Sur un total de 6,5 milliards d’euros, le montant des honoraires de dispensation à la boîte et d'ordonnances de 5 lignes et plus (dit « honoraire complexe ») s’élève à environ 3,5 milliards d’euros. Ces honoraires permettent à l’officine « de bénéficier de 120 millions d’euros supplémentaires par an, soit 5 500 euros annuels par officine », rappelle Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Les rémunérations sur objectifs de santé publique (ROSP) ramènent, pour leur part, quelque 140 millions d’euros au réseau.
La nouvelle convention devrait encore augmenter la proportion d’honoraires dans la rémunération. Plusieurs pistes sont à l’étude : évolution de l’honoraire pour les ordonnances complexes pour arriver à un honoraire de base couplé à des majorations ; instauration d’honoraires rémunérant le statut de pharmacien correspondant, les interventions pharmaceutiques, ou l’instauration de la préparation de doses à administrer (PDA) chez certains patients définis (voir également ci-dessous). Ces honoraires viendraient s’ajouter à l’honoraire à la boîte actuellement en place. D’autres idées pourraient encore émerger de la Grande consultation lancée cet été par la FSPF et l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) auprès des confrères (voir notre article en page 4).
Mais quelle part les honoraires pourraient-ils représenter à l’issue des négociations avec l’assurance-maladie ? Personne ne veut se prononcer pour le moment. Une chose est sûre, la proportion des honoraires n’atteindra jamais 100 %. « Il restera toujours une partie de la rémunération liée à la marge commerciale, car notre métier possède deux facettes : celle de professionnel de santé et celle de chef d’entreprise de type commercial, explique Philippe Gaertner. Il n’y aurait aucun sens à abandonner totalement ce principe, car une partie des coûts de distribution sont liés au stockage, à l’achat et à la revente de médicaments. »
Moins dépendre du prix
Quoi qu’il en soit, pour Nicolas Revel, directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM), l’un des enjeux des négociations à venir sera de davantage « désensibiliser l’économie officinale des effets secondaires des baisses de prix ». D’autant que, selon lui, ces baisses ont vocation à perdurer. Lors du dernier Congrès national des pharmaciens, à Nantes, la ministre de la Santé a enfoncé le clou. Dans un message lu par Katia Julienne, adjointe au directeur général de l'offre de soins (DGOS), Marisol Touraine a en effet déclaré que la rémunération des pharmaciens devait moins dépendre du prix du médicament (« le Quotidien » du 27 octobre).
Une volonté politique destinée à compenser les plans d'économies annoncés. Rien que dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2017 actuellement en discussion, les baisses de prix sur le médicament prévues visent les 500 millions d’euros d'économies.
Contrer la hausse naturelle des dépenses
Certes, le déficit de la branche maladie se réduit, mais l’augmentation des pathologies chroniques et le vieillissement de la population conduisent irrémédiablement à une hausse des dépenses de santé. « Si on ne faisait rien, ces dépenses augmenteraient de 4 % chaque année, soit 8 milliards d’euros », souligne le directeur général de l’UNCAM. « Il faut donc trouver tous les ans des économies pour la moitié de la progression de la dépense naturelle », ajoute-t-il. Et les pouvoirs publics agissent essentiellement sur les prix et les volumes.
On contient la hausse des dépenses à 2 %, mais pour les pharmaciens, cela se traduit par une baisse de la rémunération, déplore Philippe Besset, vice-président de la FSPF. Les revenus de l’officine ont diminué de 2 % en 2015 et la tendance est la même pour 2016, s’inquiète de son côté Gilles Bonnefond, président de l’USPO, à l’occasion des 9es Rencontres organisées par son syndicat le 20 octobre, à Paris. « La situation économique est dramatique », lance-t-il, tout en rappelant que le nombre de fermetures d’officines augmente.
Avec la mise en place des honoraires à la boîte et pour les ordonnances complexes, « nous avons commencé à réfléchir à l’évolution de votre rémunération, rappelle Nicolas Revel. Cette réforme était nécessaire et a eu un impact positif sur 2015 et 2016. C’était une première étape ». La nouvelle convention, dont les négociations s’ouvriront au début de l’année prochaine, permettra donc de franchir un nouveau palier.
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