Fin décembre, les sociétés pédiatriques ont approuvé la vaccination contre le Covid-19 chez les 5-11 ans et validé les avis de la Haute Autorité de santé (HAS) et du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale (COSV). Elles préconisent de commencer la vaccination des enfants à risque de Covid grave ou vivant dans l’entourage d’une personne immunodéprimée. Elles sont ouvertes à la vaccination des enfants sans comorbidité dès lors que celle-ci ne freine pas le rappel vaccinal des adultes qui doit rester la priorité. Les sociétés savantes recommandent aussi d’accompagner systématiquement la vaccination des enfants « d’une incitation forte à la vaccination des adultes de leur entourage proche ». Surtout, elles affirment que le premier objectif de la vaccination des 5-11 ans est de leur « apporter un bénéfice direct » par la protection individuelle contre le Covid grave, « notamment les syndromes inflammatoires multisystémiques pédiatriques (PIMS) ».
Dont acte. La France a ouvert la vaccination des 5-11 ans à risque de Covid grave ou vivant dans l’entourage d’une personne immunodéprimée le 15 décembre, puis à toute la tranche d’âge le 22 décembre. Mais sur le terrain, deux freins entravent cette nouvelle phase de la campagne : la difficulté à trouver un rendez-vous pour faire un vaccin pédiatrique dans certaines zones géographiques et la réticence des parents à vacciner leurs enfants contre le Covid. Un autre frein imposé par le Conseil d'État le 6 janvier, à savoir l'obligation de l'accord des deux parents pour vacciner les enfants de 5 à 11 ans, vient d'être levé par le biais de la loi instituant le passe vaccinal. Depuis le 25 janvier, l'accord d'un seul des deux parents est donc exigé, tout comme pour les 11-15 ans.
Le gouvernement a bien augmenté le nombre de centres de vaccination proposant des doses pédiatriques, passé d’une petite centaine à la mi-décembre à 635 au 24 janvier. N'empêche. Au 22 janvier, seulement 216 000 enfants avaient reçu une dose vaccinale, soit 3,8 % de cette population. Même si le ministère de la Santé note une nette augmentation, la campagne vaccinale des enfants « démarre doucement » et il convient de l’accélérer. C’est le sens de la décision annoncée le 20 janvier par le Premier ministre Jean Castex : autoriser les pharmaciens, infirmiers et sages-femmes à prescrire et administrer les vaccins pédiatriques contre le Covid.
L’annonce a pris de court les représentants de la profession. « Nous n’avons pas été concertés sur le sujet mais depuis le début nous affirmons que les pharmaciens sont disponibles pour réaliser toute vaccination », souligne Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Même positionnement du côté de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) dont le porte-parole, Gilles Bonnefond, y voit une avancée qui va « dans le sens de ce que nous demandons depuis 5 ans : l’élargissement de la vaccination à l’officine ». Le président, Pierre-Olivier Variot, estime aussi que cette décision va dans le bon sens. Pour améliorer la couverture vaccinale, il faut « amener la vaccination au plus proche de la population, c’est ce que fait la pharmacie ».
Réflexe pharmacien
L’autorisation de vacciner les 5-11 ans contre le Covid en pharmacie est aussi de bon augure alors que la profession attend, d’ici à quelques semaines, un avis de la Haute Autorité de santé (HAS) sur l’élargissement de la vaccination à l’officine. « Aujourd’hui seulement 3,8 % des enfants ont reçu une dose vaccinale, souligne Gilles Bonnefond. Cela montre que lorsqu’on limite les effecteurs aux seuls médecins, ça ne fonctionne pas. Désormais 60 % de la vaccination contre le Covid en ville se fait en pharmacie. De même, les pharmaciens ont injecté 4,4 millions de vaccins contre la grippe, soit 40 % des injections contre 32 % l’an dernier. Le réflexe pharmacien pour se faire vacciner est acquis. » Autant dire que l’avis de la HAS est fortement attendu par les syndicats, qui se disent très optimistes. Gilles Bonnefond défend l’idée de vacciner contre le HPV en pharmacie pour faire remonter une couverture vaccinale en France particulièrement basse. « Après nous avoir autorisés à vacciner contre le Covid dès 5 ans, il sera difficile de nous dire que nous ne pouvons pas vacciner dès 11 ans contre le papillomavirus humain dont l’enjeu est majeur. »
Quant à savoir combien de pharmaciens et de préparateurs s’engageront dans la vaccination pédiatrique contre le Covid-19, il est encore un peu tôt pour avancer des chiffres. « Je ne peux donner l’exemple que de ma propre pharmacie où nous sommes trois pharmaciens et quatre préparateurs, tous vaccinateurs. Nous sommes, à date, 3 sur 7 prêts à vacciner les 5-11 ans », remarque Philippe Besset. À l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO), « les adhérents sont prêts à y aller », indique le président, Laurent Filoche, qui considère lui aussi que c’est une belle avancée pour la vaccination à l’officine en général. « Je ne sais pas si nous ferons beaucoup de vaccins pédiatriques contre le Covid, il y a quand même un manque d’adhésion des parents pour le moment. Mais faciliter l’accès à la vaccination est toujours une très bonne chose. La pharmacie doit devenir le premier centre de vaccination de la population. »
Dans une enquête en ligne sur le site du « Quotidien », les premières tendances semblent indiquer un faible niveau d'adhésion des officinaux à la vaccination pédiatrique. À la question « Allez-vous vacciner les enfants de 5-11 ans dans votre officine ? », 80 % des réponses sont négatives.
Prioriser la vaccination des adultes
Concrètement, la vaccination des enfants à l’officine pourra débuter entre le 4 et le 8 février, période à laquelle doivent être livrées les premières doses de Pfizer pédiatrique ouvertes à la commande pour les nouveaux effecteurs lundi et mardi derniers. Dans la limite de 8 flacons pour les pharmaciens et de 3 flacons pour les autres vaccinateurs autorisés. « Nous ne sommes pas dans l’urgence, assure Gilles Bonnefond. Beaucoup d’enfants ont attrapé le Covid ces dernières semaines. Or, pour tous les positifs, il faut attendre deux mois avant de les vacciner. Je pense donc qu’une bonne partie de cette vaccination va s’effectuer après les vacances de février. Cela va nous laisser le temps de nous approvisionner, de nous familiariser avec la dilution et de nous organiser pour vacciner par groupe de 10, chaque flacon contenant 10 doses, en travaillant avec les médecins et les infirmiers. » Et de continuer à prioriser la vaccination des adultes, alors que le passe vaccinal est désormais en place. Sans oublier la forte implication des confrères dans le dépistage.
C’est d’ailleurs sur l’organisation que Pierre-Olivier Variot appelle les confrères à porter leur attention. « Certes les flacons ont des opercules de différentes couleurs pour bien différencier le vaccin enfant du vaccin adulte, mais une fois reconstitué et préparé, la distinction d’un vaccin à l’autre est plus difficile. Je recommande à chacun de s’organiser pour éviter toute erreur, par exemple en instituant des demi-journées consacrées uniquement à la vaccination pédiatrique, de préférence les mercredis et samedis quand les enfants sont disponibles, et d’autres uniquement à la vaccination des adolescents et des adultes. » Il rappelle également la forte recommandation de réaliser un TROD sérologique avant vaccination (sauf si infection préalable connue) pour déterminer le schéma initial à une ou deux doses. Même si la rémunération de ce TROD – 2 euros la réalisation et 5,52 euros le test – aurait bien besoin d’une revalorisation, relève Pierre-Olivier Variot.
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