DEPUIS plusieurs mois, divers procès émaillent la chronique judiciaire relative à la vente illégale d’un médicament vétérinaire, le Ventipulmin. Ce médicament, à base de Clenbuterol, est un bronchodilatateur destiné à soigner les problèmes respiratoires des chevaux. Mais il a également la propriété de faire maigrir et d’affermir les masses musculaires chez l’homme, ce qui conduit certains à se procurer ce médicament de manière illégale, pour aider les culturistes à prendre de la masse musculaire ou les jeunes filles à maigrir. L’une des dernières affaires de ce type impliquant une pharmacie s’est déroulée à l’automne dernier devant le tribunal correctionnel de Vannes. Une ex-pharmacienne de 62 ans a ainsi été condamnée à 3 000 euros d’amende, dont 1 500 avec sursis, pour délivrance de médicament vétérinaire sans ordonnance. Mais le caractère frauduleux de la vente n’a pu être prouvé.
Un marchand de vêtements à Rennes.
Comment cette ex-pharmacienne s’est-elle retrouvée, comme d’autres, devant la justice ? Tout commence en 2008 quand l’un des responsables du Service national de douane judiciaire (SNDJ), à la suite d’une enquête du Groupe d’intervention régional (GIR) de Rennes, demande des informations sur cette spécialité vétérinaire retrouvée chez un marchand de vêtements dans le centre-ville de Rennes. Il fait cette requête auprès de la Brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP), un organisme rattaché au ministère de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. « À la suite de l’enquête du GIR, qui a découvert, fin 2008, la vente de 59 boîtes de granulés de Ventipulmin par un vétérinaire canin à un culturiste sur une période de 10 ans, nous avons décidé de réaliser une descente de filière », explique Catherine Collinet, inspectrice en chef de la santé publique vétérinaire. La brigade s’est informée auprès du laboratoire et des répartiteurs sur les quantités du médicament en question vendues aux pharmaciens. Soulignons que l’enquête a également concerné les vétérinaires. Les officines choisies ont été celles qui réalisent des ventes importantes, ou même en quantités limitées dans des zones dépourvues de chevaux, Paris intra-muros, par exemple, ainsi que celles ayant une forte activité vétérinaire. Ont été vérifiés les stocks, l’ordonnancier, ainsi que les mouvements constatés sur l’informatique de l’officine relatifs aux produits recherchés.
Un an d’enquête.
Cette enquête a duré un an environ auprès de 88 officines et a abouti à 71 procès-verbaux. Des procès ont suivi, dont certains ont conduit des syndicats, notamment le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), à se porter partie civile. « La transgression d’un très petit nombre, ajoutée à l’ignorance, risque de porter préjudice aux patients et à l’image des professionnels de santé », estime Claude Andrillon, vice président du SNVEL. Lequel se dit déçu de la condamnation du tribunal correctionnel de Vannes dans le cas cité plus haut. « C’est un niveau de sanction qui n’est pas dissuasif, les magistrats ne s’émeuvent pas assez de ces infractions. » Il faut dire que les différents procès ont donné lieu à des condamnations très diverses, lesquelles illustrent sans doute la diversité des situations appréhendées par la justice. La BNEVP cite par exemple le cas d’une officine dont le titulaire a été condamné à 3 500 euros d’amende et dont l’assistant a écopé d’une peine de six mois de prison avec sursis ainsi que d’une amende de 4 000 euros. Claude Andrillon cite également le cas d’une officine dans une galerie marchande à Toulouse, dont le titulaire était dans l’ignorance des activités frauduleuses d’un préparateur qui soustrayait les produits et les remettait à un vigile, lequel les fournissait à une salle de sport.
Mais, à l’autre extrême, on peut citer le cas de ce pharmacien qui a souhaité rester anonyme, condamné à 1 000 euros d’amende pour délivrance de médicaments sans ordonnance. « J’ai eu tort, en effet, mais dans ce cas précis, les quelques chevaux bronchiteux qui ont bénéficié de ce renouvellement restent très longtemps malades, et je n’ai pas exigé le renouvellement de l’ordonnance initiale. » Aucun élément n’a pu conclure à une vente frauduleuse, mais l’affaire a néanmoins secoué le pharmacien condamné, réputé dans sa spécialisation vétérinaire. « J’ignorais que l’usage de ce médicament pouvait servir à d’autres choses que soigner les chevaux, et le cheval étant un animal fragile, les propriétaires sont connus et reviennent régulièrement demander des conseils. »
En pointant l’ignorance qui peut exister dans les officines sur ces questions spécifiques de détournement des produits vétérinaires pour dopage, alors que pour les médicaments humains l’information passe très vite chez tous les professionnels, ce confrère soulève une question relative à l’information dans ce domaine précis. Faut-il pour autant communiquer dessus ? Le conseil de l’Ordre des pharmaciens n’a pas souhaité répondre à nos questions.
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