« À NOTRE connaissance, cette enquête est la seule ressource de données existantes permettant de se faire une idée des effets du régime restrictif hyperprotéiné sur le poids à court et à plus long termes », soulignent les auteurs d’une étude publiée dans la revue « Obésité »*. Le régime Dukan, vanté par nombre de célébrités, serait pourtant suivi par au moins 2 millions de Français. « À ce jour, contrairement à d’autres régimes populaires tels que le régime Atkins, il n’existe aucune étude scientifique ayant évalué l’intérêt et les risques de ce régime », poursuivent Pr Éric Bruckert et les Drs Boris Hansel et Philippe Giral, du service d’endocrinologie, métabolisme et prévention de la Pitié-Salpêtrière (Paris), qui ont travaillé en partenariat avec le groupe d’édition en ligne, Benchmark Group.
Les internautes des trois sites (santé- médecine.net, linternaute.com et journaldesfemmes.com) ont été invités, s’ils avaient suivi le régime Dukan depuis plus de deux mois, à répondre à un questionnaire (12 questions) en ligne entre le 18 mars et le 23 mai 2011. Quelque 4 761 personnes ont répondu et 3 501 ont été inclus, ceux qui avaient suivi le régime au moins un an avant le début de l’étude, essentiellement des femmes (90 %).
L’enquête, intitulée « Dukan et après ? », « révèle que 80 % des personnes ayant adhéré au régime restrictif hyperprotéiné plus de trois ans auparavant ont repris le poids perdu », soulignent les auteurs. Avec un recul de deux ans, cette proportion passe à 75 %, le pourcentage de ceux qui reprennent le poids perdu dans la phase initiale s’accentuant avec le temps. Les résultats sont « concordants avec les données de la littérature et suggèrent l’absence de supériorité du régime restrictif hyperprotéiné (RRH) sur la perte de poids à long terme par rapport aux autres régimes restrictifs », expliquent-ils, évoquant différentes études qui ont comparé les effets sur le poids de différents régimes selon la proportion de lipides, de glucides et de protéines. Celle de Sacks et coll., en particulier, montrait que la perte de poids à deux ans est indépendante de la répartition en nutriments et notamment de la proportion des protéines dans l’alimentation.
Malgré les limites de l’étude, essentiellement liées aux modalités de recrutement, ses résultats sont en accord avec le rapport de novembre 2010 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), « Évaluation des risques liés à la pratique de régimes à visée amaigrissante », qui mettait en garde contre de tel régime et soulignait que, après la perte de poids initiale, seulement 20 % des obèses perdent du poids à long terme.
L’enquête du Bruckert et coll. révèle par ailleurs que la reprise de poids s’est effectuée dans moins d’un tiers des cas (24 %) dès la première année. « Cela confirme “l’impression générale” de réussite chez les adeptes de la méthode au cours de la première année du régime », assurent les auteurs. Cela explique aussi que les témoignages trouvés sur les forums Internet, seule évaluation disponible sur la méthode, sont plutôt favorables. « Les témoignages à long terme sont relativement rares », indiquent les auteurs, qui ont analysé le contenu de trois d’entre eux.
Culpabilité et cercle vicieux.
Lorsqu’on les interroge sur les raisons de la reprise de poids, les participants estiment dans une large majorité (60 % des cas) qu’ils sont « en faute », n’ayant pas été capables de suivre la phase de stabilisation prônée par le Dr Dukan, et qui doit durer toute la vie. Cette donnée s’intègre, selon les auteurs, dans le cadre des conséquences psychologiques potentielles des échecs des régimes restrictifs. Le « sentiment de culpabilité » engendré est à rapprocher d’un autre résultat de l’étude : 34 % de ceux qui ont repris du poids se déclarent prêts à le suivre de nouveau. Le Pr Bruckert et coll. évoquent le risque de « cercle vicieux » conduisant au phénomène de yo-yo (perte de poids-reprise de poids). « Il en découle une spirale d’échec à plus ou moins long terme », poursuivent-ils.
Au-delà des conséquences psychologiques, « plusieurs études sont en faveur d’une augmentation du risque cardio-vasculaire chez les sujets obèses ayant des fluctuations de poids », rappellent-ils. Ces fluctuations semblent aussi favoriser l’apparition d’un syndrome métabolique et donc des pathologies chroniques qui en découlent (maladies cardio-vasculaires, diabète de type 2, hépatopathie…), comme l’a montré l’étude SUVIMAX. Une seconde phase de l’étude, en préparation, concernera les effets du régime sur les facteurs de risque cardiométaboliques.
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