Les interactions médicamenteuses avec la méthadone sont relativement mal connues. Pourtant, mieux vaut les éviter car, une fois présentes, elles peuvent provoquer des surdosages ou des syndromes de manque pas toujours faciles à traiter.
« Le pharmacien possède une place centrale pour améliorer la situation, déclare le Dr Maroussia Wilquin, psychiatre et addictologue au Centre hospitalier d’Abbeville. Grâce à sa connaissance du patient et aux informations du dossier pharmaceutique, il a une vision globale des traitements pris par le patient. Alors que les médecins n’ont pas toujours connaissance des médicaments prescrits par leurs confrères pour un même patient. »
Peu de contre-indications formelles
Seulement quelques médicaments sont formellement contre-indiqués avec la méthadone : les agonistes-antagonistes morphiniques (pentazocine, buprénorphine, nalbuphine), les antagonistes morphiniques (naltrexone) et le sultopride. Aussi, depuis 2007, le citalopram et l’escitalopram sont également contre-indiqués, ces deux inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) ayant montré une augmentation du risque de mortalité par trouble du rythme cardiaque chez les personnes sous méthadone.
En ce qui concerne la naltrexone (Revia, Nalorex), sa prescription est loin d’être anecdotique chez les personnes sous méthadone qui peuvent être aussi alcoolodépendantes. Or ce traitement de l’alcoolisme rend la substitution inefficace, car la liaison du récepteur aux opiacés est plus forte avec la naltrexone qu’avec la méthadone. Donc en cas de codépendance, il faudra prescrire d’autres molécules telles que le baclofène ou l’Aotal (acamprosate). « Toutefois, on se méfiera de tout patient qui cesse de boire, car la baisse de la consommation d’alcool peut conduire à une augmentation des taux plasmatiques de méthadone et donc à un surdosage en méthadone, commente l’addictologue. Pour preuve, certains patients qui arrêtent de boire demandent à ce que l’on baisse la posologie de méthadone car ils se sentent surdosés en opiacés. Enfin, en cas de cessation de l’alcool, il faudra dissocier une somnolence liée au baclofène à une sédation liée à un possible surdosage en méthadone. »
Des associations problématiques
Outre ces rares contre-indications majeures, la méthadone fait l’objet de précautions d’emploi, notamment avec les inducteurs ou les inhibiteurs enzymatiques, les dépresseurs respiratoires et les médicaments allongeant l’intervalle QT.
La méthadone étant métabolisée par le foie, les inducteurs ou inhibiteurs enzymatiques perturbent son action. « Une induction entraîne une baisse des taux sanguins de méthadone et de sa durée d’action. Cliniquement, des signes de manque peuvent survenir. Au contraire, en cas d’inhibition enzymatique, la durée d’action de la méthadone sera augmentée et on pourra constater des signes de surdosage », avance Maroussia Wilquin. La vigilance sera de mise en cas de prise d’inhibiteurs enzymatiques tels que la Cordarone, certains antifongiques pris dans le cadre du VIH, antiprotéases, ISRS (Prozac, Deroxat), macrolides, jus de pamplemousse et alcool en prise aiguë. On se méfiera aussi de certains inducteurs enzymatiques souvent prescrits chez ces patients : anticonvulsivants, d’autres antifongiques, rifampicine, millepertuis. Vigilance également en cas d’arrêt du tabac, car il peut entraîner un surdosage (les goudrons de cigarette étant des inducteurs enzymatiques). « En cas d’apparition de signes cliniques, il faudra réadapter la posologie de méthadone ou fractionner les prises, même si cette technique n’est pas très bien admise », conclut le Dr Wilquin.
La rifampicine double la dose
Enfin, la rifampicine associée à la méthadone est à surveiller particulièrement. « En effet, selon l’étude de Kreek, 70 % des patients sous méthadone qui ont reçu cet antituberculeux ont ressenti des signes de sevrage opiacé. Et pour rééquilibrer le traitement, il faut doubler ou tripler la dose de méthadone durant la cure de rifampicine », commente l’addictologue.
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