ON L’IGNORE souvent, mais mesurer avec précision l’efficacité d’une vaccination est un « art » difficile, la vaccination antigrippale présentant des difficultés particulières sous ce rapport comme on le verra plus loin.
C’est ainsi, par exemple, que le Pr Gaston De Serres (Université Laval, Institut national de santé publique du Québec, Canada) a passé en revue les nombreux biais susceptibles d’influencer la mesure de l’efficacité du vaccin contre la grippe. Il a notamment attiré l’attention, dans le cadre d’essais cliniques cas-témoins, sur les difficultés à constituer des cohortes de sujets homogènes. Ces cohortes doivent être, en principe, représentatifs de la population, ce qui est souvent loin d’être le cas, notamment au regard de l’âge. Peu d’études en effet incorporent de jeunes enfants ou des personnes âgées au-delà de 65 ans, alors même que ces catégories font officiellement parties des « cibles » de la vaccination.
D’autres caractéristiques plus « subtiles » (autrement dit plus difficiles à maîtriser) ne sont pas toujours prises en compte, comme la capacité des individus à consulter devant une symptomatologie respiratoire et l’impact des autres infections respiratoires, surtout de nature virale (et elles sont nombreuses en hiver) susceptibles de survenir pendant une épidémie de grippe.
Le délicat choix des marqueurs.
Un point essentiel est représenté par la nature du ou des marqueurs utilisés pour caractériser une infection réellement grippale. Or, les experts présents ont reconnu qu’un certain nombre d’études ont utilisé dans le passé des outils pas suffisamment « robustes » pour être certain que ce qui était observé était bien des cas de grippe, qu’ils s’agissent de méthodes sérologiques ou de critères cliniques (certains se limitent à la triade, fièvre, toux, consultation médicale, parfois seulement à la consultation médicale). En effet, il faut savoir qu’en dehors des périodes d’épidémie de grippe, les syndromes grippaux sont provoqués, dans près de 95 % des cas par d’autres virus que les virus grippaux. Il est donc de la plus grande importance de mettre à profit des tests biologiques, rapides et/ou de laboratoire les plus sensibles possibles (mais dont la spécificité et la sensibilité ne seront jamais pour autant de 100 %) pour confirmer le diagnostic, c’est-à-dire distinguer les grippés des non-grippés (il faut savoir que la sensibilité de certains tests diminue parfois avec l’âge et le temps écoulé depuis le début des signes cliniques).
C’est donc dire la difficulté de comparer les études entre elles, et plus encore entre pays, des critères climatologiques et/ou d’environnement compliquant volontiers encore plus les choses.
Des études à venir.
L’analyse génomique post-vaccinale peut fournir de très intéressantes informations, complémentaires des données issues d’essais cliniques classiques (voir encadré).
Un immense champ d’action est ainsi ouvert aux spécialistes de la vaccination antigrippale, qui reconnaissent la nécessité de réaliser les études adéquates afin de mieux connaître l’efficacité de la vaccination contre la grippe dans les différentes tranches d’âge et les diverses situations physiologiques.
Rappelons que l’efficacité globale du vaccin antigrippal saisonnier en population générale est actuellement estimée à 70 - 75 % et que celle du vaccin pandémique (contre le virus A(H5N1) avait été mesurée à 95 % dans certains groupes de population.
Selon le Pr Bruno Lina (virologue, Lyon), qui préside le Conseil scientifique du GEIG, ces travaux auront matière à se développer dans les 5 à 10 ans qui viennent, stimulés par l’arrivée de nouveaux types de vaccins contre la grippe (intradermique, nasal vivant…), avec comme objectif final des vaccinations véritablement « à la carte ».
*Groupe d’Expertise et d’Information sur la Grippe
L’analyse génomique post-vaccinale se fonde sur les immenses progrès réalisés en ce qui concerne les étapes de la réponse immunitaire (innée, humorale et cellulaire), les très nombreuses cellules impliquées, les non moins nombreuses molécules sécrétées à cette occasion au sein de l’organisme ainsi que les multiples interactions moléculaires. Les spécialistes sont ainsi capables d’analyser avec énormément de finesse le cytome (cellules diverses), le protéome (protéines), le métabolome (produits du métabolisme) et le transcriptome (microséquences d’ARN…). Dans le cas du vaccin antigrippal vivant atténué (administration nasale), on peut ainsi mettre en évidence un réseau d’interactions entre gènes associés à la réponse interféron dès le 3e jour.
Dans ce cas, la difficulté principale actuelle et un grand enjeu pour l’avenir semble bien résider dans l’intégration de la grande quantité de données recueillies, impliquant les réseaux d’interactions de gènes, les protéines liées aux processus immuns et les réactions métaboliques. Et bien entendu, in fine, l’établissement de corrélations permettant de prédire l’efficacité vaccinale en « vraie vie ».
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