« Les traitements antipoux sont devenus un marché commercial important, échappant à l’évaluation thérapeutique sérieuse des produits ou des stratégies utilisés », déplore la Société française de dermatologie (SFD) dans un point sur la prise en charge de la pédiculose du cuir cheveu en 2019. « Désormais, il existe une multiplication des produits, disponibles en pharmacie ou non, et de centres privés antipoux, rendant le choix des patients difficile », constate la société savante.
Lesquels sont réellement efficaces ? La SFD tente de faire le tri parmi les différents produits et méthodes disponibles aujourd’hui. Déjà, elle souligne que des médicaments et non médicaments cohabitent sur ce marché.
Des médicaments…
Bénéficiant du statut de médicament, on retrouve divers insecticides, qui ont fait la preuve de leur efficacité dans des essais thérapeutiques. Notamment les pyréthrines qui détruisent le système nerveux des poux. Il existe des pyréthrines naturelles (extraites d’un chrysanthème) et des pyréthrines de synthèse (perméthrine, phénothrine…). Cependant, ces pyréthrines sont associées à une possible résistance, ce qui peut limiter leur utilisation.
Quant au malathion, autre insecticide, il n’est plus disponible : sa commercialisation a été arrêtée en 2018, à la suite d’une décision de l’ANSM, qui a placé le médicament sur prescription médicale obligatoire, en raison de la survenue de rares troubles neurologiques à fortes doses. Dans ce contexte, le seul laboratoire commercialisant un produit à base de malathion (Prioderm) a préféré arrêter son produit.
... et de la parapharmacie
Ensuite, on passe aux produits de parapharmacie, comme la diméticone. Cette dernière a le statut de « dispositif médical et non de médicament, et à ce titre répond à moins d’exigences réglementaires », précise la SFD. La diméticone est une huile de silicone qui tue les poux par une action physique, et non chimique. Elle les enrobe d'un film qui bouche leurs canaux excréteurs. D’autres substances avec le même mode d'action sont proposées : l'oxyphthirine, le myristate d’isopropyle, l'huile de paraffine, l'huile de coco ou de jojoba, la cire d’abeille, etc. Cependant, « l’efficacité de ces produits est souvent mal démontrée ou inférieure à celle des insecticides (dans les essais contrôlés randomisés) et les risques mal évalués ou peu connus », précise la SFD.
La société savante se prononce également sur le Bug Busting ou élentage répété après la mise en place d’un démêlant, qui constitue une technique de référence en Angleterre. Une source de chaleur y est parfois associée. Mais pour la SFD, elle n’est pas si facile à mettre en œuvre : « Elle demande une excellente observance car son efficacité est corrélée à la répétition quotidienne pendant plusieurs jours », estime-t-elle.
Enfin, la SFD se penche sur le cas particulier de l’ivermectine par voie orale. Dans un essai clinique randomisé, l’ivermectine per os à double dose a montré une efficacité supérieure au malathion lotion. Mais elle n’a pas d’AMM dans la pédiculose. Pour la SFD, elle pourrait être proposée exceptionnellement par les médecins, et uniquement dans les cas de résistances avérées. Quant à l’ivermectine en voie locale, elle n’a pas l’AMM pour le traitement antipoux (contrairement aux USA), et son usage intempestif pourrait favoriser la résistance. À proscrire, donc.
Abandonner les shampoings
La SFD s’est également penchée sur une autre problématique : les différentes galéniques des produits, qui ne sont pas toutes adaptées au traitement antipoux. En effet, « les lotions doivent être privilégiées et les shampoings abandonnés, tandis que les sprays sont contre-indiqués dès lors qu’il y a un contexte d’asthme/bronchiolite asthmatiforme », insiste la SFD.
Après cette première évaluation des traitements, la SFD compte élaborer une revue de toutes les études ayant trait au sujet, et de proposer une hiérarchisation des choix thérapeutique, voire des recommandations. Mais pour l’heure, la situation reste floue : « l’absence de comparaison directe entre les produits et dispositifs, le statut différent des produits antipoux, l’existence de résistance aux pyrèthrines, l’absence d’AMM pour l’ivermectine per os et le risque d’émergence de résistance après l’utilisation trop importante d’ivermectine locale rendent compliqué le choix des patients. »
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