Pour la première fois, une étude estime la morbidité et la mortalité des infections à bactéries multirésistantes en France en 2012. Publiée le 24 septembre dernier à l’occasion de la remise du rapport du Dr Jean Carlet « Tous ensemble, sauvons les antibiotiques » à la ministre de la Santé, l’étude Burden BMR (poids des infections à bactéries multirésistantes) est remise en cause par des scientifiques de Marseille.
Menée par une équipe spécialisée de l’Institut de veille sanitaire (InVS), l’étude met en évidence des chiffres effrayants. En 2012, en France, 158 000 personnes ont contracté une infection à germe multirésistant et 12 500 personnes en sont décédées. Mais pour Didier Raoult, professeur de microbiologie et directeur de l’Institut hospitalo-universitaire en maladies infectieuses de Marseille, « aucune donnée ne permet de dire que l’on est face à une épidémie bactérienne qui va tuer des milliers de personnes ». Pour lui, le rapport Carlet propose une « modélisation » de l’avenir fondée sur les connaissances du passé : « C’est de la déduction faite de multiplications de ratios, ce n’est que la constatation de phénomènes existants qui conduit à avoir plus de morts annoncées que de morts réelles. » Pour preuve, en admettant 12 500 décès dus à des infections à bactéries multirésistantes, Marseille « devrait recenser plusieurs centaines de morts », note à son tour Pierre-Edouard Fournier, président du Comité de lutte contre les maladies nosocomiales. « Or, entre 2011 et 2015, on n’a enregistré que 33 décès liés à des infections causées par une bactérie résistante », alors même que l’activité du CHU de Marseille pèse pour 2 à 3 % de l’hospitalisation en France.
Didier Raoult rappelle que la Fédération de microbiologie clinique des hôpitaux de Marseille a mis en place en 2001 un système de surveillance de la résistance aux antibiotiques. Celle-ci montre que les taux de résistances des dix bactéries pathogènes les plus fréquemment isolées ont « peu augmenté ou diminué », et aussi qu’il y a « moins de bactéries résistantes qu’il y a dix ans ». Aux yeux du Pr Raoult, la solution est « la gestion des 33 molécules du patrimoine antibiotique » et notamment la réintroduction de molécules antibiotiques anciennes qui ne sont plus sur le marché faute de rentabilité. Ce scientifique est un fervent défenseur de l’idée. Intervenant régulièrement dans l’hebdomadaire « Le Point », l’une de ses chroniques santé de l’été 2015 s’intitulait « Vive les vieux antibiotiques ! ».
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