LES CHIFFRES parlent d’eux-mêmes pour décrire l’ampleur du phénomène. En France, on compte 12 millions de personnes âgées de plus de 60 ans, soit plus de 20 % de la population. Les plus de 80 ans représentent 3,4 % de la population et dans dix ans, ils seront près du double. L’espérance de vie est de 83,7 ans pour les femmes et de 76,7 ans pour les hommes. 6 % des plus de 60 ans vivent en institution. Les personnes âgées de plus de 65 ans consomment plus de 40 % des médicaments. Quant aux plus de 80 ans ils justifient à eux seuls, 11,9 % des dépenses médicamenteuses.
Des effets prévisibles.
Il faut le savoir, 10 à 20 % des effets indésirables des médicaments conduisent à une hospitalisation. « 30 à 60 % de ces effets sont prévisibles, donc évitables », souligne le Pr Jean Calop. Un patient sur trois n’a pas bien pris ses médicaments ou n’est pas observant. Voilà qui donne à réfléchir…
Selon la formule bien connue de Paracelse, « rien n’est poison, tout est poison, seule la dose fait le poison ». L’iatrogénie médicamenteuse est liée à trois facteurs : le patient (modification physiologique, perte d’autonomie, polypathologie, Alzheimer, démence…), la prescription médicamenteuse (prescriptions mille feuilles, multiplication des intervenants…) et les médicaments (propriétés pharmacocinétiques, interactions…) Chez les personnes âgées toutes les fonctions physiologiques (respiratoire, hépatique, rénale, cardiaque, digestive…) sont diminuées. « Seule la perméabilité hémato-encéphalique est accrue, les psychotropes voient donc leurs effets augmentés », explique le Pr Jean Calop.
Décrypter les plaintes.
Tout commence par l’indispensable écoute du patient. Les paroles des patients âgés, atteints de pathologies chroniques doivent particulièrement être prises en compte : « je perds l’équilibre », « j’ai souvent des nausées. » Toutes ces plaintes doivent attirer l’attention. « Toute plainte mérite une analyse de l’ordonnance : il n’y a pas de plainte anodine. Soit la pathologie s’aggrave, soit il s’agit d’un effet médicamenteux iatrogène… » indique le Pr Jean Calop.
Il faut avoir le réflexe de chercher une cause iatrogène derrière la plainte d’un patient. Les exemples sont nombreux.
« J’ai des vertiges quand je me lève. » Cette hypotension orthostatique est peut-être liée à une prise de psychotropes, d’antihypertenseurs de type alpha-bloquants… Les troubles de l’équilibre sont fréquents chez les personnes âgées pouvant entraîner des chutes (benzodiazépines à demi-vie longue, hypnotiques, hypoglycémiants, anticholinestérasiques, anticholinergiques…).
« J’ai des bleus partout. » Il y a là un risque hémorragique peut-être dû à la prise d’anticoagulants, d’AINS associés à des antiagrégants plaquettaires…
« Je perds la boule. » Ce syndrome confusionnel est peut-être consécutif à la prise de psychotropes, de diurétiques, d’anticholinergiques ou de corticoïdes à haute dose en traitement prolongé.
Les psychotropes sont responsables de 31 % des effets indésirables des médicaments chez le sujet âgé. Une personne sur deux de plus de 70 ans fait usage de psychotropes.
« Je n’ai plus envie de rien. » Cette plainte cache un état dépressif (sédatifs du système nerveux central, bêtabloquants…) Il ne faut surtout pas dire « cela ira mieux la semaine prochaine ». Il ne faut pas hésiter à donner un rendez-vous au patient à une heure creuse pour procéder à une analyse pharmaceutique.
Quelques exemples d’interactions médicamenteuses à soupçonner ? AVK + AINS, AINS + IEC + ARA2…
Il existe de nombreux médicaments potentiellement inappropriés aux personnes âgés, dont M-L Laroche a établi la liste disponible sur internet (Rev Med Interne 2009 Jul ; 30 (7) : 592-601).
Le pharmacien devrait pouvoir faire le lien entre les médicaments pris et les résultats biologiques : connaître la clairance de la créatinine notamment.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques