Les bactériophages, ou phages, sont des virus spécifiques de bactéries présents à l’état naturel. « Les phages existent partout où il existe des bactéries, explique le Dr Alain Dublanchet, microbiologiste au CHIV. À commencer par notre tube digestif. C’est l’entité la plus importante, il y en a 10 fois plus que de bactéries. »
Le mode de reproduction des bactériophages est celui d’un parasite, puisqu’ils pénètrent dans la bactérie hôte. « Les phages dits virulents, par opposition aux tempérés, entament alors un cycle lytique et la bactérie meurt », poursuit le microbiologiste.
« C’est un biomédicament intelligent, expose le Dr Dublanchet. Il se multiplie en présence de la bactérie cible. Au niveau des foyers infectés, il est auto-réplicant et auto-limitant avant d’être finalement éliminés. » Les phages ne détruisent que les bactéries nuisibles et respectent celles utiles, par exemple la flore intestinale. « Les effets secondaires sont limités et liés à la libération des endotoxines bactériennes, poursuit-il. Il s’agit de maux de tête, de fièvre, douleurs hépatiques qui durent 24 à 48 heures. » En l’absence de la bactérie pathogène, les phages incapables de se multiplier sont détruits.
Les bactériophages se présentent sous forme liquide en ampoules. La durée de conservation peut être très longue, de plusieurs mois. Une seule dose de bactériophages suffit le plus souvent, « parfois une 2e à 48 heures », indique le Dr Olivier Patey, infectiologue au CHIV, mais le rythme d’administration reste encore « empirique », déplore ce dernier.
Les bactériophages sont des « mangeurs » de bactéries. Mais, outre cette capacité destructrice naturelle, on leur a découvert d’autres propriétés intéressantes en thérapeutique. D’une part, il existe une complémentarité avec certains antibiotiques, comme la pénicilline, dont ils renforcent l’activité en association. D’autre part, grâce à des enzymes, ils peuvent détruire le biofilm, cette barrière protectrice développée par les bactéries dans les infections chroniques pour se soustraire aux antibactériens.
Une surveillance écologique apparaît nécessaire car il existe des interactions des bactériophages avec l’environnement. Certains phages dits « tempérés » sont capables de s’intégrer au génome bactérien et peuvent entraîner des propriétés indésirables : résistance des bactéries aux antibiotiques, virulence, toxines). Néanmoins, le risque semble limité avec la phagothérapie car les phages utilisés en thérapeutique sont strictement lytiques.
Pour le Dr Dublanchet, il faut être attentif au phénomène de co-évolution adaptative des microsystèmes. « L’utilisation en quantité importante peut accélérer le phénomène, indique-t-il. Il faut une application réfléchie. En ce sens, l’association aux antibiotiques peut être une bonne chose. »
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