Quelques définitions
L’atopie est une susceptibilité particulière et héréditaire à développer des manifestations allergiques en présence d’une ou plusieurs substances inoffensives chez les sujets non atopiques.
La dermatite atopique, ou eczéma atopique, représente la manifestation cutanée de l’atopie, son diagnostic est essentiellement clinique. C’est une dermatose chronique prurigineuse, inflammatoire. Elle survient sur un terrain dit atopique qui associe asthme, rhume des foins, conjonctivite allergique et allergie alimentaire, avec souvent passage de l’un à l’autre au cours de la vie.
La xérose est un état de sécheresse cutanée excessif où la peau desquame de façon anormale.
L’ichtyose est une pathologie cutanée qui rend la peau très sèche, écailleuse sur de grandes surfaces. Elle est en général due à un trouble héréditaire de la kératinisation se traduisant par un épaississement épidermique et une desquamation permanente, la peau est recouverte de squames bien visibles. Un tiers des sujets qui ont une dermatite atopique ont aussi une ichtyose vulgaire.
Un peu de physiopathologie
En dehors de la prédisposition génétique, la dermatite atopique est liée à divers facteurs pathogéniques. Les facteurs mécaniques font intervenir une mauvaise cohésion des kératinocytes au niveau de la barrière cutanée qui ne remplit plus son rôle protecteur et laisse passer des allergènes.
De plus, l’eau contenue dans la peau s’évapore anormalement ce qui explique la xérose. Cette déficience de la barrière cutanée est liée à une anomalie du métabolisme des acides gras essentiels des séries oméga 3 et oméga 6 qui jouent un rôle déterminant dans l’étanchéité et la cohésion des cornéocytes.
Les facteurs immunologiques mettent en cause une déviation du système immunologique qui prédispose l’atopique à des réactions d’hypersensibilité médiées par une augmentation des IgE par l’intermédiaire des lymphocytes TH2. Selon la théorie hygiéniste de l’atopie la diminution des contacts avec des agents infectieux en début de vie serait responsable de l’installation d’une réactivité allergique plus importante et de la survenue des sensibilisations.
Les mots du conseil
Quels sont les signes cliniques ?
La dermatose se caractérise par une peau très sèche (xérose) présentant des lésions rouges, localisées le plus souvent au niveau des joues, des plis des coudes et des genoux, accompagnées de démangeaisons (prurit intense) caractéristiques des poussées d’eczéma. Au cours des poussées, la rougeur est recouverte de petites vésicules dont la rupture aboutit à un suintement suivi de croûtes. En période de rémission, la peau reste sèche et rugueuse au toucher. Sous l’effet du grattage, les lésions se lichénifient (épaississement), elles peuvent se fissurer ou former des plaies à vif qui favorisent les risques de surinfection locale bactérienne (staphylocoque doré) ou virale (herpès).
Comment évolue-t-elle dans le temps ?
L’évolution se fait par poussées qui s’espacent généralement vers l’âge de deux ans et le plus souvent tout disparaît à la puberté, mais la capacité à récidiver persiste toute la vie, surtout dans un contexte de stress. La survenue d’asthme (20 à 50 % des cas) est d’autant plus prévisible qu’il existe des antécédents familiaux et que la dermatite a été sévère, et une rhinite allergique survient chez 25 % des sujets.
Existe-t-il des diagnostics différentiels ?
Chez le nourrisson il faut écarter la gale et les dermites du siège. Chez l’adulte, il faut suspecter un lymphome cutané et écarter un psoriasis, une dermite séborrhéique ou un eczéma de contact. Des tests allergologiques (prick-tests, patch-tests, dosage des IgE sériques spécifiques) peuvent être entrepris pour cibler davantage la prise en charge (régime alimentaire d’éviction en particulier)
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Quand rechercher des allergènes de contact ?
La recherche est souhaitable pour tout eczéma persistant. Tous âges confondus, l’allergie de contact entre dans 40 % des cas de dermatite atopique localisée mais il ne faut pas la confondre avec un eczéma de contact qui peut cependant s’y rajouter. Dans ce cas, les lésions sont localisées à l’endroit même du contact avec l’allergène. La suppression de ces contacts suffit souvent à mieux contrôler les poussées. Si ce n’est pas le cas, on mène alors une enquête allergologique.
Quelle est la fréquence de l’allergie alimentaire ?
Elle est presque toujours présente dans les formes sévères de dermatite atopique, à la différence des formes modérées ou mineures qui sont plutôt entretenues par des facteurs de contact. Si l’élimination des allergènes alimentaires est précoce, on peut espérer une involution progressive de l’allergie dans des délais d’un à six ans, selon l’origine en cause. En prévention, chez un nourrisson né de parents atopiques, il faut privilégier l’allaitement maternel ou un lait hypoallergénique dès le premier biberon.
Quels conseils pratiques donner aux parents ?
Cet état cutané particulièrement sensible mérite des soins spécifiques et il convient de rassurer et d’encadrer la famille face à une maladie qui empoisonne la vie de tous. Dans ses conseils aux parents, le pharmacien insistera sur plusieurs points.
La vigilance doit être constante dans l’hygiène quotidienne même lorsque l’enfant n’est pas en poussée d’eczéma. Tout le corps doit être examiné à chaque toilette pour ne pas négliger une nouvelle poussée.
Les vêtements (amples) et les draps en coton sont les mieux supportés, il faut éviter la laine et les tissus synthétiques irritants. Pour le lavage il est conseillé d’utiliser peu de lessive (sans phosphates) en évitant les activateurs de lavage, et de rincer abondamment. Les assouplissants lissent le linge en le rendant moins rugueux mais certains favorisent les allergies et leur emploi est controversé.
Dans la maison, il est recommandé d’éviter la fumée de cigarettes, les animaux à poils et à plumes, de même que les peluches, les tapis, les tentures et autres pièges à poussières. L’aspirateur est passé quotidiennement.
L’alimentation est libre sauf interdiction particulière. Chez l’enfant atteint de dermatite atopique, la diversification alimentaire doit être prudente et il faut éviter l’œuf, le poisson, l’arachide, le kiwi et l’usage des tétines en latex pendant la première année de vie.
Le sport, le stress, les émotions et la chaleur favorisent la libération d’histamine et peuvent déclencher des poussées. L’habitat ne doit pas être surchauffé. Le soleil améliore les lésions mais il faut bien respecter les règles d’exposition.
Les vaccinations peuvent être faites normalement en dehors d’une poussée. Éviter tout contact avec une personne atteinte d’herpès (bouton de fièvre).
Les produits conseils
Les traitements habituels de l’atopie sont des traitements topiques médicamenteux et des soins émollients appliqués directement sur la peau. Ils doivent être adaptés à la gravité de la maladie. Le traitement médicamenteux fait appel à une corticothérapie locale pour lutter contre les poussées inflammatoires, à des anti-infectieux en cas de surinfection bactérienne (antibiotiques oraux, locaux, antiseptiques), et à des antiH1 pour calmer le prurit. Traiter une dermatite atopique chez un enfant, c’est aussi prendre en charge les parents sur une longue période. La démarche doit être patiente bien structurée car les récidives sont fréquentes.
Les dermocorticoïdes font-ils régresser la maladie ?
Ils ne permettent pas la guérison définitive mais ils contrôlent efficacement les réactions inadaptées du système immunitaire. Ils sont indispensables en poussées. Il ne faut pas arrêter brutalement le traitement ou le renouveler sans l’avis du médecin.
Quelles sont les précautions à respecter ?
Il faut les appliquer sur peau nettoyée et sèche, ne pas les étaler sous un pansement occlusif (couches) et se limiter aux surfaces atteintes (ni trop, ni trop peu). Il ne faut pas appliquer le dermocorticoïde destiné aux lésions du corps sur le visage et vice versa.
Quels produits choisir pour faire la toilette ?
Pour le nettoyage du visage et du corps, il est recommandé d’utiliser des savons peu détergents comme les syndets ou les pains surgras qui respectent le pH et le degré d’hydratation de l’épiderme. Les gels douche à base de tensioactifs anioniques limitent l’irritation grâce à leur pH légèrement acide.
Les bains sont-ils conseillés et comment les prendre ?
La douche et le bain éliminent une partie des germes auxquels l’atopique est sensible et ils procurent un moment de relaxation. Ils préparent l’application de soins locaux. Les bains sont éventuellement enrichis en huiles émollientes, en extrait d’avoine ou en amidon de blé, en émulsion lactée non moussante. Limiter la durée du bain à 5-10 minutes, plus long il dessèche la peau. La température doit être tiède (35 à 36 °C). Trop chaude, elle provoque ou réactive les démangeaisons. Il faut rincer abondamment (sauf le bain émollient) et sécher par tamponnement sans frotter.
Les soins hydratants sont-ils efficaces ?
Ils doivent répondre aux trois principaux problèmes de la peau atopique : la sécheresse, l’inconfort et l’irritation (rougeurs). Les actifs hydratants fixent l’eau avec des humectants (glycérol, sorbitol) et les NMF (acides aminés). Ils retiennent l’eau avec des agents filmogènes (hyaluronate de sodium, vaseline, squalènes, cires végétales). Ils reconstruisent la barrière cutanée avec des céramides et des phospholipides contenus dans des huiles végétales issues du blé, de l’onagre, de la bourrache. Les actifs apaisants font appel aux eaux thermales, au glycocolle, à l’allantoïne…
Comment les appliquer pour un maximum d’efficacité ?
Les crèmes émollientes s’utilisent en complément d’un traitement médical lors des poussées ou seules pendant la phase de rémission. Elles s’appliquent en petite quantité de préférence après le bain, lorsque la peau est encore humide. Mieux vaut deux fois par jour en petite quantité que deux fois par semaine en couche épaisse. Il est possible de les étaler après le traitement dermocorticoïde en respectant un délai de deux heures. Elles ne doivent jamais être appliquées sur une dermatose surinfectée. Les antiseptiques de type chlorhexidine en pains ou liquides sont parfois nécessaires en cas de surinfection avant l’application des topiques, ils sont suivis d’un rinçage abondant.
Comment pratiquer un massage chez un enfant ?
Allonger l’enfant puis masser en effleurant la peau avec de larges mouvements. Il ne faut pas frictionner la peau mais effectuer un massage après avoir fait chauffer l’émollient entre les mains. Commencer par les membres inférieurs (chevilles, cuisses) puis remonter aux aisselles, au tronc et aux poignets sans oublier le dos. Continuer vers la nuque, les oreilles puis le visage. Si nécessaire appliquer l’émollient avec le bout des doigts sur les paupières, la bouche et les commissures des lèvres.
Quelles formulations choisir en priorité ?
Il faut sélectionner les gammes conçues spécialement pour les peaux atopiques en crèmes ou en laits pour le corps et/ou le visage. Les agents relipidants favorisent la cicatrisation des peaux sèches. Se méfier des préparations à base d’huile d’amande douce pouvant être à l’origine d’allergies secondaires. L’association glycérol, vaseline et paraffine constitue une prescription classique qui bénéficie d’une AMM (Dexeryl). La crème Atopiclair a obtenu son remboursement LPPR dans le traitement de la dermatite atopique légère à modérée chez l’adulte et l’enfant de plus de six mois. Elle exerce une triple action : elle restaure les lipides épidermiques, hydrate la peau grâce à l’acide hyaluronique, et crée une barrière protectrice à la surface de la peau.
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