BIEN SÛR, c’est difficile à croire… Et pourtant l’édulcorant n’est pas apparu au moment où naissaient les Sucrettes ! En fait, la saccharine, sucre artificiel dont sont composées les célèbres pastilles, est découverte en 1879 par deux chercheurs de l’université Johns Hopkins, aux États-Unis. Ira Remsen et Constantin Fahlberg travaillent alors sur des dérivés de la houille, quand le premier découvre accidentellement une saveur sucrée sur ses mains qu’il a omis de laver correctement avant d’aller dîner. Le plus ancien des édulcorants artificiels vient d’être révélé et il a plus d’un atout : un pouvoir sucrant 300 à 500 fois plus élevé que le sucre pour un apport calorique équivalent à zéro, un risque cariogène nul, une élimination du corps par voie digestive sans passer par le sang, une stabilité face à la chaleur et aux milieux acides, une absence de réaction chimique avec les autres aliments et une bonne conservation dans le temps.
Mais là ne se borne pas la liste de ses nombreuses qualités. En effet, la saccharine présente l’avantage indéniable de pouvoir être produite à des coûts bien plus bas que le sucre. Est-ce là ce qui alerte l’attention de Louis Charles Vernin, pharmacien et fondateur des laboratoires galéniques qui portent son nom ? On peut le croire car, en 1909, les prémices de ce qui va devenir la première guerre mondiale se font déjà nettement sentir. La Triple Entente, qui allie la France, l’empire russe et le Royaume-Uni, précise un peu plus la nature des événements à venir. En face, l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie sont unis de longue date au sein de la Triple Alliance. Chacun a déjà choisi son camp… Reste à Sarajevo, la poudrière, d’entrer en scène pour amorcer une effroyable représentation qui durera quatre ans et fera près de dix millions de morts. Louis Charles Vernin pressent-il, à quelques années du début du conflit, les restrictions de tous ordres - alimentaires y compris - qui s’imposeront alors ? S’il ne les a pas prévus, il a au moins un instinct remarquable. Car il va permettre à tout un chacun, par l’intermédiaire des Laboratoires Galéniques Vernin, d’avoir accès sinon au sucre, du moins à sa saveur. Comment ? Tout simplement en se mettant à commercialiser un édulcorant à base de saccharine et au statut de médicament qu’il présente sous la forme de comprimés.
Complice des femmes.
Louis Charles Vernin baptise ses « petits sucres » du nom de Sucrettes et dépose officiellement la marque en 1913. Rapidement, les comprimés vont gagner les tasses, bols et godets d’une bonne part des foyers français, dispensant l’équivalent en saveur de deux sucres pour une dose. Un véritable bienfait pour une population dont la consommation de sucre par an et par habitant va brutalement être divisée par deux, l’aliment devant rester une denrée rare jusqu’au début des années 1920. Cette époque sera aussi celle des folles années qui, bien trop vite, vont s’égrener avant qu’un nouveau conflit ne se profile. À chaque période de restriction, l’édulcorant joue un rôle salutaire.
Mais imaginer les Sucrettes se cantonner à combler un manque ne serait pas leur rendre justice. Car elles vont épouser bien des causes. Et tout d’abord, celle des femmes de l’entre deux guerres. Complices nomades, bien rangés dans leurs étuis individuels enfouis tout au fond des poches, les petits comprimés vont accompagner leurs premiers pas vers l’émancipation. Bien plus tard, quand les dictats de la minceur auront détrôné la ronde pin-up et que les régimes feront loi, les Sucrettes répondront « présentes » à nouveau, aux côtés des femmes. À portée de main dans tous les sacs, à la maison, au travail, au café, au restaurant, leurs boîtes distributrices dispenseront en un seul geste les quelques grammes de douceur et de saveur tant désirés. Désormais, plus de privation au menu des restrictions : le sucre est permis, sa saveur tout au moins. Et quoi de plus essentiel que le goût et le plaisir qu’elle délivre ? Rien sinon une notion qui, à l’aube du second millénaire, va devenir un art de vivre : la santé. Et, une fois encore, les Sucrettes vont épouser la tendance et même la devancer. Car, aujourd’hui, la recherche agroalimentaire vise à créer des produits à teneur réduite en calories… Calories dont les Sucrettes sont exemptes. Toujours prêts à servir une bonne cause, les « petits sucres » auront donc été vecteurs de réconfort, de liberté et de minceur avant d’être synonymes de bien-être.
Objectif Santé.
Présentées en boîtes distributrices de 450 et 150 unités, les Sucrettes vont tout d’abord diversifier les plaisirs en se présentant sous la forme d’un comprimé équivalent à un sucre, en plus de celui équivalent à 2 sucres. Puis elles décident d’investir le champ de la santé qu’elles abordent sous l’angle nutritionnel. En novembre 2007, un nouveau concept d’édulcorant voit le jour, qui dote le sucre artificiel d’une promesse santé. La gamme porte le nom de Sucrettes Enrichies en actifs santé et vient offrir une alternative aux Sucrettes Authentiques. Les deux premières références lancées se positionnent sur les axes de la minceur et de la vitalité, l’une associant le chrome à sa composition, l’autre présentant un complexe de vitamines (C, B1, B12). Deux nouveaux lancements viendront, quelques mois plus tard, compléter la jeune gamme : Sucrettes Magnésium entend aider à la gestion du stress - préoccupation majeure des consommatrices d’édulcorant - et Sucrettes Antioxydants s’adjoint l’action concertée du sélénium et des vitamines A et E. Présentées sous forme de poudre conditionnée en sticks, les quatre références ont tout pour séduire les consommatrices. Pourtant, elles peinent à trouver leur public et, bientôt, la marque décide de se recentrer sur son cœur de gamme, les Sucrettes Authentiques. Son ancrage dans l’univers de la santé n’est pas, pour autant, remis en question. Après tout, n’a-t-elle pas permis au sucre artificiel d’investir l’hôpital où elle reste la marque de référence en termes d’édulcorant ? Sans oublier ses origines officinales, créées par Louis Charles Vernin, pharmacien de profession et portée pendant tout un siècle par trois générations de Vernin qui se sont succédé aux commandes des Laboratoires Galéniques Vernin et, par la suite, du groupe Mayoly Spindler. Pas étonnant que la vocation des Sucrettes soit, en toute simplicité, de rester la marque d’édulcorant du pharmacien. Et l’avenir pourrait voir perdurer cette orientation santé. Dans tous les cas, nul ne doute que les Sucrettes, légères et subtiles, sauront épouser l’esprit du temps comme elles l’ont toujours fait.
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