« LE TRAVAIL que nous a demandé la Direction générale de la santé n’a pas pour objet de rediscuter de l’intérêt du dépistage et de ses inconvénients collatéraux, surdiagnostic et surtraitement. Mais de formuler des recommandations pour que la participation au programme de dépistage organisé soit la plus large possible », souligne en préambule le Pr Jean-Luc Harousseau, président du Collège de la HAS. « Cependant, nous avons tenu compte dans nos recommandations des risques liés aux irradiations répétées, souligne-t-il. Et nous n’avons enregistré aucun signal qui puisse remettre en cause le principe même du dépistage. »
Une participation insuffisante.
Depuis 2004 en France, 4 millions de femmes de 50 à 74 ans sont sur invitation incitées à entrer dans un programme de DO du cancer du sein, par une mammographie à répéter tous les deux ans. Cinquante pour cent s’y soumettent, 10 % choisissent le DI puisque les deux systèmes (DO et DI) coexistent, une particularité hexagonale. Il faudrait 75 % de participation, tous dépistages de cancer du sein confondus, pour atteindre la cible fixée par le plan Cancer. Par ailleurs, le dépistage tel qu’il se pratique aujourd’hui accuse de formidables disparités régionales et sociales. À l’évidence, les chances d’accès à des soins de qualité ne sont pas égales pour toutes les femmes.
« 53 000 nouveaux cas attendus en 2012, 11 000 décès par an, le cancer du sein est le premier cancer de la femme, qui guérit dans la grande majorité des cas (85 %), d’autant plus sûrement que le cancer est diagnostiqué tôt », rappelle le Pr Agnès Buzyn, présidente de l’Institut national du cancer. Deuxième bénéfice du dépistage précoce, une meilleure qualité de vie, les traitements étant alors moins lourds, moins mutilants et les séquelles plus légères.
Nonobstant la part qui revient à une meilleure prise en charge thérapeutique, le gain de survie inhérent au dépistage serait de 10 % environ en France (30 % en Suède où la participation est exemplaire). Un gain dont on ne pourra être sûr qu’après 20 ans de recul du programme initié en 2004. « 3 000 vies pourraient être sauvées par an si toutes les femmes concernées se prêtaient au dépistage », estime la présidente de l’INCa. Le risque de surdiagnostic et donc de surtraitement (faute de pouvoir prédire l’évolution de ces cancers détectés en l’absence d’intervention) est évalué lui à 10 % ; il atteint 30 % pour les 15 % de carcinomes in situ dépistés sur la mammographie.
Un accès équitable aux soins.
Quoi qu’il en soit, si dépistage il doit y avoir, mieux vaut qu’il soit organisé. En dehors de l’accès équitable aux soins, il présente le très grand avantage d’inclure dans son cahier des charges une seconde lecture, plus efficace qu’une échographie (éventuelle de DI). « Tous les bilans considérés comme négatifs par le premier lecteur sont effectivement soumis à une seconde lecture, ce qui permet de rattraper au moins de 8 à 9 % des cancers passés inaperçus à la première, parfois même de 12 à 15 % dans certains départements », souligne le Dr Michel Deghaye, radiologue. Une pratique efficiente puisque, estime le Pr Lise Rochaix, présidente de la commission évaluation économique et de santé publique de la HAS : « Si les 10 % de DI basculaient en DO, 283 femmes pourraient être dépistées à la seconde lecture (qui n’existe pas en DI). Cette économie de traitements lourds compenserait largement la prise en charge à 100 % de toutes les femmes en DO, avec même un bénéfice net de 3 millions d’euros annuels. » Par ailleurs, tous les radiologues qui travaillent dans le cadre du programme national (la presque totalité) ont une obligation de formation spécifique et leurs machines doivent réglementairement être contrôlées tous les semestres. Enfin, le programme est évalué par l’Institut de veille sanitaire.
Une incitation forte.
C’est donc aux femmes de décider de participer ou non au dépistage quand elles ont reçu une information éclairée sur les avantages et les inconvénients de l’examen, mais c’est au médecin traitant (et/ou au gynécologue) d’inciter leurs patientes au DO plutôt qu’au DI. La HAS prévoit de leur faciliter la tâche à l’aide de documents d’informations synthétiques et régulièrement mis à jour sur le cancer du sein et son dépistage. Autre levier pour le changement (du DI en DO), le combat des idées reçues : ainsi, encore plus de la moitié des femmes qui font un DI pensent à tort le faire dans un cadre de DO, avec les mêmes garanties de qualité et de double lecture. La HAS préconise également une transmission systématique (en tout cas plus que ce qui se fait maintenant) des résultats de la mammographie au médecin traitant. Il n’est pas prévu pour le moment de déremboursement de la mammographie pratiquée dans un cadre individuel. « Nous comptons davantage sur l’incitation forte », conclut le Pr Harousseau.
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