Des demandes irrationnelles dans les pharmacies françaises

La ruée vers l’iode

Publié le 21/03/2011

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ON LE SAIT, plus une catastrophe est proche, plus elle suscite l’émotion. Mais dans le cas du drame qui se noue à Fukushima, au Japon, la peur a, semble-t-il, aboli les distances. Depuis quelques jours les pharmacies parisiennes reçoivent en effet de curieuses demandes. « Ils réclament des comprimés d’iode, imaginant pouvoir se protéger contre les atteintes thyroïdiennes qui seraient dues à la radioactivité », témoigne ainsi l’une d’entre elles. Une inquiétude également palpable au standard téléphonique de la Pharmacie centrale des armées, assailli ces derniers jours par des centaines d’appels de particuliers, et même d’officinaux (voir en page 5) ! Paris serait-il irradié ? Au pied de la Tour Eiffel, soit à 9 500 kilomètres de la centrale japonaise sinistrée, le compteur Geiger ne frémit toujours pas. Pour les pharmaciens, plus habitués aux champignons des bois qu’aux champignons atomiques, la tache n’est pas facile. Il s’agit avant tout de rassurer. Car, pour l’heure, la menace radioactive est nulle - et devrait le rester - assurent les experts. Expliquer et prévenir aussi, en précisant aux inquiets pathologiques qu’en dehors de traitement spécifique pour la thyroïde, seules les populations résidant dans un rayon de 10 km autour des 19 centrales nucléaires françaises sont approvisionnées régulièrement en comprimés d’iode. Enfin, les gardiens des poisons rappelleront utilement qu’il est non seulement inutile, mais dangereux, de prendre de l’iode dans l’état actuel de la situation. Car si la menace atomique est encore fantasmée, les risques d’allergies ou d’intolérance au produit sont, eux, bien réels. Effets secondaires de la déferlante médiatique, traumatisme lié aux images du cataclysme ou réflexe archaïque aux caprices de la nature ? Au total, personne ne pourrait dire ce qui provoque cette irrationnelle ruée vers l’iode.

› DIDIER DOUKHAN