Deux spécialités à base de naloxone sont disponibles en France comme antidotes aux overdoses d'opioïdes. Le spray nasal Nalscue a d'abord bénéficié d'une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) en juillet 2016, puis d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) effective en janvier 2018. La solution injectable Prenoxad vient compléter l'offre thérapeutique. À la différence de Nalscue, son laboratoire fabricant Éthypharm est parvenu à un accord de prix avec le Comité économique des produits de santé. Résultat : il est disponible en officine depuis début juin au prix encadré de 23,16 euros TTC, remboursable sur présentation d'une ordonnance et pouvant être délivré sans prescription médicale.
En revanche, l'échec des négociations entre le Laboratoire Indivior et les pouvoirs publics conduit à un prix moyen pour Nalscue d'une quarantaine d'euros et à une accessibilité limitée aux établissements de santé et aux centres spécialisés. Pire, Indivior a annoncé l'arrêt de commercialisation de Nalscue en France. Il reste néanmoins plus de 20 000 kits disponibles sur le territoire jusqu'en décembre 2020, date de leur péremption. Cependant, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) précise que trois autres solutions pour pulvérisation nasale en récipients unidoses ont obtenu leur AMM européenne et ne devraient plus tarder à être commercialisées. Il s’agit de Nyxoïd 1,8 mg, Naloxone Adapt 1,8 mg et 3,6 mg et Ventizolve 1,26 mg.
Hausse des overdoses
Pour autant, la journée internationale de sensibilisation et de prévention des overdoses (Overdose Awareness Day) du 31 août a pointé une accessibilité insuffisante aux kits de naloxone en France. Ainsi, selon la Direction générale de la santé (DGS), « plus de 500 décès par surdose, dont près de 80 % en lien avec les opioïdes recensés en 2017, auraient pu être évités ». Or, même si la situation française n’est pas comparable à la crise américaine des opioïdes et ses 70 000 décès en 2017, l’Observatoire français des médicaments antalgiques (OFMA) s’inquiète d’une augmentation des overdoses d’opioïdes médicaments (hors héroïne et méthadone). Son président, le Pr Nicolas Authier, remarque en effet qu’entre 2000 et 2015, ces décès « sont passés de 75 à 200 ». Face à cette tendance, l’accessibilité des antidotes est primordiale. Pourtant, le Pr Michel Reynaud, président du Fonds actions addictions, dévoile qu’un testing récent montre que Prenoxad est présent dans une pharmacie sur quarante et que les deux tiers des officines ne connaissent pas ce médicament.
Impliquer médecins et pharmaciens
Plus optimiste, l’équipe de la revue « Le Flyer », spécialisée en addictologie, constate que « l’été a été propice à la publication de documents administratifs encadrant et favorisant la diffusion des kits de naloxone » : une note de la DGS incitant les établissements de santé et les centres spécialisés à se doter de kits de naloxone et la publication discrète de la feuille de route 2019-2022 du ministère de la Santé pour « prévenir et agir face aux surdoses d’opioïdes ». Dans ce cadre, le ministère soutient le remboursement en ville de la naloxone prête à l’emploi pour élargir le circuit de délivrance au réseau officinal, mais aussi aux unités sanitaires en milieu pénitentiaire, dans les centres d’évaluation et de traitement de la douleur, aux services d’urgences et de secours (pompiers, police), aux douanes et à la police scientifique. Enfin, la feuille de route vise le développement d’une stratégie de déploiement de la naloxone impliquant les médecins de ville et les pharmaciens.
De bonnes intentions qu’il s’agit maintenant d’ancrer dans la réalité, comme le souligne le Pr Reynaud : « Il ne suffit pas de faire un plan de lutte contre les overdoses, il faut une mobilisation et une formation des professionnels (médecins, pharmaciens…) mais aussi des consommateurs, y compris ceux qui prennent des opioïdes contre le mal de dos et d’autres douleurs chroniques, et leurs proches, afin justement que les 80 % de morts reconnus comme évitables par le ministère soient évités. » Selon l’OFMA, 12 millions de Français recourent chaque année à une ordonnance remboursée d’un opioïde.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques