Si les traitements médicamenteux gardent la première place dans la prise en charge du sevrage tabagique, il ne faut pas négliger le rôle d’aide de l’activité physique sur le contrôle du craving (désir impérieux de fumer sans délai), même si son mécanisme n’est pas encore élucidé. La persistance du craving est en effet un bon indicateur du risque de reprise de la consommation lors d’une tentative d’arrêt du tabac.
Une revue de la littérature a été réalisée pour analyser l’influence de l’activité physique (AP) sur l’arrêt du tabac à long terme (1). Sur 17 études, quatre seulement mettaient en évidence un intérêt de l’AP pour aider à l’arrêt, et deux d’entre elles ne montraient aucun bénéfice, au-delà du programme d’exercice. Les auteurs en déduisaient que l’AP ne peut pas être considérée comme un moyen d’aide à l’arrêt du tabac, tout en signalant que l’hétérogénéité des études représentait un biais méthodologique important.
En revanche, la pratique d’une AP lors du sevrage tabagique limitait le syndrome de sevrage, le craving, la prise de poids et les effets négatifs de l’arrêt. Sur les 18 études analysées, une seule, chez des adolescents, ne met pas en évidence l’efficacité de l’AP pour réduire le craving, probablement à cause de l’insuffisance de la durée ou de l’intensité de l’exercice dans cette population.
Un effet qui peut durer 30 minutes
Ces 18 études ont été réalisées, pour la plupart, en aérobie (exercices d’endurance) sur tapis roulant ou vélo ergométrique. Deux études seulement ont été conduites en isométrique (contraction contre résistance). Elles ont été menées en laboratoire avec au moins deux groupes : l’un actif et l’autre passif. Soulignons que l’abstinence avant l’étude variait entre 15 et 17 heures et que les sujets participants à l’étude n’étaient pas recrutés sur leur motivation. L’AP en laboratoire durait une dizaine de minutes. Le craving était mesuré par différentes échelles parmi lesquelles on peut retenir le French Tobacco Craving Questionnaire (FTCQ-12), version courte du FTCQ mis au point par le Pr Ivan Berlin (2).
Certaines études montrent la diminution du craving pendant l’exercice, d’autres pendant les 5 à 30 minutes qui suivaient l’arrêt de l’AP. C’est court, certes, mais ça a le mérite d’exister ! En effet, il faut considérer que de nombreux fumeurs déclarent que leur envie de fumer ne dure pas très longtemps ; dans ce cas, le désir de fumer est plus d’ordre psychocomportemental que lié à la dépendance nicotinique.
Deux études ont comparé l’AP et les gommes à la nicotine (3, 4) : elles ont montré le même taux d’efficacité… Il convient ici de rester prudent sur ces données.
Mieux au labo que chez soi
Une étude s’est déroulée au laboratoire puis dans l’environnement habituel des sujets (5). Au laboratoire, comparativement au groupe témoin, il est noté dans le groupe avec AP isométrique de 10 minutes et dans le groupe relaxation, une diminution significative du craving 5, 10 et 30 minutes après l’AP. En revanche, dans leur environnement habituel, chez les sujets des groupes AP et relaxation, une diminution significative du craving n’est observée qu’à la fin de l’AP et 5 minutes après la fin des séances, mais pas au-delà.
Quant au mécanisme qui procède de la diminution du craving par l’activité physique, certains auteurs ont évoqué un phénomène de distraction cognitive induite par la pratique de l’exercice. Mais cela reste à prouver.
Il est également intéressant d’évaluer le délai de reprise de la première cigarette après l’exercice. Les résultats d’une étude en laboratoire (6) ont montré à ce sujet que les individus du groupe actif reprenaient la cigarette 17 minutes après ceux du groupe témoin.
(1) Underner M et al. Revue des Maladies Respiratoires, 5 juin 2015.
(2) Berlin I et al. Nicotine Tob Res 2010 ;12:500-7.
(3) West R et al. Psychopharmacology (Berl) 2001 ;155:115-22.
(4) Shiffman S et al. Psychopharmacology (Berl) 2003 ;166:343-50.
(5) Ussher M et al. Addiction 2009 ;104:1251-7.
(6) Kurti AN et al. Addict Behav 2014;39:1131-7.
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