« EN CE QUI CONCERNE les apports recommandés en oméga 3 (également appelés acides gras polyinsaturés n-3 ou AGPI n-3) dans la protection cardiaque, il existe une ambiguïté dans les discours entre la supplémentation alimentaire et les patients à traiter et pour lesquels il faut des médicaments », prévient en préambule le Dr Alain Ducardonnet (Institut Cœur Effort Santé-Paris). Des études épidémiologiques prospectives ont mis en évidence une diminution du risque relatif des maladies cardio-vasculaires chez les personnes en bonne santé, et ces données ont permis de conseiller, en prévention primaire, un apport nutritionnel journalier en EPA et DHA de 500 mg. De plus en plus de données scientifiques dans la compréhension des modes d’action des troubles du rythme ont permis de déterminer les bénéfices des médicaments à base d’AGPI n-3, en prévention secondaire, dans des pathologies cardiaques ciblées. Les études cliniques réalisées avec un AGPI n-3 à des doses pharmacologiques ont démontré des bénéfices en termes de réduction de la mortalité et de la morbidité chez des patients présentant une atteinte coronaire post-IdM et post-pontage. « Différents canaux ioniques sont impliqués dans l’activité cardiaque, parmi eux le courant sodique persistant est un courant pathologique qui n’existe que dans les conditions ischémiques ou d’insuffisance cardiaque ; il induit une entrée massive et permanente d’ions sodium à l’origine d’une surcharge calcique intracellulaire qui va provoquer une contracture et une nécrose », explique le Dr Christophe Pignier, responsable scientifique de Pierre Fabre Médicament. Selon les résultats de l’étude GISSI (« Lancet » 1999), un ajout d’AGPI n-3 (EPA-DHA 1 g/jour) à la prescription typique en post-IdM va bloquer le courant sodique pathologique en laissant intacte toute l’électrophysiologie environnante, l’effet est sélectif au niveau des cellules nécrosées.
Déficit en oméga 3 et dose-dépendance.
« Dans l’insuffisance cardiaque, l’inflammation est prépondérante et participe au remodelage ventriculaire ; celui-ci va mettre en place des mécanismes compensateurs, mais, à terme, ceux-ci vont échapper à tout contrôle et devenir délétères, poursuit le Dr Pignier. Il vient d’être démontré tout récemment que les patients insuffisants cardiaques présentent un déficit en oméga 3. En effet, le remodelage modifie l’efficacité d’une des enzymes impliquées dans la transformation de ALA en EPA et DHA, et ce déficit peut être comblé par une supplémentation en AGPI n-3. » L’efficacité des AGPI n-3 dans l’insuffisance cardiaque non ischémique serait due pour partie à leurs effets sur les marqueurs de l’inflammation, comme le prouvent les études Nodari et Moertl. Les EPA et DHA peuvent agir directement ou indirectement sur l’inflammation : les métabolites de l’EPA, qui interviennent dans la série 3 des prostaglandines et la série 5 des leucotriènes, sont moins pro-inflammatoires que les dérivés de l’acide arachidonique, tandis que ceux du DHA ont une action anti-inflammatoire. Ces voies de métabolisation permettent de réguler, voire de diminuer l’inflammation et d’agir sur le remodelage ventriculaire. À la dose de 4 g par jour, les résultats sont significativement améliorés et l’étude Moertl démontre que les AGPI n-3 peuvent être efficaces rapidement (trois mois) chez des patients sévèrement atteints sur le plan cardiaque, à condition d’augmenter la dose (effet dose-dépendant). « Toutes ces études renforcent la crédibilité médicale et clinique des AGPI n-3 dans ces pathologies et confirment leur statut de médicament à part entière malgré l’arsenal thérapeutique déjà existant, conclut favorablement le Dr Ducardonnet. Nous sommes dans une réalité médicale avec des arguments objectifs et dans une dynamique de construction de dossier post-infarctus pour légitimer de nouvelles molécules. »
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