LES ÉTIQUETTES de boîtes de fromage font mieux que décrire. Elles racontent. Il ne s’agit pas des étiquettes d’aujourd’hui, mais des anciennes, celles que Lionel Gaudefroy collectionne. Ce pharmacien de Rouen s’intéresse particulièrement à la période 1890-1914, même s’il ne dédaigne pas, loin s’en faut, les étiquettes de l’entre-deux-guerres. « Le tournant du siècle est la période la plus riche, affirme-t-il, une période de forte expansion de l’industrie fromagère durant laquelle il fallait faire passer beaucoup de choses par les étiquettes. »
C’est cela que les étiquettes racontent, l’art d’informer et d’attirer le client, à une époque où la publicité n’existait pas, ou si peu. Comme souvent, le goût de la collection mène sur des chemins plus profonds, et, en l’occurrence, c’est toute l’histoire de l’industrie fromagère de la Normandie qui se retrouve derrière ces étiquettes, « d’une esthétique parfois exceptionnelle, évoque Lionel Gaudefroy, influencée par exemple par l’Art Nouveau. »
La tyrosémiophilie, nom donné à la collection des étiquettes, va donc bien au-delà, et c’est une connaissance très riche que ce confrère a accumulée sur l’industrie fromagère normande. Et plus précisément du pays de Bray, tout au moins une version étendue puisque le périmètre considéré par Lionel Gaudefroy va jusqu’aux frontières de la Somme et de l’Oise. « Il y a une certaine cohérence à cela car plusieurs fromageries situées dans ces deux départements ont apposé l’étiquette « fabriqué en Normandie » à leurs fromages dont le lait était effectivement produit en Normandie mais qui étaient élaborés en réalité ailleurs, chose que la réglementation ne permettrait plus aujourd’hui ? », explique-t-il.
Derrière la vache, l’histoire.
Cette industrie doit beaucoup aux chemins de fer qui ont permis l’acheminement des fromages aux quatre coins de la France, et aussi à des industriels venus d’autres régions, le plus souvent de l’Est, la Savoie ou le Massif Central.
Ce goût pour les étiquettes de boîtes de fromage lui est arrivé un peu par hasard. « J’ai vu un jour dans une brocante l’étiquette d’un fromage que je mangeais enfant, et qui n’existait plus, raconte Lionel Gaudefroy. Le brocanteur en avait d’autres, je les ai toutes achetées. » Ainsi commence la collection. Mais il y a dans cette passion aussi une part de destin. « J’avais présenté trois sujets de thèse pour mon doctorat et, à ma grande surprise, celui qui a été retenu fut celui sur la composition chimique du fromage de Neuchâtel. »
Aujourd’hui, Lionel Gaudefroy fait profiter de ses connaissances à travers des articles qu’il écrit pour une revue spécialisée, celle de la Société historique et géographique du bassin de l’Epte. Tour à tour ethnologue, historien ou encore économiste, il nous appelle à le suivre sur les chemins qu’ont empruntés ces pionniers de l’ère industrielle, depuis les fromageries de La Chapelle-aux-pots, à celles de Marseille-en-Beauvaisis, en passant par Songeons. Un premier essai, publié à compte d’auteur, « Les fromageries de l'Oise », donne le ton de cette épopée normande. Lionel Gaudefroy espère pouvoir récidiver quand le temps de la retraite viendra, en publiant un ouvrage exhaustif où il donnera libre cours à sa passion.
Des connaissances qui sont aussi d’une utilité pratique : Lionel Gaudefroy peut ainsi conseiller à ses clients dont il connaît les risques allergiques : quand consommer certains fromages, selon quelles races de vaches, selon leur alimentation. Un fromage produit à partir du lait de vache nourrie au maïs sera, par exemple, plus acide qu’un fromage obtenu à partir d’un lait de vache nourrie à l’herbe.
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