Les mots du client
- « J’ai plus souvent une « panne » quand je suis stressé ou fatigué ;
- Je suis diabétique et j’ai peur de devenir impuissant ;
- Depuis que mon mari a été opéré de la prostate nous n’avons plus de rapports sexuels. »
Rappel physiopathologique
La dysfonction érectile est définie, depuis 1993, par « l’incapacité persistante d’un homme à obtenir ou maintenir une érection pénienne suffisante pour permettre une relation sexuelle satisfaisante ». De plus, on estime que le diagnostic de dysfonction érectile suppose une durée du trouble d’au moins 3 mois, sauf cas particulier (après chirurgie par exemple).
Il est essentiel de bien distinguer entre la dysfonction érectile et les autres dysfonctions sexuelles, parmi lesquelles l’altération du désir, l’éjaculation prématurée et l’anorgasmie ; cela étant, il faut aussi ne pas oublier que ces troubles peuvent être associés, ce qui peut compliquer quelque peu les choses.
Les questions à l’officine
Faut-il obligatoirement faire des examens, biologiques ou autres, pour connaître l’origine d’un problème sexuel ?
Pas forcément. Tout dépend du cas d’espèce.
D’une manière générale, on estime qu’il est surtout recommandé de réaliser une glycémie à jeun ainsi qu’un bilan lipidique si cela n’a pas été fait depuis un an.
Le dosage de la testostéronémie est indiqué en cas d’altération du désir sexuel, de suspicion ou de risque d’hypogonadisme. Notons au passage qu’il est préférable de doser la testostérone biodisponible et que le prélèvement doit être fait entre 8 et 11 heures Une testostéronémie abaissée est une indication à mesurer la prolactinémie ainsi que la LH et la FSH.
La prolactinémie doit être systématiquement dosée en cas de troubles du désir, de gynécomastie ou de signes de tumeur hypophysaire associée (céphalées, troubles visuels).
Dans un autre ordre d’idée, il peut être utile de faire un bilan cardiovasculaire. D’ailleurs, la dysfonction érectile est un indicateur de pathologie artérielle, notamment coronarienne.
Enfin, les examens complémentaires centrés sur la dysfonction érectile (doppler des artères caverneuses, électromyogramme…) n’ont plus aujourd’hui que des indications très ciblées et restreintes.
Je suis cardiaque et j’ai un peu peur de prendre des médicaments pour reprendre une activité sexuelle. Y a-t-il un danger ?
Tout dépend de ce que l’on entend par « être cardiaque ».
Cela étant, il est exact qu’il n’est guère prudent de reprendre une activité sexuelle très « active », après une plus ou moins longue interruption, grâce aux médicaments ad hoc (surtout après un « certain âge », mais pas seulement), s’il existe une suspicion de problèmes cardiovasculaires.
Cela peut aller, rarement, jusqu’à la contre-indication.
À ce sujet, il est généralement admis qu’un rapport sexuel pénétrant correspond à la montée d’environ deux étages.
Au total, il doit être clair qu’une consultation médicale s’impose en pareil cas.
Quand doit-on penser à une possible origine psychologique à des « pannes sexuelles » à répétition
?
Sans pouvoir être absolument affirmatif, l’attention sur une cause possiblement psychologique doit être attirée tout particulièrement lorsque le trouble érectile survient brutalement (une cause organique étant plus souvent caractérisée par un début progressif, des éjaculations sur une verge molle, une disparition des érections nocturnes ou matinales spontanées), avec une concordance dans le temps d’une circonstance peut-être déclenchante d’ordre psychologique ou affective, comme un conflit familial, un décès dans l’entourage proche ou l’annonce d’un licenciement, par exemple. Un point clé est la conservation d’érections dans certaines circonstances et, bien sûr, l’absence de facteurs de risque organiques.
Enfin, il faut savoir que la cause peut être mixte, à la fois organique et psychologique.
Chez le médecin
L’interrogatoire est une étape très importante, sans obligatoirement le mener en présence de la partenaire, bien que celles-ci puissent fournir éventuellement (le cas échéant lors d’une autre consultation) d’utiles compléments d’information.
Schématiquement, il convient tout d’abord de s’enquérir de l’âge du patient, de sa profession, du contexte culturel ainsi que du contexte psychoaffectif et conjugal, de son mode de vie, de ses antécédents médico-chirurgicaux, de ses traitements médicamenteux, de son éventuelle consommation de tabac ainsi que d’alcool… et de son tempérament.
S’agissant de la dysfonction proprement dite, le médecin doit s’enquérir de son ancienneté, de son caractère primaire (dès les premières tentatives de relation sexuelle) ou secondaire, de la forme du début du trouble (soudain ou progressif), de l’identification de circonstances déclenchantes, de l’évaluation de la dysfonction érectile (rigidité et durée), des différents types d’érection (relationnelles, nocturnes, matinales au réveil)…
Un autre aspect concerne l’évaluation du retentissement du trouble sur le vécu du patient. Notamment au regard de l’angoisse de performance, la peur de l’échec, les attitudes d’évitement, les sentiments de dévalorisation ou de culpabilité. Notons à ce sujet l’intérêt de certains questionnaires, comme le IIEF 5 (voir encadré), permettant de mesurer l’intensité de l’impact de la dysfonction érectile.
L’examen clinique est également un temps essentiel : recherche de signes d’hypogonadisme (baisse du volume testiculaire, gynécomastie, diminution de la pilosité, associée à une réduction de la fréquence du rasage), examen des organes génitaux externes (longueur normale moyenne de la verge : 13 cm), toucher rectal, palpation des pouls des membres inférieurs…
Selon les résultats de l’approche clinique initiale, certains examens biologiques et/ou complémentaires peuvent être indiqués.
Enfin, une consultation spécialisée peut parfois être indiquée, par exemple dans le domaine de l’urologie, de l’endocrinologie, de la sexo-psychologie ou en psychiatrie.
Les traitements
On mesure le chemin qui reste à parcourir lorsque l’on sait que seulement environ 10 % des hommes atteints de dysfonction érectile seraient aujourd’hui traités…
Les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5, ou IPDE 5 (sildénafil-Viagra, tadalafil-Cialis, vardénafil-Lévitra) à la demande représente le traitement de première intention, en dehors naturellement des contre-indications : prise de dérivés nitrés et donneurs de NO), états cardiovasculaires graves et instables…
Rappelons qu’il s’agit de facilitateurs/amplificateurs de l’érection (nécessitant donc une stimulation sexuelle) et non pas d’inducteurs de l’érection.
La posologie initiale recommandée varie habituellement de 10 mg pour le vardénafil (5 mg chez les plus de 65 ans) et le tadalafil et 50 mg pour le sildénafil.
La dose peut être ensuite doublée après plusieurs prises s’étant révélées insuffisantes, en sachant que l’effet maximal n’est généralement pas obtenu dès la première prise.
Il n’est pas recommandé d’aller au-delà d’une prise par jour.
Le délai d’action moyen varie selon les produits entre 30 minutes et 1 heure.
Le tadalafil peut être utilisé en prise quotidienne (2,5 ou 5 mg/j) lorsque ce schéma d’administration correspond mieux aux habitudes du patient ou à son souhait de ne pas faire précéder l’acte sexuel par la prise du médicament.
A savoir : nécessité de réduire la posologie initiale du sildénafil et de vardénafil en cas d’insuffisance rénale sévère ou d’insuffisance hépatique légère ou modérée (contre-indication en cas d’insuffisance hépatique sévère). Quel que soit le degré d’insuffisance rénale ou hépatique, le tadalafil doit être utilisé à la posologie de 10 mg.
Les inducteurs de l’érection (alprostadil – Edex, Carverject et Caverject Dual, en injection intra-caverneuse ; Muse en application intra-urétrale) représentent une approche de seconde intention, voire de première en cas de contre-indication aux IPDE 5 ou d’effets indésirables jugés importants. Ils sont utilisés pour déclencher artificiellement l’érection juste avant le rapport sexuel. La posologie maximale recommandée est de deux administrations intra-caverneuses par semaine, avec un délai d’au moins 24 heures les séparant. Une érection se prolongeant plus de 3 heures (l’érection ne doit pas durer plus d’une heure) doit conduire à une consultation médicale (voire aux urgences hospitalières) sans délai, afin de réaliser une injection intra-caverneuse d’un alpha-stimulant. La forme intra-urétrale peut s’utiliser jusqu’à 2 fois par jour et 7 fois par semaine.
Une autre possibilité efficace, bien que peu utilisée, consiste en l’utilisation d’un érecteur à dépression (ou vacuum) ; mais l’érection ainsi induite est différente de l’érection naturelle. Attention, l’anneau constricteur placé à la base de la verge et permettant le maintien de l’érection ne doit pas être maintenu plus de 30 minutes.
Une dernière possibilité est la mise en place d’un implant pénien rigide ou d’une prothèse (à fonctionnement hydraulique) d’érection.
Enfin, il ne faut pas mésestimer le rôle de la prévention, avec la prise en charge des facteurs de risque, comme un changement des habitudes alimentaires, une réduction du poids en cas d’obésité (une perte de poids de 10 % permet une amélioration de l’ordre de 30 % de la fonction érectile), la reprise d’une activité physique (débuter une activité physique à la cinquantaine réduit de 70 % le risque de survenue d’une dysfonction érectile), un arrêt du tabagisme, le traitement d’une hypertension artérielle ou d’une dyslipidémie.
Évaluer le risque cardiaque
Avant la mise en route d’un traitement de la dysfonction érectile, il est prudent d’évaluer le statut cardiovasculaire du patient, afin de dépister une pathologie associée méconnue, voire connue mais sous-estimée ou insuffisamment prise en charge. En effet, cette dernière est considérée comme un indicateur de pathologie artérielle, notamment coronarienne.
On distingue, de ce point de vue, trois catégories :
Patients à risque cardiaque faible
Il s’agit de patients asymptomatiques ou présentant moins de 3 facteurs de risque cardio-vasculaire (hypertension artérielle contrôlée, angor mineur et stable, revascularisation coronaire réussie, antécédents d’infarctus du myocarde non compliqué datant de plus de 6 semaines), une pathologie valvulaire mineure, une dysfonction ventriculaire gauche avec insuffisance cardiaque stade 1.
L’attitude recommandée est de ne pas réaliser d’évaluation complémentaire avant la reprise de l’activité sexuelle.
Patients à risque cardiaque intermédiaire ou indéterminé
Il s’agit de patients présentant au moins 3 facteurs de risque cardio-vasculaires, comme un angor modéré et stable, un infarctus du myocarde récent (datant de 2 à 6 semaines), une dysfonction ventriculaire gauche avec insuffisance cardiaque congestive de stade 2, une lésion athéromateuse extracardiaque.
L’attitude recommandée est de réaliser une évaluation complémentaire avant une éventuelle reprise de l’activité sexuelle.
Patients à risque cardiaque élevé
Il s’agit de patients présentant un angor instable, une hypertension artérielle non contrôlée, une dysfonction ventriculaire gauche avec insuffisance cardiaque congestive de stade 3 ou 4, un infarctus du myocarde très récent (moins de 2 semaines), des troubles du rythme à haut risque, une cardiomyopathie obstructive ou une pathologie valvulaire modérée à sévère.
L’attitude recommandée est de différer toute activité sexuelle jusqu’à stabilisation de l’état cardiaque.
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