Les principaux médicaments
Sevrage tabagique (nicotine - Nicopatch, Nicotinell TTS), antalgiques (fentanyl - Durogésic), estrogènes ou progestatifs seuls (17 bêta estradiol – Climara, Estraderm, Estrapatch, Femsept, estradiol - Dermestril, Oesclim), associations estrogène + progestatif, à visée contraceptive (éthinylestradiol + norelgestromine - Evra) ou destinées au traitement hormonal substitutif de la ménopause (estradiol + lévonorgestrel - Femseptevo), médicaments préventifs de l’angor (trinitrine - Nitriderm TTS, Cordipatch), et aussi rivastigmine - Exelon, scopolamine - Scopoderm…
Rappelons le lancement récent en France des premiers génériques de dispositifs transdermiques, renfermant du fentanyl.
Des concentrés de technologie
Selon la définition de la Pharmacopée européenne, les dispositifs transdermiques sont des systèmes thérapeutiques souples servant de support à un ou plusieurs principes actifs et destinés à être appliqués sur la peau et maintenus grâce à un adhésif. Ceux-ci sont destinés à libérer leur(s) principe(s) qui diffuse (nt) à travers la barrière cutanée vers la circulation générale.
Le principe actif passe passivement d’abord dans la couche cornéenne, puis traverse l’épiderme, le derme et enfin l’hypoderme avant de diffuser dans le sang.
Les systèmes transdermiques actuels, apparus à partir de 1985, communément dénommés « patchs », permettent une administration systémique contrôlée et prolongée de principes actifs, pouvant être mal absorbés par d’autres voies, subissant un important effet de premier passage digestif et/ou hépatique, présentant une courte demi-vie (comme la scopolamine par exemple) ou encore mal tolérés.
Très souvent, ceux-ci permettent l’emploi de doses de principe actif inférieures aux posologies requises pour la voie orale.
Ils sont caractérisés par une posologie exprimée en quantité de principe actif par unité de surface et par unité de temps ; par exemple en mg/cm²/24 heures Pour une même spécialité, les différents dosages correspondent à des surfaces différentes ; en effet, dans le cadre d’une même formulation, la concentration plasmatique est proportionnelle à la surface du patch.
Les avantages de ces dispositifs sont nombreux : facilité d’utilisation (ce qui améliore en principe l’observance) dans le cadre d’une autoadministration du médicament pendant un temps plus ou moins prolongé, avec une vitesse constante assurant des concentrations plasmatiques stables, sur une durée variant - par dispositif - de quelques heures à une semaine.
À réservoir ou matriciel
Tous les dispositifs transdermiques sont constitués d’un support externe imperméable, d’un compartiment renfermant le ou les principes actifs, d’un élément de contrôle de libération, d’un élément adhésif permettant le maintien au site d’application et d’un support protecteur amovible destiné à être retiré au moment de l’emploi.
Deux grandes catégories se distinguent par la nature de l’élément de contrôle : type réservoir ou matriciel.
Le système réservoir est associé à une membrane de libération de type polymère : polypropylène, copolymère éthylène/acétate de vinyle… La vitesse de transfert du principe actif à partir d’une solution ou d’une suspension suit une cinétique d’ordre zéro ; ce qui signifie que la vitesse de libération est constante au cours du temps.
Le système matriciel (qui tend à devenir majoritaire), présente notamment l’avantage d’être plus fin, plus souple et donc plus esthétique. Son compartiment central est représenté par une masse polymérique au sein de laquelle est dissout ou dispersé le ou les principes actifs. Le pouvoir de diffusion de ces derniers entre les chaînes de polymères contrôle leur libération, qui ne suit généralement pas une cinétique linéaire, sauf si on crée un gradient de concentration au sein de la matrice au moyen de plusieurs couches de concentrations différentes en principe actif.
Dans quelles situations cliniques ?
Tous les principes actifs ne sont pas éligibles à cette forme galénique. En effet, le principe actif doit présenter à la fois un faible poids moléculaire, être suffisamment lipophile pour pouvoir traverser la peau mais aussi assez hydrophile pour être capable de migrer de la matrice qui le contient.
Les systèmes transdermiques sont surtout utilisés dans le sevrage tabagique (nicotine), les douleurs sévères stables (Durogésic), l’angor stable (trinitrine - Nitriderm), la contraception féminine (Evra), le traitement hormonal substitutif de la ménopause (Femseptevo), certaines hormonothérapies (testostérone-Intrinsa, dans les baisses de désir sexuel chez les femmes ayant subi une ménopause chirurgicale et Testopatch dans l’hypogonadisme masculin par déficit en testostérone), la maladie d’Alzheimer (Exelon), la prévention du mal des transports (Scopoderm, également utilisé en soins palliatifs des râles agoniques).
D’autres domaines thérapeutiques devraient être concernés sous peu, comme la maladie de Parkinson et le syndrome des jambes sans repos (agonistes dopaminergiques).
Posologies recommandées chez l’adulte et plans de prise
- Climara : un dispositif délivrant 50 microgrammes/24 heures tous les 7 jours. Le schéma posologique peut être continu ou discontinu (durant 21 à 28 jours puis arrêt 2 à 7 jours).
- Cordipatch : un par jour, en commençant par 5 mg/24 heures ; la posologie peut être ensuite augmentée à 10 mg voire 15 mg/24 heures (application de 2 patchs, à 5 et 10 mg/24 heures). Afin d’éviter un échappement thérapeutique, il est recommandé de respecter un intervalle libre d’au moins 8 heures chaque jour entre l’enlèvement du patch en cours et l’application d’un nouveau patch (schéma 16/8).
- Durogésic : le choix de la posologie initiale est basé sur les antécédents d’utilisation de morphiniques, le dosage le plus faible étant 12 microgrammes/heure et le plus élevé 100 microgrammes/heure. L’activité de chaque patch dure en moyenne 72 heures.
- Evra : un patch par semaine ; le patch usagé une fois retiré doit être immédiatement remplacé par un nouveau à un jour fixe de la semaine, aux 8e et 15e jours du cycle, le changement pouvant être effectué du jour de changement prévu. La 4e semaine, à partir du 22e jour, est un intervalle libre sans patch.
- Exelon : un patch par jour. Le traitement doit être instauré avec le dispositif transdermique à 4,6 mg/24 heures ; après quatre semaines, la posologie peut être augmentée à 9,5 mg/24 heures.
- Femseptcombi : il s’agit d’un traitement hormonal substitutif de la ménopause séquentiel sans période d’arrêt. La posologie est d’un patch par semaine. Les patchs des deux premières semaines renferment uniquement de l’estradiol, et ceux des deux semaines suivantes une association d’estradiol et de lévonorgestrel.
- Femseptevo : ce produit constitue un traitement continu de la ménopause à raison d’un patch par semaine, sans période d’arrêt
- Intrinsa : 1 patch à 300 microgrammes/24 heures, deux fois par semaine, sans interruption ; en association à une estrogénothérapie
Nicopatch, Nicotinell, NiQuitin : 1 patch par jour. Le dosage (7, 14 ou 21 mg de nicotine/24 heures) devra être adapté à la réponse individuelle. Un traitement de 3 mois est conseillé (maximum 6 mois). Au cours de la manipulation, il est conseillé d’éviter le contact avec les yeux et le nez, ainsi que de se laver les mains après l’application.
- Scopoderm : en prévention du mal de transport, 1 patch fixé derrière l’oreille 6 à 12 heures avant le départ. L’efficacité se prolonge 3 jours et peut perdurer jusqu’à 12 heures après le retrait.
Mode d’emploi : les points clés
- L’effet thérapeutique d’un dispositif transdermique exige un délai plus important que par les autres voies, notamment digestives, car le taux plasmatique en médicament s’élève graduellement avant de se stabiliser.
Il se constitue lentement au sein de la peau un réservoir sous-cutané et c’est à partir de celui-ci que le produit passe dans le compartiment sanguin. Cela explique que l’effet du médicament reste stable un certain temps après changement du patch ; ce phénomène entraîne une élimination retardée en cas de surdosage ou d’un changement de traitement.
- Il faut alterner les sites d’application du patch pour éviter les irritations locales, en respectant un intervalle d’au moins une semaine entre deux applications au même endroit.
- La cinétique de libération du principe actif du patch est indépendante de la zone d’application, mais est dépendante de la circulation cutanée. Il est fortement recommandé de choisir des emplacements glabres (s’il est nécessaire de couper les poils, le faire avec des ciseaux plutôt qu’au moyen d’un rasoir pour éviter les micro-éraflures ou inflammations qui peuvent modifier la résorption), propres et secs (ne pas mettre de produit huileux ou gras avant d’appliquer un patch), en évitant les plis cutanés et les zones de frottements.
- Les patchs matriciels, mais jamais les patchs réservoirs, peuvent être éventuellement découpés pour adapter la posologie en cas de besoin. Dans ce cas, il est conseillé de rajouter un pansement adhésif afin d’assurer une bonne adhérence à la peau.
- Il est éventuellement possible de plier un patch en deux en repliant un des côtés actifs sur le dessus ; mais dans ce cas un dosage exact n’est plus garanti et la dose administrée peut varier d’une application à l’autre.
- Bien respecter les durées de poses ; par exemple 3 jours pour Durogésic, 16 heures pour Nitriderm, 1 semaine pour Climara.
- S’il n’est pas nécessaire d’enlever un patch pour prendre une douche, un bain ou nager, il est préférable d’éviter de savonner sur la zone où est fixé le patch.
- Il est déconseillé de recoller un patch qui s’est décollé, d’exposer un patch au soleil ou à une source de chaleur.
- Ne pas laisser à la portée des enfants ; y compris quand ils sont usagés.
- Attention aux phénomènes susceptibles d’accélérer temporairement la résorption du principe actif : fièvre, activité sportive, apport exogène de chaleur (bain chaud, bouillotte…)
Quelques cas particuliers
Personnes âgées
La résorption du principe actif peut être diminuée chez elles, en raison de modifications des tissus sous-cutanés (lipides, eaux.), ainsi que les variations de la température corporelle liées au vieillissement. Il est conseillé de commencer par une faible dose et de l’adapter progressivement en fonction des réactions obtenues.
Vigilance requise
Contre-indications absolues
Les patchs transdermiques doivent toujours être appliqués sur une zone de peau saine et jamais lésée (blessure, brûlure, dermatose).
Effets indésirables
Les effets indésirables des molécules actives présentées sous forme de patch sont a priori les mêmes que ceux pouvant être observés en cas d’administration par une autre voie.
Cela étant, la formulation transdermique expose, par nature à la possibilité de variations dans la vitesse d’absorption pouvant engendrer des pics non souhaités de passage dans l’organisme de la molécule active avec le risque d’un surdosage. Il convient d’être attentif à cette possibilité, notamment lorsqu’il s’agit d’un médicament à marge étroite, comme le fentanyl par exemple, et être tout particulièrement attentif à la survenue d’effets indésirables.
C’est ainsi qu’il faut avoir toujours présent à l’esprit que la vitesse de diffusion de la substance active à travers la peau peut varier très sensiblement chez les patients fébriles.
La tolérance locale, à type d’hypersensibilité, peut parfois poser problème avec survenue d’une dermite de contact, éventuellement associée à un prurit ou à un exanthème.
Les interactions médicamenteuses
Elles sont de même nature que celles pouvant être observées lorsque le médicament est utilisé par les autres voies d’administration systémiques.
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