HEUREUSEMENT, la réponse paradoxale aux bêta2 agonistes est un effet indésirable rare. Une étude américaine chez des sujets tabagiques, ou sevrés, âgés entre 45 et 80 ans, donne une première description de ce phénomène très peu étudié.
L’équipe dirigée par le Dr Surya Bhatt, de l’université d’Alabama, a utilisé les données d’une large étude multicentrique, la COPDGene Study, à savoir celles de près de 10 000 sujets blancs non hispaniques et Afro-Américains, ayant ou non une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). La survenue d’une réponse paradoxale a été évaluée à la spirométrie réalisée avant et après (12-20 minutes) inhalation de 2 pulvérisations de salbutamol, partant du principe qu’elle pouvait être infraclinique.
Alors que la réponse aux bêta 2 agonistes peut être absente dans la BPCO en raison d’une obstruction irréversible, ici, c’est bien l’aggravation de la fonction respiratoire qui a été mesurée. La réponse paradoxale était définie par une réduction d’au moins 12 % et 200 ml du volume expiratoire maximal seconde (VEMS) ou de la capacité vitale forcée (CVF) ou des deux. Les bronchoconstrictions, qui étaient souvent asymptomatiques, sont survenues dans 5 % des cas (n=453) au total, qu’il y ait une BPCO (n=198) ou pas (n=255). La survenue de bronchoconstrictions paradoxales était indépendamment associée à une plus forte morbidité respiratoire, avec davantage d’exacerbations bronchiques modérées et sévères, de dyspnée et une moins bonne tolérance à l’exercice. Il y avait plûtot moins d’emphysème à l’imagerie. La réponse paradoxale était deux fois plus fréquente chez les Afro-Américains.
Une morbidité respiratoire plus élevée.
Les mécanismes physiopathologiques à l’origine du phénomène restent inconnus, même si des agents propulseurs des inhaleurs et les conservateurs ont été évoqués par le passé. Pour les auteurs, la susceptibilité des Afro-Américains pourrait expliquer les atteintes plus graves par rapport aux sujets blancs ; ce qui, jusque-là, a souvent été mis sur le compte d’un statut socio-économique plus faible, d’un moindre recours aux services de santé mais aussi d’une plus forte susceptibilité génétique à l’obstruction des voies aériennes et à l’emphysème, à consommation tabagique égale. L’étude suggère des polymorphismes aux récepteurs bêta dans la population des Afro-Américains, une hypothèse soutenue par des données génétiques récentes.
L’arrêt en question.
Comme les auteurs le soulignent, de nombreuses questions sont posées et attendent des réponses. Vaudrait-il mieux arrêter les bêta2 agonistes chez les patients présentant des réponses paradoxales ? C’est l’avis exprimé dans l’éditorial écrit par deux pneumologues canadiens : « Un message central est que la réponse paradoxale aux bronchodilatateurs peut être associée à un mauvais pronostic et pour cette raison, pour certains patients, les bronchodilatateurs devraient être évités ». La réponse paradoxale est-elle modifiable et comment ? Tous les patients étaient fumeurs ou ex-fumeurs, les résultats sont-ils généralisables à une population à moindre risque de BPCO ? Le sous-groupe afro-américain correspond-il à un phénotype pertinent, compte tenu du faible nombre de sujets dans l’étude ? Et ces résultats constatés dans cette étude exclusivement américaine sont-ils transposables à des groupes ethniques noirs apparentés en Europe et dans les pays en développement ? Comme le concluent les éditorialistes, du décodage de ce « phénotype énigmatique » dépendra la mise au point de meilleurs traitements dans la BPCO.
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