LE RAPPORT a fait grand bruit. Fin novembre, une évaluation menée par l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) pointait les risques liés aux restrictions alimentaires des personnes en surpoids, qui constitueraient le tiers de la population française. En cause, les différentes méthodes de régime proposées, aux noms plus ou moins célèbres : Dukan, Fricker, Mayo, Montignac, Ornish, Weight Watchers… Selon l’agence, ces régimes peuvent être « néfastes » lorsqu’ils sont pratiqués sans le suivi d’un spécialiste. Des carences sont observées à long terme, contribuant à l’ostéoporose, à la fonte musculaire ou encore à l’insuffisance rénale. On peut également observer des perturbations du métabolisme énergétique et des troubles psychologiques. C’est notamment le cas au plan du comportement alimentaire. Lors de régimes répétés, un cercle vicieux se met en place, l’organisme tendant à se protéger du phénomène de manque dont il a été l’objet.
Un marché en recul.
Au final, l’ANSES tire deux conclusions aux termes de son rapport d’expertise. La première, c’est qu’un régime nécessite un accompagnement médical spécialisé et personnalisé. Seconde recommandation, les produits de régime hypocaloriques et les compléments alimentaires à visée amaigrissante devront être passés au crible de l’évaluation. En différant son jugement sur les aides à l’amaigrissement, l’agence ne lève pas le doute qui pèse sur ces produits, dont les ventes s’effritent depuis quelques années. Dans ce contexte, l’officine doit-elle encore leur accorder son crédit ? Oui, estime clairement le spécialiste en nutrition Loïc Bureau. Formateur en pharmacie et enseignant à la faculté de Rennes, il appelle les officinaux à faire le tri dans l’offre proposée, en se démarquant des discours marketing et en s’engageant dans une vraie démarche de prise en charge. Première précision, les encas ne doivent pas être pris pour des substituts de repas. Soumis à une réglementation stricte, ces derniers satisfont aux besoins de l’organisme en fibres, minéraux et vitamines. Ce qui n’est pas le cas des encas. Seconde remarque du spécialiste, les compléments alimentaires n’ont d’intérêt que s’ils sont associés à une bonne hygiène de vie. Les présenter comme seuls artisans de la perte de poids est trompeur, estime Loïc Bureau. « Dans un certain nombre de cas, il existe un écart très significatif entre allégations avancées et résultats obtenus », considère t-il. Par ailleurs, les plantes avec AMM, dont la légitimité s’appuie sur une utilisation traditionnelle, ne sont que des adjuvants des régimes hypocaloriques. Rien de plus.
Effet de la galénique.
Autre élément à considérer, les quantités de substances actives présentes dans les formules. « Très souvent, elles sont insuffisantes pour avoir un réel effet pharmacologique », souligne Loïc Bureau. La galénique entre aussi en ligne de compte. Pour les produits drainants, les tisanes, extraits fluides et extraits secs sont préférés aux poudres de plantes et extraits liquides dilués. Quant aux gommes et pectines, elles n’auraient pas l’effet de satiété qu’on leur attribue. Des études cliniques montrent qu’elles agissent favorablement sur la glycémie et la cholestérolémie (en complexant les sels biliaires). « Par leur effet de viscosité, elles ralentissent de trente minutes environ la vidange gastrique et empêchent l’action des enzymes digestives sur les aliments dans l’intestin grêle. » L’expert recommande la prise de 2 grammes de pectine, 2 à 3 fois par jour. Quant à la caféine, présentée comme un brûleur de graisses, elle présente surtout un intérêt en usage externe, estime le spécialiste en nutrition.
Médicaliser le discours.
Outre la conduite d’évaluations, l’ANSES prône, dans ses conclusions, la nécessité d’un suivi par des spécialistes. Médecins nutritionnistes et diététiciens sont cités. Mais pas les pharmaciens, alors que certains ont fait de la nutrition un axe de spécialisation. C’est le cas d’Alain Pestalozzi, titulaire à Avallon (Yonne). Aux personnes concernées, il propose la tenue d’entretiens de 15 minutes environ, à raison de 4 pendant 8 semaines. Ce suivi est facteur de réussite du régime. « C’est comme pour le sevrage tabagique, qui voit son taux de réussite doubler lorsqu’il y a un accompagnement. » La prise en charge débute toujours par une enquête approfondie des habitudes alimentaires. « Loin du langage des magazines féminins, il ne faut pas hésiter à médicaliser le discours sur le surpoids. On se positionne sur la prévention de troubles plus graves », témoigne Alain Pestalozzi. Il note que les clients sont souvent défiants vis-à-vis de cet accompagnement. « Environ six sur dix vont au bout de la démarche », confie le titulaire. Première explication, il n’est pas rare que le produit choisi, notamment pour sa nouveauté, soit finalement écarté par le pharmacien. Il tend aujourd’hui à préférer les références sous statut de dispositif médical, bénéficiant de la caution d’études cliniques. Force est de constater, par ailleurs, que les pharmaciens ne sont pas encore vraiment perçus comme des acteurs légitimes dans le domaine de la nutrithérapie. À eux de choisir s’ils veulent ou non s’y engager.
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