Nos intestins sont considérés pour beaucoup comme notre deuxième cerveau. Il faudrait plutôt parler de partenaire privilégié du cerveau.
Cerveau et système gastro-intestinal sont reliés par un câblage nerveux dense. Comme l’explique le Dr Gilles Mithieux, (INSERM U 855 « Nutrition, diabète et cerveau », Lyon), « 10 % des neurones du corps innervent la sphère gastro-intestinale, ce qui en fait la partie périphérique la plus innervée ». Cela permet de faire remonter au cerveau une grande quantité d’information pour en retour réguler nos fonctions de digestion et globalement notre comportement alimentaire.
Ces informations sont véhiculées par des hormones sécrétées pendant la faim, la prise alimentaire, le rassasiement et la satiété. On connaissait déjà bien le rôle, entre autres, de la ghréline, de la CCK, du GLP-1 et également de la distension mécanique de l’estomac. On sait désormais que certains nutriments jouent une importance capitale dans l’activation de systèmes coupe-faim plus spécifiques.
« Nous avons démontré que des nutriments produits par la digestion de protéines mais également de fibres induisent une synthèse de glucose intestinal », précise le Dr Mithieux (1,2). « Ces nutriments sont détectés par les nerfs périphériques de la veine porte qui vont transmettre un signal spécifique vers l’hypothalamus. En retour, le cerveau fait redescendre un signal qui aboutira à la synthèse de glucose intestinal », précise-t-il. Cette néoglucogenèse, que l’on croyait réservée au foie et aux reins, est un signal puissant de satiété à la suite d’un repas et qui permet de préparer au mieux l’organisme au repas suivant, y compris pendant la nuit. Pour le Dr Mithieux, « c’est au final un système qui vous permet d’avoir moins faim pour le repas qui va suivre ».
Néoglucogenèse intestinale
Ce phénomène se produit avec des régimes enrichis en protéines de tous types (viande, poisson, œufs, certains produits céréaliers), jusqu’à présent connus pour induire des effets de satiété sans pour autant qu’on en connaisse le mécanisme. Ces travaux ont montré qu’une partie des petits peptides produits dans le lumen lors de la digestion des protéines passent dans le sang pour se lier aux récepteurs µ-opioïdes de la veine porte pour induire la néoglucogenèse intestinale. « On savait déjà que ce récepteur régulait centralement la prise alimentaire en régulant les sensations de faim et de satiété, mais on ne savait pas qu’il agissait aussi au niveau de l’intestin », explique le Dr Mithieux. Cela a été confirmé chez les souris dépourvues de récepteurs µ-opioïdes périphériques chez qui le signal coupe-faim est aboli. « Le challenge est maintenant de pouvoir bloquer ces récepteurs µ-opioïdes de la veine porte pour réguler durablement la sensation de satiété, et de façon spécifique sans toucher aux récepteurs centraux », poursuit le Dr Mithieux. « Sollicités trop fortement, ces récepteurs peuvent devenir insensibles. Il faudrait donc trouver le meilleur moyen de les inhiber "modérément", afin de garder leur effet bénéfique à long terme sur le contrôle de la prise alimentaire », conclut-il. La néoglucogenèse intestinale se produit aussi à la suite de l’assimilation de fibres alimentaires fermentescibles dont on savait qu’elles induisaient également des effets bénéfiques sur la santé (obésité, diabète). Ainsi, les acides gras à courtes chaînes produits par le microbiote intestinal à partir de ces fibres (acétate, propionate, butyrate) vont se lier et activer les récepteurs FFAR présents dans le système gastro-intestinal : un signal va ainsi se propager par les nerfs vague et splanchnique et induire l’expression des gènes de la néoglucogenèse (2).
(1) A gut-brain neural circuit controlled by intestinal gluconeogenesis is crucial in metabolic health. Mol Metab (2015) , 4:106-117
(2) Microbiota-generated metabolites promote metabolic benefits via gut-brain neural circuits. Cell (2014) 156: 84-96
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