LE NOMBRE de personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde est imprécis en France : entre 400 000 et 600 000. Mais certaines souffrent de formes bénignes sans déformations articulaires, alors que d’autres présentent des lésions articulaires multiples progressant très rapidement par poussées inflammatoires, des nodules sous la peau et même des atteintes oculaires, pulmonaires ou cardio-vasculaires parfois graves. En partant des données de la CNAMTS de 2011, près de 240 000 personnes seraient actuellement atteintes de PR grave évolutive. Depuis l’arrivée du méthotrexate, puis des biothérapies, la majorité de ces malades ont vu leur qualité de vie s’améliorer grandement, et leur durée de vie rejoindre celle de la population générale. À cela plusieurs explications possibles, notamment l’effet bénéfique des médicaments sur les parois vasculaires qui diminue le risque d’infarctus et d’AVC, et une meilleure prise en charge globale des patients. « Le suivi régulier des patients traités, obligatoire, fait que la moindre anomalie, en rapport ou non avec la maladie et son traitement, est prise en charge rapidement », explique le Pr Maxime Dougados (service de rhumatologie de l’hôpital Cochin, Paris). Encore faut-il que le diagnostic et le traitement soient précoces… « La mise en route dans les 3 premiers mois qui suivent le début des symptômes permet d’éviter des destructions graves, invalidantes et irréversibles dans les 3 à 5 ans. »
À domicile.
Aujourd’hui, quand un malade ne répond pas ou insuffisamment au méthotrexate, le rhumatologue lui associe dans 99 % des cas l’un des cinq anti-TNF alpha existant sur le marché français, administrés en perfusion intraveineuse ou en injection sous-cutanée. Mais de nouvelles biothérapies ciblées sont également possibles, actives sur d’autres cytokines (les anti-IL1 et IL6) ou sur des cellules immunitaires comme les lymphocytes B (anticorps monoclonal anti-CD20). L’abatacept (Orencia) est, quant à lui, un modulateur sélectif de la costimulation des lymphocytes T. Indiqué, comme les autres biothérapies, en association avec le méthotrexate dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde modérée à sévère de l’adulte, il constitue une alternative aux anti-TNF alpha en cas d’effets secondaires, d’inefficacité ou d’échappement (10-15 % en échec primaire et 20-25 % dans les 2 ans). « Son mode d’action est différent et statistiquement, en cas d’échec, il marche mieux qu’un autre anti-TNF alpha », note le Pr René-Marc Flipo (service de rhumatologie du CHRU de Lille). L’abatacept a également obtenu une extension d’indication aux patients en échec au méthotrexate.
Disponible depuis 2007 par voie intraveineuse, administré à l’hôpital en perfusions de 30 minutes toutes les 4 semaines (après des doses de charge à 2 et 4 semaines), il l’est désormais aussi par voie sous cutanée, donc à domicile. « Les rhumatologues l’attendaient. En France, la voie sous-cutanée et la voie intraveineuse sont utilisées à parts égales, mais le choix dépend beaucoup du prescripteur, explique le Pr Flipo. Personnellement, je privilégie la voie sous-cutanée, plus souple et facile (le malade peut apprendre à se faire ses injections), moins coûteuse aussi pour l’Assurance-maladie (1 000 euros en moins environ par an et par malade). Mais c’est toujours après discussion avec le patient qui peut préférer la présence rassurante du médecin ou de l’équipe infirmière à l’hôpital. »
Efficacité et tolérance comparables.
Deux grandes études de phase III ont comparé l’efficacité et la tolérance de la nouvelle forme sous-cutanée d’abatacept à celles de la voie intraveineuse. L’étude pivot ACQUIRE (2010), menée en double aveugle pendant 6 mois, puis en ouvert, sur 1 400 patients « répondeurs inadéquats » au méthotrexate après au moins 3 mois de traitement, montre que les réponses obtenues dans le groupe ayant reçu des injections sous-cutanées hebdomadaires de 125 mg (76 %) sont comparables à celles du groupe abatacept intraveineux (75,8 %) et qu’elles se maintiennent à 32 mois, moyennant une tolérance similaire. L’étude AMPLE (2013), réalisée chez 646 patients atteints depuis au moins 5 ans de PR active modérée à sévère, également « répondeurs inadéquats » au méthotrexate et n’ayant jamais reçu de biothérapie, a comparé deux groupes de patients. Un groupe recevant chaque semaine 125 mg d’abatacept en sous-cutané et un groupe recevant 40 mg d’adalimumab sous-cutané toutes les 2 semaines, en association dans les deux cas au méthotrexate. Résultats : alors que les modes d’action sont différents (le deuxième est un anti-TNF alpha), la réponse à 1 an est similaire (64,8 % et 63,4 %) et l’efficacité maintenue à 2 ans. Le profil de tolérance est globalement comparable, mais on note plus d’infections graves sous anti-TNF alpha et davantage de pathologies dysimmunitaires sous abatacept, pas plus cependant qu’en intraveineuse.
Par ailleurs, l’étude ATTUNE montre que le basculement d’abatacept en IV à abatacept en sous-cutané n’entraîne pas d’augmentation des effets secondaires connus ni d’apparition de nouveaux effets indésirables.
Au vu de ces données, le pharmacien est à même de répondre à des questions pratiques que peuvent lui poser des patients. Par exemple « est-il possible de passer d’abatacept par voie intraveineuse à la voie sous-cutanée, plus souple ? »
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3 questions à…
Françoise Amouroux
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