Comment mieux soigner les cancers ? Les espoirs se tournent aujourd’hui vers la médecine de précision et la génomique des tumeurs. C’est un pas de géant dans cette direction que vient d’accomplir The Cancer Genome Atlas (TCGA), un gros consortium de recherche soutenu par les Instituts nationaux de la santé américains (NIH), à la fois par l’Institut du cancer américain (NCI) et l’Institut de recherche sur le génome humain (NHGRI).
Le PanCancer Atlas, présenté dans 27 articles de la revue « Cell », s’appuie sur l’analyse génomique détaillée de plus de 10 000 tumeurs dans 33 types de cancer. Ce vaste programme lancé il y a plus de 10 ans (2005) et financé à hauteur de 300 millions de dollars a mobilisé plus de 150 chercheurs dans une vingtaine d’instituts en Amérique du Nord.
C’est le premier projet de cette ampleur à caractériser les tumeurs au niveau moléculaire. D’autres lui ont emboîté le pas, notamment l’International Cancer Genome Consortium (ICGC) auquel la France participe avec le financement de l’INCa et de l’ITMO cancer.
Le PanCancer Atlas est divisé en trois grandes parties. Si le projet s’est attaqué en premier lieu à décrire une nouvelle classification selon la cellule d’origine, les chercheurs ont aussi travaillé à décrire les processus oncogéniques (mutations héréditaires et somatiques, génome tumoral et épigénétique, environnement tumoral et immunité) et les voies de signalisation oncogéniques (cycle cellulaire, apoptose, croissance cellulaire). Chaque partie se décompose en un article principal faisant la synthèse sur le sujet et en plusieurs « articles compagnons ».
Précédemment en 2013, le PanCancer Atlas avait montré qu’il existe différents sous-types moléculaires pour une même localisation anatomique. Ici, dans la première partie, l’analyse révèle que certains cancers d’organes différents mais dérivant du même type cellulaire sont très semblables. Par exemple, des cancers épidermoïdes de la tête et du cou, du poumon, de la vessie, du col de l’utérus et de l’œsophage ont de fortes similitudes et sont groupés ensemble.
Une complexité croissante
Les résultats montrent que, indépendamment du site anatomique d’origine, les 33 types de cancer pourraient être reclassifiés en 28 types moléculaires, appelés « clusters ». Près de deux tiers de ces clusters sont considérés comme hétérogènes, car ils regroupent jusqu’à 25 types histologiques tumoraux différents, traditionnellement traités de façon différente.
Certains types tumoraux restent définis par leur localisation anatomique. Des cancers de la même sphère d’organe, comme les cancers gastriques, du côlon et du rectum, partagent aussi des similitudes moléculaires. D’autres organes abritent une diversité très large de sous-types moléculaires, comme le rein.
« La localisation de la tumeur a été la première méthode pour déterminer le traitement d’un cancer donné d’un patient, explique Katherine Hoadley, du département de génétique de la faculté de médecine UNC et coauteur correspondant. Cette étude nous aide à mieux comprendre les relations entre et au sein de différents types tumoraux. Si les tumeurs sont génétiquement diverses au sein d’un organe, nous devrions repenser la façon dont on les traite ».
Des essais cliniques guidés par la génomique
Ces résultats suggèrent aussi que des traitements habituellement donnés dans certains types de cancers pourraient être testés dans des tumeurs proches sur le plan moléculaire. Le PanCancer Atlas pourrait encourager les oncologues à inclure des patients dans de nouveaux essais cliniques guidés par la génomique, dits « umbrella » ou « basket ».
Mais le PanCancer Atlas suggère également de réinterpréter les données des essais cliniques passés à la lumière de la génomique. « Nous aurons une puissance statistique incroyable pour identifier les raisons pour lesquelles des patients sont répondeurs à certains médicaments et d’autres non », explique le Pr Li Ding, oncologue à l’université de Washington et co-auteur.
Le séquençage génomique ne peut tout expliquer à lui seul. Le micro-environnement tumoral, notamment l’interaction avec les cellules de l’immunité, est une piste développée dans la deuxième partie. Le PanCancer Atlas se prononce en faveur de la tendance grandissante à vouloir élargir une immunothérapie à d’autre types de cancer proches sur le plan moléculaire. Autre piste thérapeutique, des médicaments utilisés hors cancer pourraient être testés, est-il suggéré dans la troisième partie alors qu’une suractivation de la voie JAK/stat, habituellement décrite dans la polyarthrite rhumatoïde, a été retrouvée dans certains clusters. Un symposium organisé par le TCGA aura lieu les 27 au 29 septembre 2018 à Washington.
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