LE SILENCE ne s’invente pas, il se fait, puis se déguste comme le plus rare des mets. Certains l’attendent longtemps, d’autres le désirent sans même le savoir. Lourd handicap pour ceux qui ne l’ont pas choisi, il peut gêner, effrayer, voire désespérer. Mais, pour la plupart, le silence est précieux, fantastique privilège pour lequel nous sommes prêts à payer. Et cher ! Pourtant, le concours de deux hommes va, au sortir de la Première Guerre mondiale, rendre ce luxe accessible à tous. Le premier des protagonistes est un pharmacien parisien du nom de Pascal. Comme tous ses confrères, il est habitué à fabriquer, à la demande, de petits bouchons de cire à introduire dans l’oreille pour isoler du bruit. Sa formule, pour autant, diffère de celles communément employées.
Plusieurs cires minérales, en effet, entrent dans la composition des petites « sourdines », comme on a coutume de nommer les protections auditives à l’époque, confectionnées par le pharmacien. La formule, on peut le dire, est innovante et performante. Deux évidences qui sautent aux yeux de Maurice Henry-Lepaute, industriel installé lui aussi dans la capitale et qui va faire l’acquisition des singuliers bouchons et de leur remarquable recette. Et, pour celle-ci, il y a matière à s’employer. S’isoler du bruit est en effet presque une nécessité à une époque où parler de nuisances sonores est un euphémisme : klaxons des toutes jeunes mais déjà nombreuses automobiles, cloches qui sonnent à la volée dans les églises, tapage des trains à l’arrivée comme au départ… L’aube des années folles est décidément bruyante. Pour Maurice Henry-Lepaute, il y a là un marché à prendre ! Et dont il s’empare à peine sa découverte réalisée. C’est ainsi que, en 1921, il fonde sa société à laquelle il donne tout simplement le nom du produit dont elle se fera, des années durant, l’ambassadrice. Épousant la forme de petites sphères, c’est tout naturellement que les protections auditives sont appelées « boules », terme auquel l’industriel adjoint le mot latin « Quies » dont la traduction est sans équivoque : calme, tranquillité, quiétude. On est au cœur du sujet… Les Boules Quies, marque et raison sociale, viennent de voir le jour.
8 millions d’unités.
Ainsi naît un géant de la sphère auditive, mais un géant dont la hauteur n’a d’égale que la valeur. Car le produit, destiné à protéger le conduit auditif du bruit, mais aussi de l’eau, est rapidement distingué pour ses qualités d’hygiène et de sécurité. D’une part, la matière totalement inerte dont sont faites les petites sphères empêche tout développement bactérien ; d’autre part, la cire qui les compose intègre une part de coton qui évite au matériau de se déliter dans l’oreille, la préparation finale étant elle-même lovée dans une trame de coton (à retirer avant utilisation) qui garantit une parfaite hygiène. De nombreux concours consacrent le dispositif qui remporte, entre autres, le grand prix de l’Exposition nationale de Marseille, le diplôme d’honneur de l’Exposition de pharmacie à Mulhouse et le diplôme d’honneur de l’Exposition des produits pharmaceutiques de Paris. Le tout entre 1922 et 1935. Des distinctions dont l’ingénieux industriel sait sûrement se servir pour rappeler l’intérêt de ses sourdines à ses compatriotes. Grand communiquant avant l’heure, Maurice Henry-Lepaute sait en effet parfaitement utiliser les outils d’information. Il relaie le lancement de son produit par le biais d’encarts publicitaires dans la presse et n’oublie pas de diffuser tous les témoignages qui le mettent en valeur et qu’il recueille de la bouche de personnages célèbres.
La qualité des boules Quies et leur performance avaient, dès leurs débuts, conquis le public, mais la notoriété acquise leur fait atteindre les sommets. De 45 000 unités vendues en 1921, elles sont diffusées à hauteur de 8 millions en 1960. Il faut dire que, en ces « temps modernes », la mécanisation sonne le glas des fabrications artisanales… Et offre aux productions une formidable impulsion. Ainsi, les boules Quies vont-elles quitter la main chaleureuse des ouvrières à domicile qui, jusqu’à présent, les confectionnaient à partir des plaques de pâte qu’on leur fournissait. Une fois amollie à l’aide de petits réchauds, la matière devenait parfaitement malléable au contact de la peau et prenait facilement la forme de petites boules adaptables au conduit auditif. Tout d’abord conditionnées dans une boîte en aluminium ornée d’un épervier aux ailes déployées, elles seront habillées de carton pendant la guerre avant de rejoindre un étui de plastique.
Longtemps, les Boules Quies restent le seul joyau de la société éponyme qui, bien plus tard, adoptera le seul nom de Quies. La première référence qui succède aux célèbres bouchons est un masque noir de relaxation, destiné à protéger les yeux de la lumière. Le repos et le calme sont une nouvelle fois à l’honneur. Nous sommes alors au cœur des années 1950 et il faudra attendre la toute fin du millénaire pour voir, entre autres, l’émergence de deux gammes de produits et de soins entièrement consacrés au conduit auditif.
Génération future.
On ne laisse pas un si beau succès sans relève et la seconde génération des produits Quies va se révéler foisonnante. C’est l’hygiène de l’oreille qui prend tout d’abord la main avec le bâtonnet de nettoyage du conduit auditif Otospoon à la double action (côté coupelle, côté coton). Il sera secondé, par la suite, d’une solution auriculaire Docuspray à base d’oligo-éléments et d’une préparation pour la prévention et le traitement des bouchons de cérumen, Doculyse. La protection auditive varie aussi les plaisirs, en commençant par sa référence phare dont la formule n’abrite désormais que des cires naturelles : protections auditives earPlanes qui régulent le passage de l’air dans l’oreille pour lutter contre les différences de pression dans les avions, protections en mousse de polyuréthane - matériau qui propose une valeur d’affaiblissement du bruit supérieure à la cire, bandeaux d’oreilles, protections en silicone souple munies d’une cordelette pour les retirer et les remettre facilement, protections en silicone malléable vouées à protéger l’oreille en milieu aquatique et qui se placent à l’entrée du conduit afin d’empêcher le passage de l’eau sans gêner l’audition. Mais là ne se borne pas l’élan productif de Quies qui investit également le champ du ronflement et celui de l’ophtalmologie. Le premier occasionne le lancement d’un spray anti-ronflement et celui de pastilles à la même visée ; le second confirme l’ébauche de ligne amorcée dans les années 1950 par le masque noir de relaxation : lingettes apaisantes pour les yeux fatigués, solution multifonctions pour lentilles de contact souples (Optik).
En tout, ce sont une vingtaine de références qui composent les différentes gammes Quies dont l’objectif est centré sur la résolution des petits tracas ORL et ophtalmologiques de la vie quotidienne à l’aide de dispositifs innovants et faciles à utiliser. Pour autant, le fabricant est bien conscient des nombreux défis, petits et grands, qui lui restent encore à relever dans ses domaines de prédilection, la protection des yeux, celle des oreilles et la problématique du ronflement. Une mission qui n’étouffe pas sa volonté d’innover en explorant des voies inédites – la petite traumatologie, avec le lancement prévu en mai prochain de lingettes contre les bleus et bosses - ou encore en franchissant de nouvelles frontières – 25 % du chiffre d’affaires de la marque est réalisé à l’étranger, principalement en Europe. L’avenir de Quies devrait faire du bruit ! Toutes les oreilles sont à l’écoute…
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