SELON différentes études, l’incidence des ADP chez les patients cancéreux recevant un traitement de fond opioïde pour des douleurs chroniques reste élevée, avec une variabilité de 23 % à 89 %. Près de deux tiers des patients rapportent que leurs ADP ne sont pas contrôlés de manière adéquate et qu’ils ont un impact douloureux insupportable sur leur qualité de vie. Le pic d’intensité douloureux est atteint en moins de trois minutes, et la douleur dure moins de trente minutes dans la majorité des cas. Un patient peut vivre plusieurs ADP dans une même journée. « La cinétique de l’ADP est très individuelle et il n’existe pas d’éléments prédictifs, précise le Pr Alain Serrie (hôpital Lariboisière, Paris). La prise en charge est individuelle et personnalisée, on cherche à stabiliser en priorité la douleur de fond en augmentant si besoin les doses. Il faut bien différencier l’ADP d’une douleur d’apparition spontanée due à une fin de dose du traitement de fond ou à un traitement de fond mal équilibré, à une douleur liée à l’évolution de la maladie, ou à un échappement thérapeutique. Ces accès sont indépendants de la dose et du rythme d’administration du traitement de fond. Ils sont soit spontanés et imprévisibles, soit prévisibles avec des facteurs déclenchants bien identifiés (marche, effort, prise de nourriture, miction…) » Seulement 11 % des patients souffrant d’ADP prennent des médicaments supplémentaires (antalgiques ou opioïdes faibles) pour les traiter, et 9 % souffrent tous les jours. Parmi les patients traités pour leurs ADP, seul un patient sur quatre prend du citrate de fentanyl. En pratique, la morphine n’est pas adaptée, surtout en première intention, la prise en charge des ADP repose sur un traitement opioïde d’action courte. La forme orale couramment utilisée a une efficacité limitée en raison d’une biodisponibilité modérée et d’une galénique peu adaptée pour des personnes ayant des difficultés à avaler ou des troubles gastro-intestinaux. « Les nouvelles spécialités transmuqueuses apportent des bénéfices très importants, souligne le Dr Laurent Baron, intervenant dans un réseau de soins palliatifs à Tarbes. La cinétique de ces médicaments se superpose à la cinétique d’évolution des ADP. De plus, les formes transmuqueuses n’ont pas les risques infectieux des traitements injectables et améliorent l’autonomie et l’observance du patient. »
Une innovation technologique
La galénique de Breakyl repose sur la technologie BEMA (BioErodible MucoAdhésive). Ce système de délivrance est conçu pour permettre un passage direct de fentanyl dans la circulation sanguine. Sa biodisponibilité absolue est de 71 % : environ 51 % de la dose totale de Breakyl sont absorbés rapidement par la muqueuse gingivale. Cette technologie est matérialisée par un film orodispersible rectangulaire de 263 µmètres comprenant deux faces. La face rose bioadhésive contient le citrate de fentanyl, elle adhère à la muqueuse buccale de la joue en cinq secondes et délivre une dose uniforme et précise de fentanyl. La face blanche inactive minimise la libération du principe actif dans la salive et limite sa déglutition. La dissolution du film est habituellement complète dans les quinze à trente minutes sans laisser de résidu. « La dose efficace est obtenue par titration en fonction du profil de tolérance. La dose initiale doit être de 200 µg, elle est augmentée progressivement conformément à la gamme des dosages disponibles (200, 400, 600, 800 et 1 200 µg) jusqu’à l’obtention de la dose efficace, indique le Dr Élie Iatcheva (directeur médical Meda Pharma). L’utilisation de Breakyl est limitée au maximum à quatre fois par jour et les prises doivent être espacées d’au moins quatre heures. » Les avantages de cette forme galénique sont sa rapidité d’action, sa simplicité d’utilisation par le patient qui n’intervient que lors de la pose du film, la gestion éventuelle d’effets secondaires (retrait possible et rapide du film). Le fentanyl est un stupéfiant, sa prescription est faite sur ordonnance sécurisée et limitée à 28 jours. Les différents dosages de Breakyl sont remboursés par la Sécurité sociale au taux de 65 %.
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