Le cancer devient une maladie chronique traitée de plus en plus en ambulatoire. Elle pose le problème de la bonne observance et du suivi des traitements à l'officine. Comme tout professionnel de santé, le pharmacien doit développer une double compétence. La compétence technique permet de prendre en charge la maladie et son traitement. La compétence psychologique consiste à prendre en charge le malade en tant qu'être humain. La difficulté est de mettre en place une relation forte tout en apportant une information technique. « L'Oncoguide » (voir encadré) aborde à la fois ces dimensions thérapeutique et psychologique*, avec en toile de fond l'éducation thérapeutique du patient, l'approche oncologique intégrative et la vision élargie des soins de support sur prescription médicale ou à délivrance officinale hors prescription.
Savoir faire et faire ensemble
La recherche fondamentale et médicale a beaucoup progressé et les schémas des traitements ont été bouleversés. L'évolution des moyens touche tous les domaines : chirurgie, radiothérapie, imagerie chimiothérapie. De nouvelles classes de médicaments sortis de la réserve hospitalière nécessitent, en raison de leur technicité, que le pharmacien acquiert de nouvelles connaissances. Elles portent autant sur les produits eux-mêmes (délais de prescription, modes de dispensation, protocoles d'utilisation, effets secondaires) que sur les pathologies. La prise en charge doit être multidisciplinaire pour synchroniser toutes les thérapies concernées et évoluer vers un traitement transversal décloisonné du cancer et des malades. Avec le développement de l'ambulatoire, l'oncologie intégrative s'impose avec des soins coordonnés et de qualité témoignant d'un vrai partenariat entre le pharmacien, le médecin et l'hôpital. Ces soins interviennent dès le diagnostic initial ou celui de la rechute et demandent une implication croissante des équipes officinales.
Le pharmacien devient un relais thérapeutique pour poursuivre une consultation qui n'a pas forcément été complète. D'autre part, il constitue un maillon important pour faire remonter des informations concrètes de terrain et des observations médicales pour enrichir le dossier médical partagé (DMP) et le dossier pharmaceutique (DP). L'éducation thérapeutique des patients (ETP) à l'officine est également nécessaire sous la forme d'un programme personnalisé ; la relation doit être un partage de savoirs. Mais le pharmacien ne sait pas tout et ne peut pas tout savoir, il doit rester en contact permanent avec le prescripteur en ville et/ou les équipes soignantes hospitalières. C'est essentiel aussi bien en termes de performance des traitements que de maîtrise des risques iatrogènes au prorata de l'objectif de soin défini.
Du pharmacien d'officine au pharmacien clinicien
Les effets secondaires parfois très lourds sont un autre défi que le pharmacien doit apprendre à relever avec son patient pour ne pas compromettre l'efficacité des traitements anticancéreux. Il doit l'aider à s'y préparer et le motiver pour tolérer les doses optimales prescrites malgré les effets indésirables. En expliquant leur survenue potentielle lors de la délivrance, le pharmacien peut favoriser leur anticipation et leur acceptation, d'autant que ces effets sont de mieux en mieux gérés grâce aux soins de support en oncologie. Intégrés en coprescription dans le protocole d'oncologie personnalisé, ces soins (médicaments antiémétiques, antianémiques, sétrons, corticoïdes…) sont déterminants dans la prise en charge avant, pendant et après les traitements (chimiothérapie, radiothérapie). Ils nécessitent une collaboration étroite entre tous les professionnels de santé dans le cadre de la conciliation médicamenteuse pour sécuriser le parcours de soins en repérant d'éventuelles interactions médicamenteuses. Le pharmacien d'officine a toute légitimité à les coordonner pour peu qu'il assume son rôle de pharmacien clinicien. En acquérant cette expertise, il peut accompagner le patient dans la gestion des symptômes comme la fatigue, la douleur, les vomissements, la constipation, la diarrhée, la perte de poids. En fonction des sensibilités du patient, il peut proposer d'autres alternatives comme l'homéopathie ou la phytothérapie. Le point fondamental repose sur la confiance que la personne concernée a dans le soin proposé et la façon dont le pharmacien lui délivre.
* Seule la dimension thérapeutique est traitée dans cet article. La dimension psychologique fera l'objet d'un prochain article.
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