DES URGENTISTES et des épidémiologistes de l’hôpital de Providence (état de Rhode Island) et de l’université Stanford (Californie) ont montré qu’une prescription médicale initiale a été retrouvée dans 67,8 % des quelque 135 971 admissions hospitalières en urgence pour intoxication aiguë par opiacé aux États-Unis en 2010. Cette intoxication pèse de façon très significative sur le système de santé américain : les décès induits par les intoxications aiguës liées aux médicaments et aux drogues ont augmenté de 117 % entre 1999 et 2012 et 72 % d’entre eux sont dus à un opiacé. Selon le CDC, 114 personnes décèdent chaque jour d’une intoxication aiguë par médicament ou drogue, ce qui constitue la première des causes de décès accidentel chez l’adulte !
259 millions d’ordonnances.
De tels chiffres pourraient-ils être retrouvés en France ? Cela serait difficile à imaginer car la majorité des overdoses recensées relèvent d’une prescription d’opiacé(s) mal encadrée ou délivrée à une population peu apte à gérer un usage raisonné d’antalgiques de palier III tels l’oxycodone, l’hydrocodone ou la méthadone (indiquée, rappelons-le, comme substitut opiacé mais aussi comme antalgique aux États-Unis) : en 2012, les médecins américains ont rédigé 259 millions d’ordonnances pour des opiacés. D’usage illégal, l’héroïne est, quant à elle, en cause dans seulement 16,1 % des cas ; une association de plusieurs opiacés est retrouvée dans 2,7 % des admissions et une intoxication aiguë associée par benzodiazépines chez environ 22 % des patients. Toujours selon le CDC, les prescriptions abusives d’opioïdes ont coûté plus de 55 milliards de dollars en 2007 : 46 % en déficit d’activité des salariés, 45 % en soins médicaux et 9 % en frais de justice.
L’étude épidémiologique retrouve parmi les victimes d’intoxication une forte proportion de patients présentant des pathologies respiratoires chroniques, des troubles de l’humeur ou une alcoolodépendance - ce qui suggère que la prescription d’opioïdes devrait rester prudente chez ces sujets -.
Le taux de décès est inférieur à 2 % lorsque les patients sont pris en charge dès les premiers signes d’intoxication, ce qui souligne la nécessité de faciliter l’accès aux structures de soins à tous les usagers d’opiacés. Les lois dites du « Bon Samaritain », adoptées par vingt états, ont amélioré une situation devenue critique : les victimes, proches ou témoins appelant des secours face à une intoxication aiguë sont protégés d’éventuelles poursuites pour usage ou trafic de stupéfiants. Des mesures plus spécifiques sont prises dans certains états : ainsi, à Rhode Island et à Newport, il est possible de se procurer librement en pharmacie des kits de naloxone permettant d’inhaler immédiatement l’antidote en cas d’overdose. Mais, pour Michael Yokell, professeur à Stanford, comme pour de nombreux autres médecins, la seule mesure réellement efficace serait de mieux encadrer l’accès aux opioïdes…
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