« C'EST LE PREMIER facteur de transcription découvert qui contrôle la formation et la maturation des améloblastes, les cellules sécrétant l'émail », souligne le Pr Chrissa Kioussi (Oregon, États-Unis). Son équipe a dirigé un travail en collaboration avec deux chercheurs français, Daniel Metzger et Jean-Marc Bornert (IGBMC, université de Strasbourg, Illkirch). « Il n'est pas rare pour un gène d'avoir de multiples fonctions, mais jusqu'ici nous ignorions que celui-ci régulait la production de l'émail dentaire. »
Les dents se forment à partir de deux types de cellules : les odontoblastes et les améloblastes. Les odontoblastes vont synthétiser la dentine (ou ivoire), les améloblastes produisent l'émail. Une fois l'émail formé, mais avant que la dent apparaisse, les améloblastes disparaissent. Par conséquent, l'émail détruit, par action des bactéries (carie) ou par blessure, ne peut être renouvelé.
Les chercheurs se sont demandés si la souris knock-out pour le gène Ctip2 (Ctip2-/-) présente un trouble du développement dentaire, car ce gène est fortement exprimé dans les tissus dentaires d'origine ectodermique. Ces mutations sont létales après la naissance, mais n'empêchent pas l'examen du développement dentaire. De fait, chez ces souris existent des ébauches de dents, mais totalement dépourvues de couverture d'émail. Leurs améloblastes présentent des anomalies de structure (petite taille, mauvaises polarisation et adhésion) et de distribution. Ils ne synthétisent pas suffisamment de protéines indispensables à la formation de l'émail (amélogénine, améloblastine et enaméline).
Le développement des améloblastes.
Ctip2 apparaît réguler l'expression des gènes encodant certaines de ces protéines, ainsi que des facteurs de transcription précédemment impliqués dans la différenciation des améloblastes et la formation de l'émail. Ctip2 se situe ainsi en amont du réseau des gènes impliqués dans le développement des améloblastes.
« Pour pouvoir développer une stratégie de régénération dentaire à partir de cellules souches, il faudra parvenir à une compréhension sophistiquée du réseau de signal et de régulation du dépôt d'émail, supérieure à notre connaissance actuelle », précise au « Quotidien » le Pr Chrissa Kioussi. « Ctip2 est un régulateur de transcription qui joue un rôle crucial dans la différenciation et/ou le maintien de la lignée des améloblastes. Le modèle des souris KO en Ctip2 aidera à élucider la base moléculaire de la formation de l'émail dentaire ».
Il pourrait alors être possible d'utiliser les cellules souches pour réparer et restaurer l'émail endommagé, voire régénérer ou construire des dents. Certaines équipes sont déjà parvenues, chez l'animal, à régénérer la pulpe et la dentine (mais non l'émail) en réactivant des cellules souches dans la pulpe des dents. « Il reste beaucoup de travail avant de déboucher sur des applications chez l'homme, mais cela devrait marcher, estime C. Kioussi. Nous aurions là une approche entièrement nouvelle à la santé dentaire ».
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