« NOUS AVONS découvert un nouveau principe de médicaments anxiolytiques d’action rapide dépourvus des effets secondaires des benzodiazépines », explique au « Quotidien » le Pr Rainer Rupprecht (Munich, Allemagne), qui a dirigé le travail. « De plus, nous avons développé un modèle translationnel pour évaluer de nouveaux médicaments anxiolytiques… Les études cliniques du chef de file, le XBD173, ou des composés de réserve, les backup, peuvent débuter. Nos prochains objectifs seront de conduire des études cliniques de phase II, de développer des composés de réserve, et de découvrir d’autres indications. »
L’anxiété étant une hyperactivité neuronale, augmenter la transmission du principal neurotransmetteur inhibiteur, le GABA, représente une approche de choix pour le contrôle de l’anxiété pathologique. C’est ainsi qu’agissent les benzodiazépines. Elles ont une action rapide, mais entraînent des effets secondaires (sédation entre autres) et, en traitement prolongé, posent des problèmes de tolérance, voire de sevrage.
Une étude dirigée par le Pr Rainer Rupprecht (Munich), avec la collaboration de chercheurs de Biotrial (Rennes), Novartis (Bâle) et Hoffmann-La Roche (Bâle), suggère une nouvelle cible pharmacologique pour des anxiolytiques. Elle identifie un chef de file.
Les neurostéroïdes endogènes.
Les benzodiazépines se fixent sur des sites spécifiques des récepteurs-canaux GABA-A et majorent l’effet inhibiteur du GABA. Les neurostéroïdes endogènes modulent également de façon positive les récepteurs GABA-A, via un site différent, ils exercent ainsi des effets anxiolytiques chez l’animal. Ils sont donc considérés comme des anxiolytiques endogènes.
Ces neurostéroïdes sont synthétisés dans les neurones et les cellules gliales, à partir du cholestérol importé dans la mitochondrie par la protéine transporteuse TSPO (Translocator Protein of 18 kDa). Cette protéine initialement appelée récepteur périphérique ou mitochondrial des benzodiazépines, a été rebaptisée TSPO car elle fixe d’autres molécules, dont le cholestérol. Elle est également présente à faible concentration dans le cerveau. La plupart des benzodiazépines se lient à elle, elles stimulent le transfert du cholestérol et par conséquent la neurostéroïdogenèse.
Rupprecht et coll. ont étudié la molécule XBD173, un ligand se fixant à TSPO, qui ne se fixe pas aux récepteurs GABA-A, ni à d’autres récepteurs de neurotransmetteurs. Ils montrent que ce ligand augmente la neurotransmission gabaergique (majorant l’effet inhibiteur du GABA) ce qui induit la neurostéroïdogenèse.
Attaque de panique induite.
Chez le rat, XBD173 exerce un effet anxiolytique aigu dans les tests d’exploration sociale et
du labyrinthe. Cette action est bloquée par un antagoniste de TSPO). Il prévient aussi, sans effet sédatif, l’attaque de panique induite expérimentalement par l’injection de lactate ou de CCK-4. Aucune intolérance n’apparaît pendant cinq jours de traitement.
L’effet du XBD173 a aussi été étudié chez 71 hommes volontaires sains soumis à une attaque de panique provoquée par le CCK-4. Après randomisation ils recevaient pendant sept jours l’un des cinq traitements suivants : placebo, XBD173 à la dose de 10, 30, ou 90 mg/j, ou une benzodiazépine (2 mg/j), avant d’être exposés à nouveau à la provocation par le CCK-4.
Cette étude montre que le XBD173 (à la dose la plus élevée), ainsi que la benzodiazépine, atténuent l’anxiété induite, par rapport au placebo. Le XBD173 ne paraît pas entraîner d’effets indésirables, contrairement à la benzodiazépine (somnolence et étourdissement), ni de symptômes de sevrage.
Les auteurs concluent que les ligands de TSPO se montrent des « candidats prometteurs comme anxiolytiques d’action rapide, avec moins d’effets secondaires que les benzodiazépines ».
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