• Les antiviraux directs.
Parmi les médicaments testés actuellement, certains sont déjà connus, voire très connus :
La lamivudine, agréée dans le traitement de l’infection par le VIH (Epivir) et le VHB (Zeffix), a été administrée avec un certain succès à plusieurs patients très récemment infectés ; des patients traités plus tardivement n’ont pas survécu.
Le favipiravir (T-705), un antiviral du laboratoire japonais Toyama également développé par l’américain Medivector (Boston), inhibe l’ARN-polymérase. Il a été agréé en mars dernier au Japon dans le traitement de l’infection par le virus influenza (Avigan 200 mg) mais il s’est aussi révélé actif contre de nombreux autres types de virus dont Ebola : les stocks mondiaux seraient suffisants pour traiter quelques milliers de patients. Récemment, il a été administré à certains sujets infectés, dont l’infirmière soignée avec succès en France - sans que l’on sache, en l’absence d’essais plus larges, s’il est à l’origine de sa guérison ou si elle la doit simplement aux soins de support -.
D’autres antiviraux en cours d’expérimentation, souvent dans des types d’infections bien différentes, font montre d’une activité ciblant également Ebola :
Le brincidofovir (Brinci, BCV, CMX001) de la firme américaine Chimerix est une prodrogue du cidofovir, est un antiviral oral de spectre large, dirigé contre de nombreux virus à ADN. Déjà testé (phase III) dans les infections à cytomégalovirus et à adénovirus où il a fait preuve d’une relative innocuité, il constitue un candidat au traitement contre l’infection par Ebola. Il a quant à lui été administré à Ashoka Mukpo traité dans l’Omaha comme il l’avait été à Thomas E. Duncan décédé à Dallas mais n’avait jusqu’alors été testé que sur des cultures virales de ce virus. Ce médicament a l’avantage d’une suffisante disponibilité.
Le TKM 100-802, un dérivé du TKM-Ebola produit par la société canadienne Tekmira Pharmaceuticals, a été administré à quelques patients. Il est formé de nanoparticules vésiculaires lipidiques contenant des ARN interférents permettant notamment d’inhiber la polymérase virale : il s’est révélé très actif sur les singes qui ont été traités. Cependant, des soucis portent sur sa tolérance et expliquent que la FDA n’autorise pas d’essai à grande échelle sur l’homme : son innocuité serait meilleure à des doses faibles préservant son activité si toutefois il peut être injecté précocement après le contage. Il n’est cependant disponible qu’en quantités extrêmement limitées.
Le FGI-106, un antiviral à spectre large dirigé contre les virus enveloppés à ARN, inhibe leur entrée dans la cellule. Il a une activité préventive et curative sur modèle animal à l’égard des bunyavirus et de divers autres virus vecteurs de fièvres hémorragiques dont Ebola et Marburg.
Conçu initialement comme anti-VHC, le BCX-4430 pourrait également faire parler de lui prochainement en raison d’une activité potentielle contre Ebola…
Enfin, à long terme, des recherches ont permis d’isoler des molécules, comme le LJ001, un dérivé de la rhodanine, qui pourraient constituer des antiviraux de très large spectre empêchant l’entrée des particules virales dans les cellules cibles.
• L’immunothérapie.
Le recours aux transfusions sanguines (sérothérapie) devrait, selon l’OMS, constituer une priorité essentielle dans les pays contaminés. Même s’il n’existe aucune preuve qu’elles soient efficaces, le principe est de transfuser le sang d’un individu ayant survécu à l’infection à un sujet malade dans l’espoir que les anticorps auront une action protectrice, au moins partiellement. Ainsi, Kent Brantly a reçu une transfusion d’un adolescent survivant avant d’être évacué du Libéria ; ayant survécu, il a lui-même donné son sang à trois autres Américains : le docteur Richard Sacra, le cameraman Ashoka Mukpo et l’infirmière de Dallas Nina Pham.
Au-delà de la sérothérapie, la purification d’immunoglobulines, l’isolement d’anticorps et leur production par génie génétique pourrait constituer une solution plus aisée à mettre en œuvre puisqu’elle affranchit de la compatibilité entre donneur et receveur. De plus, en zone tropicale et démunie, elle évite le risque d’une contamination par le VIH ou le paludisme. Ceci justifie le développement de sérothèques au sein des communautés concernées par l’épidémie.
ZMapp, produit en collaboration par Mapp Biopharmaceuticals et LeafBio (San Diego) et Defyrus Inc. (Canada), associe trois anticorps monoclonaux humanisés (dont les anticorps MB-003 et ZMab) dirigés contre les protéines constitutives de la paroi externe d’Ebola. Ce médicament prometteur est efficace sur modèle animal en prophylaxie post-exposition lorsqu’il est injecté (IV) dans 24 à 48 heures (peut-être les 5 jours) suivant le contage. Il fait l’objet depuis début septembre d’un petit essai clinique et une poignée de patients en ont récemment bénéficié dont Brantly et Nancy Writebol qui ont survécu tous les deux. En revanche, un prêtre espagnol et un soignant libérien traités sont décédés. Les stocks de ce médicament sont épuisés et sa production, sur des plants de tabac génétiquement modifiés, requiert des mois.
• La vaccinothérapie préventive.
Deux types de vaccins dirigés contre le sous-type Zaïre du filovirus Ebola (ZEBOV pour Zaire-EBOla Virus), le plus pathogène pour l’homme, font l’objet d’essais cliniques de phase I :
Un vaccin développé par l’Agence de santé publique du Canada, dont la licence est détenue par la société américaine NewLink Genetics, le rVSV-ZEBOV, est constitué par un virus à l’origine d’une maladie bovine, la stomatite vésiculaire (VSV). Génétiquement modifié, il exprime des glycoprotéines spécifiques d’Ebola.
Un vaccin utilisant comme vecteur un adénovirus simiesque et contenant deux gènes d’Ebola est développé par le laboratoire GSK (ChimpAdéno-3 ou cAd3-ZEBOV) et testé par le National Institute of Health américain. Ce virus artificiel pénètre dans les cellules et y insère les gènes sans se répliquer mais en induisant une réponse immune.
Dans le meilleur des cas, ces vaccins entreront en phase II des essais début 2015 et ils ne seront pas disponibles pour une utilisation de masse avant plusieurs mois. Ils posent de plus un problème logistique important car ils se conservent mal et imposent le respect strict de la chaîne du froid.
Parallèlement, la Russie a récemment annoncé qu’elle sera probablement en mesure de livrer des vaccins contre Ebola dans les six mois : l’un d’eux, créé à partir d’une souche virale inactivée, serait même déjà prêt à entrer en phase d’essais cliniques. Une affaire à suivre donc…
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