S’ASSURER de la qualité du service délivré au patient ou au client dans une officine semble être comme un jeu de miroir. De quelle qualité parle-t-on ? Celle que l’on a soi-même imaginée pour le compte dudit patient, ou celle que ce patient a identifiée, ou pas, de son côté ? Si le pharmacien ne fait pas attention à créer un juste miroir dans lequel il se voit à travers les yeux de son patient, il risque de nombreuses déconvenues. « C’est un peu le travers qu’ont de nombreux commerces dont les responsables ont le nez dans le guidon, ils ont des idées sur la clientèle que les clients n’ont pas », souligne Roland Vicaire, directeur solutions BPM d’Asap Pro. Ou à l’opposé de cette attitude, celle constatée par Maurice Belais, cofondateur d’Offisanté, qui consiste à ignorer la satisfaction des clients, par peur du mot « client ». Or, tout le monde se plaît à souligner l’importance de la qualité du service rendu dans les officines pour faire la différence avec la concurrence actuelle et à venir, surtout celle de la grande distribution. Laquelle est elle-même engagée dans des démarches qualité, avec leur indispensable corollaire, les enquêtes de satisfaction de la clientèle.
Pour les pharmaciens, c’est pareil, il faut évaluer la satisfaction des clients ou des patients avant, ou pendant, ou même après toute démarche qualité. Mais cette évaluation est plus complexe car ils ont plus de critères à prendre en compte que dans un espace strictement commercial. Les pharmaciens vont d’abord penser à la qualité du conseil rendu, celle de l’accueil, le temps d’attente peut-être, mais les critères liés aux prix, à l’agencement des linéaires sont aussi importants. Dans ce jeu de miroir où les images et reflets peuvent se perdre à l’infini, les pharmaciens ont besoin de savoir où ils vont.
Dégager une tendance.
La problématique est ancienne et certaines pharmacies évaluent depuis longtemps la satisfaction de la clientèle par le biais des « clients mystères », avec l’aide des groupements auxquels ils appartiennent. L’analyse qui en résulte permet d’identifier si le pharmacien a suivi toutes les étapes d’une bonne démarche qualité. Mais aujourd’hui, la technologie met à leur disposition toute une panoplie d’outils qui leur permet d’aborder la satisfaction client de différentes manières, tout aussi nombreuses au fond que les sujets sur lesquels la clientèle peut être interrogée. Ces outils se basent sur l’interactivité que les technologies digitales offrent désormais, de plus en plus de produits apparaissent permettant aux titulaires d’installer des bornes interactives ou des systèmes encore plus simples d’interrogation. Ces outils, diront certains, conduisent à aborder ce sujet par le petit bout de la lorgnette, aucune démarche n’est inutile cependant. Les clients mystères sont hautement qualitatifs mais ne représentent pas la clientèle dans son ensemble, tandis que pour Jérôme Lapray, responsable marketing de Pharmagest, « les bornes interactives risquent de ne pas constituer un échantillon assez représentatif ». « Peu importe, il faut accepter qu’il y ait un biais, l’essentiel est de dégager une tendance », ajoute-t-il. Un exemple évoqué par Olivier Berthélemy, fondateur de la jeune société Satispharma, raconte combien l’interrogation peut être utile. « Un titulaire avait décidé de changer les blouses blanches de l’équipe pour des blouses de couleur différente, les clients n’avaient jamais réagi mais au cours d’une enquête interactive, ils ont rejeté en masse la nouvelle couleur », illustre-t-il.
Dans ces enquêtes, l’anonymat est essentiel. Roland Vicaire évoque un autre exemple sur lequel les pharmacies s’interrogent beaucoup, la gestion de l’attente. « Les titulaires s’inquiètent du mauvais effet des longues attentes en pharmacie sur la clientèle, mais certaines enquêtes montrent au contraire que pour de nombreux clients, ce point est mineur du moment que par ailleurs, ils sont satisfaits du conseil prodigué au comptoir », explique-t-il.
Une promesse d’engagement.
Au-delà de la perception juste de l’image qu’a l’officine auprès de sa clientèle, ces enquêtes ont l’avantage aussi de poser le sujet de la qualité aux patients et aux clients, de la rendre « physique et palpable », selon les mots de Roland Vicaire. Une borne bien placée, une ou plusieurs questions démontrent l’intérêt de l’officine pour eux, c’est une façon de dire que l’on est engagé dans un processus qualité. Et, dans cette perspective, c’est aussi une promesse d’engagement, avertit Maurice Belais, « les pharmaciens doivent être vigilants sur ce point, quand ils posent par exemple une question sur la disponibilité des produits, c’est une façon de dire qu’ils vont l’améliorer. »
La diversité des outils disponibles et à venir permet d’aborder la question de la satisfaction client sous différents angles. On peut commencer par une interrogation très courte et ludique, à la manière d’Asap Pro qui va commercialiser prochainement une application pour Ipad permettant aux pharmaciens de poser une question à laquelle les clients peuvent répondre. Avant de sortir de la pharmacie, ils appuient sur un smiley représentant un niveau de satisfaction, sur les quatre possibles. Soit une demi-seconde de temps de réponse. Les questions qui seront proposées dans un premier temps concernent la satisfaction d’ensemble, le temps d’attente, la qualité de l’accueil. La première des questions ne permet pas de prendre des décisions, c’est juste un signal aux clients marquant la démarche qualité, mais les deux autres peuvent indiquer par exemple si les flux de l’officine, notamment aux heures de pointe, ont un impact sur la satisfaction. D’autres questions seront proposées ultérieurement. Dans le registre des interrogations instantanées, d’autres ont pensé à profiter d’un moment différent du parcours du client, à l’image de Jade-I qui avec son application Visitor Book, permet au pharmacien de poser une question à ses clients au moment du paiement, ladite question s’affichant sur le terminal de paiement. Les différentes questions possibles portent sur l’accueil, la propreté, la tenue de l’espace de vente, le choix et la rapidité de service.
Une formulation simple.
Évoquons l’exemple de Satispharma qui a lancé récemment sa solution. C’est également une tablette interactive, allouée pendant une durée d’un mois complet, au cours de laquelle les pharmaciens vont pouvoir recueillir l’avis du plus grand nombre possible de clients. La cohérence de ce panel est un des points sur lesquels travaille la société, tout comme les questions, une dizaine environ qui permet de dresser un bilan de la satisfaction de la clientèle à l’égard d’une officine. Les questions sont préparées par Satispharma. « La formulation des questions est importante, il faut que cela soit le plus simple possible, ce qui n’est pas toujours facile, et par ailleurs, il faut poser des questions sur les points les plus pertinents », explique Olivier Berthélemy, qui a choisi un système de notation de 0 à 5, plus parlant et plus objectif selon lui que des niveaux de satisfaction, plus aléatoires. Satispharma propose ensuite un bilan présentant les points à améliorer.
C’est au pharmacien d’entreprendre, après, les actions qu’il estime nécessaire pour corriger tel ou tel aspect. Même si de temps à autre une discussion peut aider le pharmacien. Olivier Berthélemy cite l’exemple de l’évaluation de la satisfaction à l’égard des prix pratiqués par l’officine. « On peut lui conseiller de faire un effort marketing s’il ressort de l’enquête que l’officine n’est pas assez compétitive, notamment au niveau de la mise en avant de promotions, pour changer l’image de sa politique de prix, mais si celle-ci est vraiment trop en décalage avec la concurrence, il faudra aller plus loin. » Un travail marketing que, pourquoi pas, le pharmacien pourra effectuer avec les équipes spécialisées des laboratoires pharmaceutiques.
Le pharmacien peut aller encore plus loin dans sa démarche d’évaluation de la qualité et faire appel à des enquêtes et des évaluations plus poussées. L’offre s’étoffe, ainsi Pharmagest qui a créé une cellule d’expertise comprenant une quinzaine de consultants spécialisés dans le diagnostic en pharmacie, annonce que cette cellule va prochainement intégrer la question de la qualité de service dans son catalogue de prestations. Et une fois évaluée, la qualité de service au client peut alors faire l’objet de différentes stratégies pour lesquelles il existe des outils logiciels. Ce n’est en effet pas comme si on était en terrain vierge, les LGO eux-mêmes traitant indirectement de la qualité de service au client. « Nos logiciels gèrent l’aide à la dispensation, et de ce fait, améliorent le conseil prodigué au patient », estime Sophie Roussel, directrice marketing et communication d’Alliadis. Et cela depuis longtemps. Ces LGO s’étoffent au fur et à mesure, en fonction de plusieurs facteurs, notamment réglementaires dans le cadre des nouvelles missions du pharmacien : les entretiens conventionnels se sont ajoutés au Dossier Pharmaceutique, ce qui permet d’avoir un dossier complet sur les patients. « Nos logiciels permettent aux titulaires d’avoir une méthode pour aller sur le conseil, et notamment en tenant compte des différents profils de l’équipe officinale », précise Sophie Roussel.
Sortir de la notion de flux.
Pour Maurice Belais, l’important est de disposer d’une base de données clients la mieux qualifiée possible, ce à quoi s’emploie Offisanté qui va bientôt proposer cet outil à ses utilisateurs. « J’estime qu’il faut sortir de la notion de flux sur laquelle sont basés la plupart des LGO pour aller vers une notion de clients, ce qui nécessite d’avoir une base de données très structurée de façon à pouvoir ensuite lancer des opérations améliorant la qualité du service rendu en fonction des profils détaillés de la base constituée », explique-t-il. Cela permet notamment de cibler de manière plus fine les clients fidèles qui auront préalablement été bien identifiés. Par exemple, les patients souffrant de pathologies cardiovasculaires, ce qui permettra aux pharmaciens de leur proposer services et produits associés.
Et pour aller encore à un niveau plus élevé, il reste l’approche globale, notamment dans le cadre d’une certification ISO 9001, qui en évaluant l’ensemble des process de la pharmacie, aboutit in fine à l’amélioration du service prodigué aux patients. Asap Pro, avec sa démarche structurée autour de son logiciel PharmaProcess, conduit les officines dans ce processus complexe, fait de mille détails quotidiens qu’il faut identifier et résoudre. Par exemple, la gestion des promis qui peut faire perdre beaucoup de temps à l’équipe officinale et par conséquent aux patients, une fois structurée, apporte une véritable amélioration de la qualité de service.
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