LES PHARMACIES font partie des commerces pour lesquels l’Office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO) recense le nombre de vols à main armée, tout comme il le fait pour les stations-service, les bijouteries ou les établissements financiers. À croire qu’être pharmacien est un métier à risques. Pourtant, comme le rappelle une titulaire à Besançon (Doubs), braquée à deux reprises en quelques années, les caisses des pharmacies ne contiennent que peu de liquide puisqu’elles vendent principalement des médicaments réglés par le biais du tiers payant.
Pourtant, dans le département de l’Essonne, une recrudescence de ces actes a été enregistrée ces deux derniers mois, avec arrestations à la clé. À Orsay, le 22 janvier, deux préparatrices et un client ont été menacés par un homme cagoulé muni d’un fusil de chasse. Celui-ci s’est emparé de la caisse. Bilan : un vol de 150 euros. Le lendemain, ce sont deux hommes qui s’attaquent à une pharmacie des Ulis, armés d’un fusil, et qui repartent avec la caisse. Mais les deux suspects sont arrêtés quelques minutes après leur méfait par la brigade anticriminalité de Palaiseau. En février, c’est une officine de Sainte-Geneviève-des-Bois qui est victime à deux reprises du même braqueur. C’est en tout cas le sentiment de la pharmacienne qui a fait face à un homme cagoulé. En 25 ans, elle compte six braquages. Mais les deux derniers ont eu lieu à 15 jours d’intervalle. Entre-temps, une pharmacie de Morsang-sur-Orge a aussi été braquée.
Vigipirate.
« C’était le 31 janvier dernier, il était 18 h 45, on était quatre à servir. Il y avait deux clientes à l’intérieur, leurs conjoints les attendaient dans leur voiture, garée devant. D’un seul coup, deux hommes sont entrés en courant et ont crié « la caisse ! », l’un avec un pistolet, l’autre avec une bombe lacrymogène, tous deux cagoulés et gantés. On a tous eu un mouvement de recul, puis j’ai sorti le tiroir-caisse et l’ai donné. Cela n’a duré qu’une minute… » Virginie Buisson a rapidement su que sa consœur de Sainte-Geneviève-des-Bois avait été braquée une deuxième fois et ne cachait pas son angoisse d’être à nouveau la cible de ces hommes armés. D’autant que c’est sur elle que l’arme était braquée, « certainement parce que j’étais à la caisse située au centre ». Malheureusement sa crainte s’est révélée juste puisqu’elle a été, à nouveau, victime d’un vol à main armée le 23 février. Mais en fin de semaine dernière, la Sûreté départementale a arrêté l’un des auteurs présumés de ces vols répétés, un jeune homme de 16 ans présenté à un juge vendredi et placé en détention provisoire.
Selon une source proche du dossier, ces actes pourraient être liés à la surveillance renforcée de certains lieux à risques depuis la mise en place du plan Vigipirate élevé au niveau alerte attentat, qui freinerait les habituels trafics de drogue et contraindrait les dealers à se tourner vers d’autres moyens pour obtenir rapidement de l’argent.
Soutien moral.
Néanmoins, le plan Vigipirate aurait aussi pour effet de ralentir globalement les agressions en ce début d’année. C’est en tout cas le ressenti d’Alain Marcillac, le référent sécurité de l’Ordre des pharmaciens. En 2014, les données statistiques seraient plutôt favorables à une légère baisse ou une stagnation des attaques dont les pharmacies sont l’objet, mais les chiffres ne sont pas définitifs. En 2013, selon l’OCLCO, 104 vols à mains armées ont concerné des officines, soit 14 faits de moins qu’en 2012, mais les chiffres sont fluctuants d’une année sur l’autre et tournent toujours autour d’une centaine. Ces données ne prennent pas en compte les agressions sans arme, les incivilités diverses et variées. Alors que la plupart des braquages et cambriolages subis par les officines ne concernent plus les médicaments et autres stupéfiants, se pose la question du choix de cible par les malfaiteurs qui prennent des risques importants pour de petites sommes. « L’un des facteurs auxquels nous pensons est la féminisation importante de la profession, et, sans machisme aucun, il est toujours plus facile de s’en prendre à une femme », indique Alain Marcillac.
L’après agression n’est pas non plus à négliger sur le moral des troupes. « Nous savons qu’une cellule de soutien psychologique est à notre disposition au tribunal d’Evry si nous en ressentons le besoin. J’en ai fait part à mon équipe. Nous n’avons pas changé nos pratiques depuis l’attaque et j’espère que nous n’aurons pas à le faire », note pour sa part la titulaire de Morsang-sur-Orge.
L’Ordre des pharmaciens se place aussi en soutien moral, logistique et administratif du confrère qui en a besoin, il réagit donc dès qu’il a connaissance d’un acte malveillant. Et, dans certains cas, il peut débloquer des fonds pour fournir une aide financière. « Nous avons de multiples interlocuteurs, insiste Alain Marcillac. Nous travaillons tous azimuts pour mutualiser les moyens et assurer la tranquillité des pharmaciens. »
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