Après la crise du Covid-19, où ils ont été en première ligne de la lutte contre la pandémie, les pharmaciens et leurs adjoints ont fait valoir leur capacité, et surtout leur volonté, de pouvoir assumer de nouvelles responsabilités. Si les discussions sont toujours en cours sur le droit de substitution des biosimilaires, de nombreuses organisations ont décidé d’anticiper et de proposer des modules de formation à destination des officines. Face à ce droit réclamé depuis longtemps, quelle est la place des adjoints ?
Un droit longtemps discuté
Le droit de substitution biosimilaire prévoit que les pharmaciens - et donc leurs adjoints - puissent délivrer aux patients un traitement biosimilaire équivalent au traitement via un biomédicament prescrit par le médecin. Ce droit, qui avait été autorisé dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale en 2014, n’était jamais entré en vigueur, faute de publication des décrets d’application. Il fut donc retiré du Code de la santé publique en 2020, avant de se retrouver inscrit à l’article 39 de l’avant-projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFFS) 2022. Avec quelques petites différences toutefois : la substitution ne sera limitée qu’à une liste précise de molécules, et ne pourra se faire qu’à condition que le médecin prescripteur ne s’y oppose pas et que cette substitution s’opère dans le cadre d’un primo-traitement, hors traitement chronique.
L’adjoint, au cœur de la vie officinale
Au contact direct des patients, les pharmaciens adjoints partagent les missions du titulaire. « Selon moi, le pharmacien d’officine adjoint a une réelle plus-value », affirme Matthieu Gauthier, directeur médical et pharmaceutique du groupement Totum pharmaciens. « Pourquoi ? Car il a été formé plus récemment, et il est souvent référent au sein de son officine dans l’accompagnement des patients, à travers les entretiens conventionnés et les bilans partagés de médication. Je pense que la dispensation et la transmission des informations liées aux biosimilaires et médicaments biologiques vont logiquement intégrer l’activité pharmaceutique. À ce titre l’adjoint a toute sa place pour devenir le référent dans cette activité. »
L’objectif après tout est le même : accompagner les patients souffrant de maladie chronique.
Pour Alexis Le Tohic, pharmacien adjoint dans le 6e arrondissement de Paris, les adjoints sont parfaitement aptes à cette mission. « Tant que c’est effectué proprement, il n’y a pas de raison qu’on ne puisse pas le faire. Des confrères que je connais, jeunes notamment, sont très favorables à l’idée. » Une inquiétude, toutefois, reste présente : « Nous risquons de manquer de bras pour effectuer toutes ces nouvelles missions en plus des existantes, explique une pharmacienne adjointe exerçant à Malakoff. On est souvent en pénurie de personnel, et si ça continue, il sera difficile de se concentrer sur cette nouvelle tâche. » Une problématique à prendre en compte, alors que les pharmaciens adjoints sont plus mobilisés que jamais dans la vaccination.
Un rôle interprofessionnel
Ce rôle est d’autant plus important que l’implication des adjoints va croissant avec l’importance de la pharmacie où ils travaillent. « Ils ont comme rôle d’être garants de leur bon usage en médecine de ville. Ce qui passe par le fait de transmettre des informations validées, claires et synthétiques sur les médicaments auprès des patients, jusqu'à devenir leur interlocuteur privilégié sur les questions relatives au traitement par les biothérapies, et évidemment, par les biosimilaires », explique Medhi Djilani, président de Totum pharmaciens.
Mais ces interactions ne s’arrêtent pas au patient. Elles s’étendent aussi aux autres professionnels de santé. « C’est un rôle qui est définitivement interprofessionnel. Une des missions du pharmacien adjoint sera de prendre le taureau par les cornes, et communiquer avec les médecins prescripteurs, médecins traitants, préparateurs, infirmiers en charge du suivi du patient, afin de s’assurer de la standardisation des messages d’information », reprend M. Djilani. Une manière de s’assurer que le reste de l’équipe peut aussi remplir ce rôle auprès des patients, mais aussi de les rassurer en évitant les discours contraires. Car aider son patient à comprendre son traitement, c’est aussi le faire adhérer à ce dernier et augmenter ses chances de guérison.
Former les savoirs
Un accompagnement très apprécié des patients. Côté profession un besoin émerge : celui de la formation. « Le pharmacien adjoint doit bénéficier des mêmes formations que le titulaire pour accomplir son métier », explique Medhi Djilani. « Les biomédicaments sont déjà des molécules particulières, qu’on maîtrise parfois moins bien qu’un médicament traditionnel… Si on ajoute à ceci la complexité des biosimilaires, il faudra une rigueur supplémentaire dans la formation », rappelle Alexis le Tohic. Mais les connaissances ne font pas tout. « Il nous faut également des outils métiers, qui font défaut aujourd’hui », reprend Alexis Le Tohic.
En réponse à cette demande, Christine Caminade Conseil a codéveloppé un référentiel de formation en partenariat avec l’Observatoire national des biosimilaires (ONB). Ce référentiel sera orienté vers la prise en charge et le suivi des patients, la dispensation des médicaments et les explications quant à leur utilisation, y compris pour les patients recourant à l’auto-injection. Une formation qui ira de pair avec le projet du groupement Totum, celui de la création d’un site de référence « guichet unique » sur le sujet, bioMedInfo, prévu pour sortir courant 2022.
« Les biomédicaments en officine, c’est plus de 10 familles thérapeutiques et plus de 120 spécialités. Ce sont des chiffres déjà importants, et qui ne vont faire qu’augmenter. Il y a donc effectivement beaucoup de choses à dire », reprend Matthieu Gautier. Au programme donc : une base de données composée de fiches et de pages produits, avec une entrée par produit et par indication thérapeutique, comprenant les caractéristiques de chacun, mais aussi les modes d’application et les bons usages, afin de faciliter l’utilisation des biomédicaments et de leurs biosimilaires. Le site ne sera pas accessible seulement aux pharmaciens adjoints, mais aussi aux préparateurs, le but étant de « faire avancer la profession ».
Une remise en question permanente
Jamais le métier de pharmacien n’a été autant sous le feu des projecteurs. Les attentes, que ce soit des patients, de la profession, mais aussi du gouvernement, sont conséquentes. Pour être à la hauteur, les pharmaciens, et en particulier les adjoints, devront s’adapter, comme ils l’ont toujours fait, à leurs nouvelles missions. Cela passera par une remise à jour de leurs compétences, mais surtout, comme il est de mise dans la profession, par un dévouement total aux besoins du patient.
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