Serait-ce la fin du feuilleton qui tient en haleine depuis juin 2015 les pharmaciens acteurs de la vente en ligne de médicaments ? Le 1er décembre, après que l’Ordre des pharmaciens a saisi le Conseil d’État, le ministère de la Santé s'est résolu à promulguer deux décrets sur les bonnes pratiques de dispensation du médicament. Le premier contient plusieurs dispositions relatives aux règles du commerce électronique de médicaments (1). Le second, entièrement tourné sur la vente en ligne, en dicte les modalités techniques (2).
Il aura fallu dix-huit mois pour aboutir à cette nouvelle mouture. La précédente, datant de juin 2013, avait été annulée en mars 2015 par le Conseil d’État au motif que le ministère de la Santé avait outrepassé ses prérogatives. Depuis, ne prévalaient que les règles édictées par le décret du 31 décembre 2012 se limitant à autoriser cette activité sur Internet sans en définir les contours.
À quelques détails rédactionnels près, les textes reprennent dans ses grandes lignes l’arrêté de 2013. Le ministère maintient donc sa position initiale. Et ne retient en aucune façon les préconisations de l’Autorité de la concurrence qui, en juillet dernier, s’agaçait des contraintes imposées par la France au commerce en ligne de médicaments.
Bruno Laserre, son président, allait jusqu’à fustiger cet « exemple de frilosité française ». Il dénonçait l’obligation faite aux pharmaciens de stocker les médicaments vendus en ligne dans les locaux de la pharmacie ou à proximité immédiate. Ou encore celle qui consistait à prendre en compte le chiffre d’affaires réalisé en ligne pour l’application des règles relatives au nombre de pharmaciens à employer.
Plus strict qu'au comptoir
Le gouvernement persiste donc à considérer les sites de vente de médicaments en ligne comme le prolongement de la pharmacie physique. Une approche qui l’amène à réaffirmer que la préparation des commandes, liées au commerce électronique de médicaments, ne peut se faire qu’au sein de l’officine concernée, dans un espace adapté à cet effet.
De même, l’arrêté stipule que l'effectif de l’équipe doit être augmenté en proportion « si le commerce électronique de médicaments conduit à un développement de l’activité ». De manière générale, le patient, sa sécurité et celle du médicament, sont la priorité affirmée de ces deux textes.
C'est ainsi que le ministère oblige le patient à remplir un questionnaire détaillé lors de la première commande. Comme au comptoir, le nombre de boîtes délivrées est limité et un dispositif sur le site alerte le pharmacien dès lors que la quantité maximale est dépassée. De même, dans le monde virtuel, la vente de médicaments doit également donner lieu à un échange « interactif » entre le patient et le pharmacien à chaque commande. Les textes imposent même des règles plus strictes qu'au comptoir, car ce dialogue individualisé doit pouvoir être imprimé par le patient grâce à une iconographie spécifique sur le site.
À nouveau, les autorités poussent le curseur encore plus loin pour la pharmacie en ligne en imposant la consultation obligatoire de la notice par le patient lors de la commande. Cette notice doit être disponible au format PDF et imprimable. La présentation du médicament sur les sites est d’ailleurs strictement encadrée : elle doit répondre à des standards reprenant un certain nombre d’informations (dénomination fantaisie et DCI, indications thérapeutiques de l’AMM, forme galénique et nombre d’unités de prise et prix) ainsi qu’un lien hypertexte renvoyant au RCP ; les fiches sur le médicament, autres que le RCP, sont interdites.
Question rigueur, le site n'a rien à envier aux rayons de l'officine. Les produits devront être présentés de manière claire et non ambiguë par des photos de taille identique. Pour toutes les informations diffusées sur le site, la mention « Page mise à jour le… » est obligatoire. Enfin, le site doit comporter le logo prévu par le règlement de l’Union européenne. Mais, nouveauté, il ne doit apparaître que dans les parties du site Internet proposant des médicaments.
Les pharmaciens en ligne ont deux mois pour mettre leur site en conformité avec ces nouvelles règles.
1) Arrêté du 28 novembre 2016 relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments dans les pharmacies d'officine, les pharmacies mutualistes et les pharmacies de secours minières, mentionnées à l'article L. 5121-5 du code de la Santé publique.
2) Arrêté du 28 novembre 2016 relatif aux règles techniques applicables aux sites Internet de commerce électronique de médicaments prévues à l'article L. 5125-39 du code de la Santé publique.
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